Il s’appelle Jean Lopez, il est historien et il s’est attelé à une tâche de trois ans inédite en la matière : apporter un éclairage nouveau sur la Seconde Guerre mondiale, appelée aussi WW2 par nos amis anglo-saxons, au moyen de 357 cartes. Une infographie précise, recoupée, et surtout très esthétique. Le chercheur ayant donné son exclusivité au Figaro dans sa version abonnés, nous n’allons pas pouvoir tout montrer, seulement quelques pièces de cet immense travail.
Cet effort statistique et cartographique sans précédent sera récompensé. Par exemple, l’étude des tonnages des cargos et pétroliers coulés par les sous-marins allemands dans la bataille de l’Atlantique montre une inversion de la guerre en 1943, qui n’est donc pas uniquement imputable à la victoire soviétique à Stalingrad :
« Dans ses Mémoires, Churchill écrit que la bataille de l’Atlantique est “le seul péril” qu’il ait vraiment craint. En s’attaquant aux cargos et pétroliers, les U-Boote visent à étouffer l’économie britannique et empêcher un débarquement allié. L’âpreté des combats est indéniable : les Alliés perdent plus de 2 000 navires et 30.000 marins de commerce ; le Reich, 25.000 sous-mariniers à bord de 700 navires.
Pourtant, les statistiques indiquent que la grande majorité des convois traversent l’océan sans être attaqués. Et, à partir de la mi-1943, grâce aux bombardiers équipés de radars et de nouvelles munitions, le nombre de sous-marins allemands coulés explose, alors que la production américaine de navires s’envole. Le Reich ne pouvait pas gagner. »
Et pourtant, Lopez est un spécialiste des batailles de Stalingrad, Koursk et Berlin. des grandes confrontations terrestres plus que des tonnages coulés dans les océans.
Autre découverte par les cartes, l’équation pétrolière :
« C’est dans ce domaine que la défaite de l’Axe se lit de la façon la plus nette. Le Reich a beau se lancer dans la production d’essence synthétique à partir du charbon, celle-ci n’assurera pas plus de 40 % de ses besoins. Mussolini dispose d’une belle marine, mais il dépend du mazout des États-Unis. Le Japon aussi, et ses stocks sont vulnérables aux bombardements. Certes, Tokyo s’empare des puits des Indes néerlandaises (Sumatra, Java) et de Bornéo, mais les sous-marins américains envoient par le fond son trafic pétrolier. Là encore, les cartes sont sans équivoque. »
Voici, sans trahir l’article et encore moins le contenu du livre, six cartes parmi les 357.
Pour stimuler l’effort intellectuel de nos lecteurs, nous n’avons pas mis de titres ni de développements relatifs aux cartes, pour voir si elle fonctionnent de manière autonome. Ou alors juste un, le premier, sur la France et le Blitzkrieg.
« La guerre éclair ou Blitzkrieg est-elle « une doctrine opérationnelle révolutionnaire où l’action combinée et concentrée des chars et des avions surprend l’ennemi, permet son encerclement et sa destruction massive » ? Ou la continuité de la pensée militaire allemande depuis Frédéric II, actualisée par des praticiens pragmatiques (Guderian et Rommel) et s’appuyant sur des technologies modernes ? La question oppose les spécialistes. Quoi qu’il en soit, la Wehrmacht a hérité le goût de la surprise, la concentration des moyens, la souplesse et la conservation de l’initiative. En 1918 étaient déjà encouragés le commandement de l’avant et la délégation de l’exécution aux subordonnés sur le terrain. Il existait des unités d’infiltration. Et, pour sidérer l’ennemi, les Allemands avaient inventé le barrage d’artillerie massif. Autant d’opérations visant à accélérer la manœuvre qui trouveront leur accomplissement au printemps 1940, notamment dans le franchissement de la Meuse à Sedan. »
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