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IA : la France peut-elle survivre entre la Chine et les États-Unis ?

La France devient, le temps de quelques jours, le centre du monde de l’intelligence artificielle. Le Sommet pour l’action sur l’IA (AI Action Summit), autour duquel plusieurs événements ont été organisés dès jeudi, rassemble, lundi 10 février, le gratin de la diplomatie mondiale et les acteurs majeurs de cette technologie dont la popularité ne finit pas de grandir, portée par des applications comme ChatGPT, DeepSeek, Midjourney ou ElevenLabs.

 

 

Emmanuel Macron a déjà fait plusieurs annonces de taille, avec notamment plus de 109 milliards d’euros d’investissements privés à venir dans l’Hexagone pour financer des investissements dans le secteur. Mais la concurrence est rude : depuis la sortie de ChatGPT, les grandes puissances mondiales jouent des coudes et ne lésinent pas sur les milliards pour remporter la course et dominer ce secteur.

Dans ce contexte, Paris peut-il tenir la cadence ? Certains exemples récents, comme les moqueries qui ont visé l’IA tricolore Lucie, ne donnent pas une image flamboyante des capacités françaises. Pourtant, la France est loin d’être ridicule dans la compétition internationale : elle est le sixième, voire le cinquième pays le plus important au monde en matière d’IA en 2024, selon le classement choisi. Elle devance même des pays qui la dépassent en termes de PIB, comme l’Allemagne ou le Japon. Comment l’expliquer ?

 

Un départ anticipé

La France n’a pas attendu la sortie de ChatGPT pour se mettre en jambes. Dès 2018, la mission Villani débouchait sur une « stratégie nationale pour l’IA », dotée de 2,5 milliards d’euros sur plusieurs années, dans le cadre du plan France 2030. Objectif : structurer toute une filière, de la recherche à l’innovation en passant par l’application économique.

Le plus gros de cette enveloppe a été consacré à la recherche, avec 1,5 milliard d’euros entre 2018 et 2022. De quoi financer de nouveaux postes et programmes, mais aussi renforcer un outil essentiel : le supercalculateur public Jean Zay, qui peut être utilisé par des chercheurs (à certaines conditions) et leur évite ainsi de dépenser des sommes énormes auprès des Gafam pour le matériel dont ils ont besoin.

Puis « avec ChatGPT, il y a eu un coup d’accélérateur », résume auprès de franceinfo Pierre-Carl Langlais, co-fondateur de Pleias, une startup française qui entraîne des IA ouvertes. En 2022 est lancée la deuxième phase de cette stratégie, encore renforcée depuis avec une nouvelle enveloppe pour soutenir des pôles de formation d’excellence (les « IA Clusters »), pour la recherche, mais aussi pour diffuser ces créations dans le reste de l’économie.

Si l’État mise autant sur la recherche, c’est parce qu’il peut s’appuyer sur des têtes bien faites : la France possède certaines des meilleures formations au monde en matière d’IA. « On bénéficie de notre force historique en maths et de notre système élitiste des classes préparatoires », explique à franceinfo Gaël Varoquaux, chercheur à l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique et expert français le plus cité au monde dans les publications scientifiques portant sur l’IA. Un atout également salué par le patron d’OpenAI lui-même, Sam Altman, dans une tribune au Monde.

 

Des intelligences loin d’être artificielles

Ces écoles ont de quoi former les meilleurs spécialistes… qui essaiment souvent dans des laboratoires de recherche du monde entier, y compris chez les géants de la tech – comme Yann Le Cun chez Meta, ou Joëlle Barral chez Google DeepMind. Mais, comme pour contrebalancer cette « fuite des cerveaux », cette excellence a aussi attiré les poids lourds américains, avec l’ouverture de laboratoires de recherche dans l’Hexagone. « À l’époque, les grosses boîtes avaient des bureaux de vente en France, aujourd’hui ce sont des bureaux d’ingénierie ! », insiste Gaël Varoquaux.

Mais pour s’imposer, encore faut-il que cette excellence se traduise par la création d’entreprises compétitives. Cela tombe bien : « Il y a beaucoup de dispositifs d’aide pour créer des champions français de l’IA, et qui fonctionnent franchement très bien », résume pour franceinfo Marianne Tordeux Bitker, directrice des affaires publiques de France Digitale, l’un des principaux lobbies de la tech tricolore. Elle évoque pêle-mêle les mesures d’incitation fiscale, comme le crédit d’impôt recherche, le statut « jeune entreprise innovante » qui permet de bénéficier d’exonérations fiscales et sociales, les subventions publiques et appels à projets dans le cadre du plan France 2030...

Tout cela donne les ingrédients d’une réussite. « Avec un budget d’un milliard d’euros, on est passé en un an de presque rien en matière d’IA générative à leader européen, et troisième mondial derrière les Etats-Unis et la Chine », vante auprès de franceinfo Guillaume Avrin, coordonnateur national pour l’IA. Avec des réussites emblématiques comme Mistral, le « OpenAI français » dont les IA génératives rivalisent avec celle du géant américain tout en étant plus ouvertes ; mais aussi Dust, Photoroom, LightOn...

 

Trouver sa propre voie

Mais ces atouts peuvent-ils suffire à la France pour rattraper les États-Unis, maillot jaune incontestable ? Combler l’écart semble irréaliste. « Je pense qu’il n’est pas pertinent de vouloir créer un Google ou un Amazon français », estime Laurent Daudet, co-fondateur de l’entreprise française d’IA LightOn.

« Une entreprise américaine va lever dix fois plus de fonds d’un coup qu’une entreprise française semblable », souligne Gaël Varoquaux. Or, embaucher les meilleurs spécialistes, acheter le matériel informatique et rassembler les données nécessaires à l’entraînement de modèles d’IA toujours plus grands… Tout cela se chiffre en millions, voire en milliards – l’exemple le plus gigantesque étant le « projet Stargate » lancé par Donald Trump, et son coût annoncé d’au moins 500 milliards de dollars (environ 488 milliards d’euros).

 

 

L’espoir n’est pas pour autant interdit. « Il y a trois ans, bien malin qui aurait pu prédire qu’OpenAI allait chambouler les géants de la tech ! », rappelle pour franceinfo Patrick Pérez, directeur général de Kyutai, un laboratoire français de recherche en IA à but non lucratif. « On n’a pas encore d’entreprises de ce type-là en Europe, mais ça ne veut pas dire que ça n’arrivera jamais. »

« Ce qui est frappant avec l’IA moderne, c’est que des petites équipes très motivées et bien dotées peuvent faire des choses extraordinaires en peu de temps », appuie ce spécialiste, dont le laboratoire est à l’origine de l’IA Moshi, qui avait impressionné par ses capacités de synthèse vocale. Laurent Daudet abonde : « On peut créer des entreprises qui n’ont pas à rougir devant les géants américains, qui sont focalisées sur des cas d’usage précis. »

 

Le pari de l’« open source »

La France adopte justement cette technique : si elle ne peut espérer atteindre le sommet seule, elle a trouvé son créneau. Pour se différencier du gigantisme américain comme des approches catastrophistes, Paris défend une conception équilibrée de l’IA, qui se dit consciente des risques comme des opportunités, et qui va piocher dans les valeurs des Lumières pour défendre une IA ouverte à tous et économe en ressources.

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