Située en face du détroit de Bab el-Mandeb, lequel voit passer 40% du trafic mondial, et près des zones actuellement en crise (Somalie, Yémen), la République de Djibouti est courtisée par les grandes puissances qui souhaitent y établir des bases militaires.
Ainsi, après la France, les États-Unis (ces derniers mènent des opérations anti-terroristes dans la région depuis le Camp Lemonnier) et, plus récemment, le Japon, la Chine pourrait très prochainement y bénéficier de facilités militaires. « Les discussions sont en cours », a ainsi affirmé Ismaïl Omar Guelleh, le président djiboutien.
« Les plus grands bateaux de commerce de cette décennie seront chinois. La Chine a donc besoin de protéger leurs intérêts et ils sont les bienvenus », a en outre fait valoir M. Guelleh. Ainsi, Pékin souhaiterait disposer d’une base permanente à Obock, une ville portuaire du nord de Djibouti.
D’ailleurs, le mois dernier, pour sa première participation à une opération humanitaire internationale visant à évacuer des ressortissants étrangers d’un pays en guerre – en l’occurrence, le Yémen - la marine chinoise s’est appuyée sur Djibouti pour y débarquer les réfugiés pris en charge par l’un de ses navires, alors engagé dans un mission de lutte contre la piraterie dans le golfe d’Aden.
En février 2014, les deux pays avaient en effet conclu un « partenariat stratégique de sécurité et de défense », autorisant la marine chinoise à utiliser le port de Djibouti .
« En échange, nous avons sollicité une coopération militaire élargie pour nous permettre de renforcer les capacités opérationnelles des forces armées djiboutiennes afin de préserver la sécurité dans le pays et de nous aider à consolider la paix et la sécurité dans la sous-région », avait affirmé, à l’époque, Hassan Darar Houffaneh, le ministre djiboutien de la Défense. « Dans cette affaire, nous a mis l’accent sur le renforcement des capacités de la marine de Djibouti, qui manque de bateaux de patrouille, et le renforcement des capacités de l’armée de l’air, qui va bientôt acquérir des avions chinois », avait-il ajouté.
Outre l’aspect militaire, Pékin a également signé des accords de coopération économique avec Djibouti. Ainsi, la Chine finance déjà plusieurs projets d’infrastructures (aéroport, lignes ferroviaires, etc…)
Par ailleurs, la France et la République de Djibouti sont liées par un accord de défense signé en 1977 et révisé en 2011. Ce dernier oblige les forces françaises à « contribuer, le cas échéant, à la défense de l’intégrité territoriale » de Djibouti et à « participer à la surveillance de (ses) espaces aérien et maritime ». Dans les faits, l’armée de l’Air – et en particulier l’escadron 3/11 Corse – assure la protection du ciel djiboutien étant donne que les forces aériennes de ce pays de la Corne de l’Afrique ne disposent, en tout, qu’une quinzaine d’aéronefs destinés au transport léger et aux évacuations sanitaires.
Dans un avis publié à l’occasion, justement, de la ratification de ce nouvel accord de défense et rendu au nom de la Commission de la Défense de l’Asssemblée nationale, le député Nicolas Bays avait estimé que la France devait « se montrer vigilante si elle entend conserver la place qu’elle souhaite occuper dans cette zone géographique alors qu’elle a déjà réduit sa présence historique » [ndlr, après le départ de la 13e DBLE pour les Émirats arabes unis].
« Ainsi, avait ajouté le parlementaire, il serait dommageable, et contraire à l’objectif d’autonomisation des forces africaines, d’abandonner certains domaines de la coopération au profit, non pas d’acteurs djiboutiens, mais de l’une ou l’autre des forces étrangères stationnées ». Et d’estimer que « le risque de perte d’influence, voire d’éviction graduelle existe, et qu’il doit être pris en compte lors des décisions concernant l’avenir de nos forces prépositionnées ».