Une page d’histoire franco-espagnole est-elle tournée ? ETA, qui avait annoncé son « désarmement total » ce samedi, a livré aux autorités françaises une liste de caches d’armes, un geste salué par Paris mais insuffisant pour l’Espagne, qui appelle l’organisation séparatiste basque espagnole à s’auto-dissoudre.
ETA, qui a renoncé à la lutte armée en 2011, a fourni une liste de huit caches d’armes et d’explosifs, ce qu’il resterait de son arsenal : elles sont situées dans le département des Pyrénées-Atlantiques, frontalier de l’Espagne.
« Près de 3,5 tonnes d’armes, explosifs et matériels nécessaires à la fabrication d’engins explosifs » y ont été retrouvées, selon le Premier ministre Bernard Cazeneuve. Le chef du gouvernement s’est félicité samedi soir d’une opération menée « sans violence ». Il a salué « une étape décisive vers la fin du terrorisme indépendantiste basque » et a rendu hommage aux victimes de l’organisation clandestine.
La tonalité était tout autre du côté du gouvernement espagnol, qui a appelé ETA à « annoncer sa dissolution définitive, demander pardon à ses victimes et disparaître, au lieu de monter des opérations médiatiques pour dissimuler sa défaite ».
Dès vendredi, Madrid avait prévenu qu’ETA ne tirerait « aucun avantage, aucun bénéfice politique » de son désarmement unilatéral.
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Désarmement de l’ETA : « L’organisation, c’est vingt militants tout au plus »
Spécialiste de l’Espagne, Jean Chalvidant a consacré de nombreux ouvrages à l’organisation séparatiste basque. Que se cache-t-il derrière cette journée historique ? Éléments de réponses.
Pourquoi un désarmement maintenant, six ans après le renoncement d’ETA à la lutte armée ?
L’opération a deux buts. Le premier consiste à ripoliner l’image désastreuse d’une organisation terroriste qui a tué 829 personnes, et par là même celle du séparatisme basque, jusqu’alors entachées de sang et de barbarie. Le second vise à faire bouger les lignes, car aucune initiative sur ce sujet ne vient du gouvernement madrilène.
Pourquoi Paris et Madrid se montrent circonspects sur l’initiative de samedi ?
Parce que sur la forme, l’opération de Bayonne est un show, une opération de relations publiques, menée sans concertation avec les deux États concernés, la France et l’Espagne. Et sur le fond, posséder autant d’arsenaux ne sert plus à rien. À quoi rime le fait d’avoir plusieurs tonnes d’explosifs si les hommes ne sont pas en quantité suffisante pour les utiliser ? Mais tout ce cirque ne signifie pas pour autant qu’ETA soit démilitarisée. Ses rares militants ont bien sûr gardé leur propre arme et du matériel explosif. Et sur un ordre, tout peut repartir demain.