Le 30 mars dernier, des heurts ont éclaté à la frontière entre Gaza et Israël entre manifestants palestiniens et soldats israéliens. Le bilan est de 16 morts parmi les civils palestiniens qui n’utilisaient pas d’armes à feu. Nous avons rencontré Gilad Atzmon ce 31 mars à Prague en République tchèque, où il donnait un concert de jazz, et lui avons demandé de faire un commentaire sur ces récents événements.
(Vidéo en anglais non sous-titrée)
Gilad Atzmon, nous nous trouvons à Prague, pouvez-vous nous dire quelque chose à propos des protestations meurtrières à la frontière de Gaza ?
Cela fait partie d’une évolution très intéressante, j’écris à ce propos depuis un moment déjà. Il est évident qu’Israël est face à quelque chose qu’il n’arrive pas à gérer. C’est quelque chose dont je parle depuis plusieurs années et que j’ai appris quand j’étais Israélien. Notre élite militaire a toujours mentionné le fait que les Israéliens savaient mener des guerres (peut-être que ce n’est plus le cas désormais mais à l’époque ils le pensaient) avec des tanks, l’aviation, l’infanterie, mais qu’il y avait une chose avec laquelle ils étaient incapables de faire face : si les Palestiniens décidaient un jour de se relever et de marcher en direction de Jérusalem, alors les Israéliens n’ont aucune réponse militaire à leur disposition. Comme nous avons pu le voir, ils ont mis en place au moins une centaine de snipers (certains parlent même de plusieurs centaines) face à des civils. J’ai lu aujourd’hui dans Haaretz, dans un article écrit par un éminent journaliste, que le pire cauchemar d’Israël était en train de se réaliser.
Ce qui est fascinant pour moi, c’est qu’après tant d’années de paralysie les Palestiniens prennent une fois de plus leur destin en main. La « solidarité juive », qui dominait le discours de la « solidarité palestinienne » depuis au moins vingt ans, avait une mission bien précise, celle de démanteler ou de dévier la notion de « droit au retour ». Ils ont inventé toutes sortes de termes problématiques comme « la fin de l’occupation », qui n’était en fait qu’une manière de légitimer le droit à l’existence d’Israël, ou « Apartheid ». Israël possède assurément des symptômes de l’Apartheid mais il est bien pire que celui-ci. L’Apartheid est un système raciste d’exploitation, tandis qu’Israël pratique le nettoyage ethnique. Ils ont introduit tous ces termes dans le but de donner l’impression trompeuse selon laquelle nous avions affaire à une forme ordinaire de régime colonial.
Or, nous avons bien affaire à un État et à un système politique très particuliers. Israël est raciste, expansionniste, nationaliste et pratique la purification ethnique. Il n’y a pas beaucoup d’États dans le monde qui opèrent de la sorte, en fait c’est même le seul. Pour la première fois, nous voyons que les Palestiniens décident d’avancer et de prendre leur destin en main. Je souhaiterais que les Israéliens soient assez intelligents pour comprendre qu’ils vivent sur la terre de quelqu’un d’autre. Ils devraient inviter les Palestiniens à retourner sur leur terre et de faire d’Israël « l’État de ses citoyens ». Je suis parfaitement conscient du fait qu’il y a désormais plus de Palestiniens que de juifs qui vivent entre les bords du Jourdain et la Mer Méditerranée. Cet « État de ses citoyens » est destiné à devenir la Palestine. Très bientôt Inch’Allah.