On savait Le Parisien organe officiel du gouvernement mais là, ça dépasse tout. Vendredi 23 février 2018, c’est au tour de Marlène Schiappa, ministre des contre-feux sociétaux, de faire l’objet d’un portrait dithyrambique dans les pages du quotidien de Bernard Arnault, l’homme le plus riche de France, formé par le grand financier Antoine Bernheim. Mais n’allons pas trop loin et restons dans le sujet, plus léger.
« Femme de com et de réseaux, cette personnalité emblématique de la « génération Macron » a puisé dans son adolescence la force de son engagement. »
C’est alors qu’on apprend que le ministre (« secrétaire d’État » mais c’est plus long à écrire) a été agressé sexuellement. Voici les meilleurs – ou les pires, c’est selon – morceaux de cette interview pseudo-journalistique. Pour en savoir un peu plus sur Super Marlène...
« Son mari l’appelle “le bulldozer”, et l’on devine que ce caractère en acier trempé lui vient de loin. De son père corse d’abord, militant trotskiste et libertaire, chez qui elle a choisi de vivre à 13 ans, avec sa soeur, après le divorce de ses parents. “Il l’a poussée à avoir une pensée critique et argumentée”, témoigne Debora Kahn-Sriber, son éditrice chez Stock. Formée depuis l’enfance aux joutes oratoires, dont les éclats lui parvenaient le samedi soir dans sa chambre, elle se devait d’avoir un avis. Sur les grandes causes, surtout. Son père l’a emmenée tracter devant les hôpitaux pour la défense de l’IVG ou celle du métier de gynécologue, menacé de disparition. »
Voilà pour la « formation ». Maintenant, passons à l’engagement politique. En passant, on apprend que le papa de Marlène lui a appris à faire « un poing américain avec ses clés », et à se défendre du désir malsain des hommes. Soudain, la révélation... Là, on n’a pas le choix, on doit balancer tout le pâté. Attention, séquence émotion !
« On lui pose la question franchement : “Avez-vous été agressée sexuellement ?” Elle hésite. Puis lâche une petite bombe. “Ben oui, comme plein de femmes, j’ai eu droit à tout l’éventail.” Silence. Elle se reprend. “Ai-je été violée ? Je ne répondrai pas à cette question. Je n’ai pas envie de rentrer dans les détails. Je n’ai pas intérêt à raconter ce qui m’est arrivé à moi en particulier, au risque de déporter le sujet. Je ne veux pas que mon combat pour l’égalité entre les femmes et les hommes apparaisse comme un combat personnel.” Elle dit avoir entendu des femmes lui raconter “des choses bien plus terribles” que ce qui a pu lui arriver. Consent seulement à évoquer ce jour où elle marchait dans les couloirs du métro, en lisant un magazine. “D’un coup, je suis tirée par deux mecs qui m’emmènent à l’abri des regards. L’un d’eux me plaque contre le mur et l’autre essaie de me déshabiller. Dans ma tête, je me dis : ’Ça y est, je vais y passer.’ Je suis sidérée, mais je me souviens d’un conseil de mon père : ’Si on t’agresse, donne un coup de genou entre les jambes pour te libérer.’ Je mets le coup de genou, je me dégage et sors du métro. J’appelle, toute tremblante, un de mes meilleurs amis. Et là, il me répond : ’Mais pourquoi tu lis dans le métro ? Il faut être vigilante !’ Sur le moment, je m’en suis voulu, j’ai culpabilisé.” C’est ce qu’elle appelle “la culture du viol”, titre de son essai paru en février (La Culture du viol, Les Éditions de l’Aube). Les femmes, selon elle, ont tendance à “minimiser” ce qui leur arrive et à « trouver cela normal ». »
Écrire un livre sur « la culture du viol » quand on n’a pas été violée, c’est plutôt osé. Ensuite on a le droit à l’ascension vertigineuse de Marlène dans la société libérale libertaire : d’abord un boulot chez Euro-RSCG, lieu du séguélisme triomphant (le vieux pruneau à Rolex), mais elle démissionne et devient « journaliste au Bondy Blog », comme quoi il y a des passerelles, n’est-ce pas. Elle crée ensuite son blog féministe mais moderne et coécrit un livre sur la « laïcité » avec « Jérémie Peltier, le directeur des études à la Fondation Jean-Jaurès ». Là on nage en plein socialo-sionisme !
