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Pourquoi je porte plainte contre le groupuscule "Brigade juive"

Par Gilles Munier

J’ai reçu la semaine dernière – comme de nombreuses personnalités et militants anticolonialistes et antisionistes avant moi – un courriel d’un groupuscule se faisant appeler « Brigade juive » menaçant de me « scalper » et de transformer ma vie en « cauchemar » !

Cette « Brigade juive » – nom tiré d’une bande dessinée – me reproche d’avoir diffusé sur Internet des articles justifiant le boycott des produits manufacturés en Israël et dans ses colonies en Palestine.

Ces menaces font suite à des informations parues dans la presse israélienne annonçant la création, au sein du Shin Bet, d’un « Département de délégitimation » qui répertorie et espionne les organisations étrangères faisant la promotion de la campagne BDS (Boycott, désinvestissement, sanctions), à la nomination de coordinateurs anti-BDS dans les principales ambassades israéliennes. Une unité spéciale dite des « sales tours » est en voie de constitution pour intimider et diffamer les « boycotteurs » les plus en vue.

Je prends au sérieux le message de la « Brigade juive », car il émane d’un groupuscule dépendant de la Ligue de défense juive (LDJ), organisation terroriste interdite aux Etats-Unis… et en Israël, mais tolérée – voire soutenue et encouragée – en France.

 

La LDJ est-elle intouchable ?

Depuis des années, des membres de la LDJ sont accusés d’avoir vitriolé, attaqué au couteau ou à coup de barres de fer, avec des gaz ou des bombes de peinture, des personnes opposées à la politique du gouvernement israélien. Certains ont été arrêtés, mais rarement condamnés. Pour échapper à la justice française les plus dangereux se réfugient en Israël, pays avec lequel la France n’a pas signé de traité d’extradition.

L’unité dite des « sales tours » provoquera des drames. Un certain Grégory Chelli – alias Ulcan, membre de la LDJ réfugié en Israël – s’en est fait une spécialité avec ses « canulars » téléphoniques en attaquant des journalistes et des personnalités selon lui trop critiques à l’égard d’Israël. Fin juillet 2014, il s’en est pris à Benoît Le Corre, du site Rue89, auteur d’un article dénonçant ses activités de hacker. Pour se venger, il a téléphoné aux parents de ce dernier en se faisant passer pour un policier, et leur a annoncés la mort dans un accident de voiture… Puis, deux jours plus tard, il a téléphoné à la police en se faisant cette fois passer pour le père du journaliste, disant qu’il venait de tuer sa femme et son fils. Résultat : le père du journaliste, choqué par l’irruption en pleine nuit de policiers en armes à son domicile, est mort d’une crise cardiaque.

Certes Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, a évoqué cette affaire lors d’une entrevue avec Benjamin Netanyahou, mais il n’a obtenu que la fermeture du compte Facebook du hacker. Autant dire peanuts. Ni Fabius, « ni Manuel Valls ni François Hollande n’ont dénoncé publiquement les agissements d’Ulcan », remarquait alors l’hebdomadaire L’Express.

 

Terrorisme israélien : la politique du « deux poids-deux mesures »

Si j’ai porté plainte pour « menace de mort » contre la soi-disant « Brigade juive », je ne me fais aucune illusion quant au résultat. Je garde à l’esprit celle que j’ai reçue en août 2003 – et adressée à une vingtaine d’autres personnes – accompagnée d’une balle de 22 long rifle et du message : « La prochaine n’arrivera pas par la poste » ! À l’époque, un juge avait regroupé les plaintes et la police était parvenue à mettre la main sur le coupable : un extrémiste pro-israélien, retraité d’une société d’import-export.

La perquisition effectuée à son domicile avait permis de découvrir un dépôt d’armes et de munitions, parmi lesquelles une lunette de visée de nuit et des réducteurs de sons. Lors du procès, l’individu s’était montré agressif, nous assimilant à des animaux nuisibles à éliminer. Nous pensions tous que sa condamnation serait exemplaire. Nous nous trompions. Il ne fut condamné qu’à… un euro de dommages-intérêts.

La justice française est à géométrie variable lorsqu’elle juge des activités délictueuses liées aux conflits du Proche-Orient. Imaginez le tapage qu’aurait provoqué l’envoi de menaces de mort à des militants pro-israéliens et la peine écopée par son auteur s’il s’était appelé Muhammad…

Le gouvernement français a décrété l’État d’urgence pour répondre aux menaces de l’État islamique. Ordre a été donné de fermer des sites Internet dits salafistes et d’arrêter les islamistes soupçonnés d’appartenir à des cellules terroristes. Pour ne plus être accusé de faire « deux poids-deux mesures », le ministère de l’Intérieur devrait s’en prendre avec la même rigueur aux extrémistes juifs sionistes.

Les menaces de la soi-disant « Brigade juive » et des services spéciaux israéliens n’étoufferont pas la campagne BDS. Elle gagne du terrain, se développe chaque jour un peu plus en France et dans le monde, car c’est un mouvement de protestation pacifique et efficace pour faire entendre raison à la dernière colonie occidentale au Proche-Orient, la contraindre à respecter les résolutions des Nations unies et les droits de l’homme. En résumé, comme l’a écrit le 1er mai dernier Gideon Levy, journaliste du quotidien Haaretz, c’est « le seul moyen pour empêcher Israël de persister dans ses crimes ».

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