« Dix ans de mixité sociale au collège : le public fait-il vraiment mieux que le privé ? ». C’est le titre de l’étude réalisée par le pôle de recherche en économie de l’Edhec Business School, qui répond par la négative. Réalisée par l’économiste Pierre Courtioux, cette étude porte sur la période 2004-2014.
La question et la réponse sont éminemment politiques : depuis des années, ceux qui dénoncent une concurrence déloyale du privé querellent ceux qui défendent son caractère propre. Surtout, cette étude apporte une réplique à ceux qui proposent d’établir des quotas de recrutement pour les établissements privés et une modulation des aides publiques en fonction de leur ouverture sociale.
Que dit cette étude ? D’abord, elle indique que la mixité sociale au collège a assez peu varié entre 2004 et 2014. Ensuite, elle nous apprend qu’au regard de la répartition des catégories sociales, les établissements privés font mieux : « Nos résultats indiquent finalement que les collèges privés sont surreprésentés au sein des collèges les plus “performants” en termes de mixité sociale : alors qu’ils ne représentent que 20 % de l’ensemble des collèges, 50 % des collèges privés appartiennent au tiers de collèges les plus mélangés socialement. Par ailleurs, la présence des collèges privés au sein des collèges contribuant le plus fortement à la mixité sociale s’est accentuée entre 2004 et 2014 ».
Ghettoïsation des collèges publics
Pierre Courtioux en tire une conclusion : « Plus que la segmentation public/privé, c’est bien la segmentation au sein du secteur public qui sous-tend les problèmes de mixité sociale au collège en France ». Il va même plus loin : « Notre étude tend à démontrer que les recommandations récentes tant de la part d’économistes que de sociologues visant à imposer au privé, de manière homogène, des critères de recrutement des élèves sont mauvaises. »
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« Je suis prof de français, plus jamais je ne voterai PS »
On les a finalement peu entendus. À la veille de la mobilisation, le JDD a interrogé une dizaine de profs en colère : hommes, femmes, syndiqués ou non, enseignant l’histoire-géo, le latin, les maths, l’allemand, le français ou la musique. Certains travaillent dans des collèges favorisés, d’autres en réseau d’éducation prioritaire. Les uns en banlieue parisienne, les autres dans le Nord-Pas-de-Calais, en Rhône-Alpes, en Bretagne… Pourquoi s’apprêtent-ils à faire grève ?
Blessure
D’abord, la présentation de la réforme leur a déplu. « Je n’ai jamais perçu autant d’amertume en salle des profs, assure Tanguy Simon, qui enseigne dans un établissement des Yvelines. Quand la ministre de l’Éducation passe son temps à répéter que les élèves s’ennuient au collège, c’est forcément blessant… Je suis prof de français, plus jamais je ne voterai PS. »
Les professeurs de latin et de classes bilangues n’ont pas apprécié d’être pointés du doigt : « Parmi mes 110 élèves, beaucoup sont issus de milieux très défavorisés. Mes cours ne sont pas réservés à une élite ! », réagit Isabelle Woydyllo, enseignante dans un collège du 93. Chacun aimerait pouvoir s’opposer à la réforme sans être traité de « pseudo-intellectuel », d’« immobiliste » ou de « conservateur ».
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Inégalités
La réforme du collège vise à donner les mêmes chances à tous les élèves. Ces professeurs craignent, au contraire, qu’elle creuse les inégalités. En raison de l’autonomie laissée aux établissements : « Ce sera la fin de l’Éducation nationale, le début de l’éducation locale. » En raison de la suppression des classes bilangues : « Les parents qui en ont les moyens mettront leurs enfants dans le privé. Cela supprimera la mixité sociale qu’avaient réussi à instaurer certains collèges défavorisés. » Ou en raison de programmes jugés « vides » :
« En français, le texte proposé ne mentionne ni auteurs, ni œuvres, ni courants littéraires. Il cite pêle-mêle des supports possibles aussi variés que les récits, les contes, la poésie, les BD, les fictions audiovisuelles…, s’alarme Véronique Marchais, professeur de lettres en Indre-et-Loire. Quelle est la probabilité qu’on étudie des comics et des séries télé à Henri-IV ? Ce sont les pauvres qui auront droit à cela… »