L’ironie de l’histoire, c’est sa fille aînée, âgée de 11 ans, qui est« hyper-girly, elle adore la mode, le maquillage et veut devenir styliste ». Une sacrée réussite en termes d’efficacité, le féminisme à la Schiappa. Nous dirons : le schiappisme. Depuis, pas une journée sans que la Marlène n’intervienne dans les débats politiques et sociétaux, en fourrant parfois son gros nez où il ne faut pas, comme lorsqu’elle s’en était pris à la défense du mari d’Alexia, la joggeuse assassinée. Une boulette qui montre que Marlène est vraiment passionnée par son job, au point de souvent franchir les limites de l’intelligence.
Coïncidence, le site de la Fondation Jean-Jaurès titre ce même 23 février 2018 sur « Viols et violences sexistes : un problème majeur de santé publique ». Ça alors, ça tombe vraiment bien pour Marlène et la sortie de son bouquin.
« Quatre millions de femmes déclarent avoir été victimes de viols au moins une fois dans leur vie. Alors que les révélations sur les violences sexuelles se multiplient ces derniers mois, le professeur Michel Debout et la Fondation Jean-Jaurès ont souhaité disposer d’une enquête pour mesurer l’ampleur de ces pratiques dans la société française et pour mesurer leurs effets sur la santé des victimes. »
Rien d’étonnant quand on sait que Marlène est une femme de réseaux... trotskistes. Cependant, cette appartenance n’est pas interdite. On remarque simplement qu’elle est un sacré accélérateur de carrière. À moins que la secrétaire d’État ne soit franchement brillante, ce qui n’est pas facilement prouvable [sexisme ! NDLR].
Et comme une bonne nouvelle réseautaire ne vient jamais seule, voici que deux députés (ou députées, au choix) LREM et UDI proposent le 22 février 2018 des mesures radicales « pour mieux évaluer, prévenir et punir les viols » ! Alors là, s’il ne s’agit pas de synergie concertée, c’est à n’y rien comprendre.
- Marie-Pierre Rixain (LREM) et Sophie Auconie (Agir, UDI et Indépendants)
Les deux femmes proposent une campagne nationale contre « la culture du viol » :
« Pour traiter le mal à la racine, les députées pointent un "continuum" des violences contre les femmes, qui va du harcèlement de rue aux violences conjugales, en passant par les discriminations. Il faut selon elles réduire la "tolérance sociale" face à cette "culture du viol", car les préjugés et les brimades constitueraient la première étape dans la spirale des violences sexuelles.
Elles recommandent de lancer "une campagne nationale de grande ampleur" contre ces violences, mais aussi de s’assurer que chaque élève reçoive des cours d’éducation à la sexualité. Les auteurs insistent pour que les sources d’information à la sexualité précisent les contours du consentement à une relation sexuelle. Une notion parfois floue pour les jeunes esprits, entretenue selon elles par la "culture porno" qui ne "véhicule pas des valeurs de respect et d’égalité entre les sexes".
Le duo en appelle sur ce sujet à la création d’une mission sur l’industrie pornographique et ses effets sur les jeunes populations et souhaite également la poursuite des réflexions pour mieux contrôler les publicités diffusant une "image dégradante des femmes". »
Alors là, hormis le sérieux du sujet, c’est le serpent qui se mord la queue : Schiappa est elle-même issue non pas de la culture du viol, mais de la culture publicitaire qui justement s’appuie sur la culture du viol... visuel ou mental, au choix. Et surtout sur la pornographie, qu’elle soit soft ou hard. Et là, on se demande si le Système est bien cohérent...
Malgré ce foutoir conceptuel, on ne peux qu’encourager les femmes courageuses à dénoncer les vrais violeurs et les vrais viols, et à bien faire la différence entre la drague, le harcèlement et la violence verbale que les femmes subissent, et c’est un fait. Car le mélange de tous ces niveaux langagiers ou factuels plombe une campagne qui sent déjà l’avancée progressiste tous azimuts. Si le Système était cohérent, il défoncerait l’industrie du porno. C’est à cette aune qu’on jugera de sa sincérité...
Car la pornocratisation des esprits est (à) la base de tout. Et qui en est à l’origine, politiquement ? On vous le donne en mille : les défenseurs de toutes les « libertés », les abatteurs de frontières, les partisans de l’abandon de l’autorité incarnée par le patriarcat, les concepteurs du féminisme, les rois de la subversion... les trotskistes ou libéraux libertaires ! Soit les amis de Marlène Schiappa.
Dérangeant, non ?