Dans le cadre de la lutte contre la radicalisation, le ministère de l’Education recommande au corps enseignant de prévenir et de sensibiliser les élèves contre les « théories complotistes ». Une approche précipitée et dogmatique. Une incitation à « penser droit » ?
Le gouvernement a lancé un plan d’action contre la radicalisation et le terrorisme qui mobilise les fonctionnaires de l’État en leur recommandant d’« agir avec trois principes : fermeté, sérénité, unité ». Parmi les nouveaux appelés de cette lutte contre les égarements idéologiques, figurent les enseignants. Dans le dossier de presse de ce plan d’action, daté du 9 mai, il est indiqué que « les agents publics, notamment les enseignants, qui sont quotidiennement au contact avec les jeunes, constituent des acteurs de premier niveau essentiels pour détecter des dérives pouvant conduire à la radicalisation et pour entraver l’adhésion aux théories du complot, aux comportements de rupture et aux discours de haine qui favorisent de telles dérives ». Haro sur la jeunesse et appel à la vigilance de ses professeurs !
L’intransigeance est mauvaise conseillère pédagogique. Elle peut être une vertu morale pour ceux qui ont la conviction d’avoir toujours raison ; elle est surtout la marque d’un dogmatisme qui, une fois mis en œuvre, fait échouer toute pédagogie. Il y a fort à parier que la fermeté, précipitée et irréfléchie, ruinera la sérénité et l’unité, installant la crispation, la suspicion et le conflit dans les établissements scolaires.
Nouvelle marotte du moment : la lutte contre le complotisme ! Organisée sans préparation ni sensibilisation des enseignants à une connaissance des théories du complot (infiniment plus complexes à comprendre qu’à dénoncer), elle repose sur une volonté contre-productive de normalisation des représentations. Au mieux, les élèves les plus malins ou les plus provocateurs sauront piéger les commissaires politiques de la rééducation mentale ; au pire, les contre-feux maladroitement allumés ne feront que transformer les convictions timides en brasier. Les outils offerts par le ministère de l’Éducation nationale sont indigents, et ne sauraient remplacer une formation en histoire des idées et philosophie politique.
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