Son ouverture est passée relativement inaperçue, le 17 novembre dernier. Tout occupés par la polémique liée à l’annulation de la visite de Vladimir Poutine, à l’occasion de la bénédiction de la cathédrale russe de Paris, les observateurs ont été peu nombreux à relever l’inauguration, le mois dernier, de l’institut Pouchkine, à l’ombre de l’imposant édifice religieux.
Situé avenue Rapp, dans une annexe du bâtiment dessiné par l’architecte Jean-Michel Wilmotte, ce centre traduit pourtant une inflexion de la politique étrangère voulue par le Kremlin. Sa création exprime ainsi la volonté du gouvernement russe de réinvestir le champ de la diplomatie culturelle. Le fait que le chantier ait été suivi par Alexandre Kolpakov, proche de Vladimir Poutine et directeur général des affaires de l’administration présidentielle, indique, si besoin était, que le Kremlin accorde une importance particulière à ce projet.
Cette implication au plus niveau n’a d’ailleurs pas manqué de susciter des fantasmes quant à l’éventuelle présence sur place d’un dispositif d’écoute sophistiqué permettant aux services secrets russes d’intercepter les communications des ambassades et des administrations voisines. Une rumeur que l’ambassadeur de la Fédération de Russie en France, Alexandre Orlov, a balayée d’un éclat de rire quand des journalistes la lui ont rapportée. « Les progrès des systèmes d’interception rendent obsolètes de telles installations », a-t-il glissé, moqueur.
Un centre cultuel autant que culturel
Le réseau des instituts Pouchkine, qui vient de fêter ses cinquante ans d’existence, avait connu son heure de gloire à l’époque soviétique. Dans les années 70, cette administration, dépendant directement du ministère de l’Enseignement russe et (officiellement) dédiée au rayonnement de la langue et de la culture de la patrie de Tolstoï, Dostoïevski, Tchekhov et Pouchkine, avait compté jusqu’à une vingtaine de centres répartis à travers le monde. « Nous reconstituons progressivement ce réseau », confie au Point.fr Margarita Rusetskaya, rectrice de cette institution depuis trois ans. Le réseau Pouchkine compte pour le moment une poignée de centres : en Europe centrale et orientale, mais aussi à Athènes, Caracas ou encore Hanoï. « De nombreuses ouvertures sont projetées dans les années à venir », annonce Margarita Rusetskaya.
[...]
Une vitrine russe
« L’idée est de faire de ce lieu une vitrine de la civilisation russe », exposait l’ambassadeur de la Fédération de Russie en France, Alexandre Orlov, au moment de son inauguration. Une vitrine et une caisse de résonance... comme l’a souligné une table ronde coprésidée par Levon Saakyan, enseignant du réseau Pouchkine et Oleg Kupriyanov, professeur à l’École des hautes études en sciences économiques de Moscou, à la mi-décembre. Une table ronde à laquelle ont participé Dmitri Boschman, chef du bureau de l’agence Sputnik, mais aussi Ilia Klishin, fondateur de la webTV RTVi Digital et Thomas Beguin, fondateur du site Russie.fr. « Permettre aux Occidentaux d’envisager l’actualité du monde d’un point de vue russe est l’une de nos priorités », a indiqué, à cette occasion, Azha Khanova, professeur à l’institut.