Un ministre de la Justice dont le parti est visé par une enquête sur un soupçon d’emplois fictifs (une dizaine d’assistants parlementaires d’eurodéputés MoDem auraient travaillé uniquement pour le parti)... C’est la France.
De plus, François Bayrou est en charge de son grand dossier qu’il essaye de placer à droite ou à gauche depuis des années : la moralisation de la vie publique. Voici ce qu’écrit le site Contrepoints sur le sujet :
Pourtant, on nous avait très officiellement assuré que le retard pris dans la publication du nouveau Gouvernement Philippe tenait exclusivement au luxe de précautions réunies pour s’assurer que la désignation de chacun des ministres serait absolument inattaquable, mais on s’était bien entendu soigneusement gardé à l’époque de nous rappeler la mise en examen préalable de Monsieur Bayrou. Il est vrai que ce dernier tenait personnellement à brandir dans le nouveau gouvernement l’étendard de la moralisation et que le lui arracher brutalement des mains aurait pu conduire à une crise politique grave avec des conséquences électorales probablement dommageables.
On a bien conscience que tout le monde ne peut pas être parfait dans la vie politique, car elle est synonyme de coups bas, de rapports de forces, de trahisons permanentes. Il suffit d’un employé qui balance pour que les juges se jettent sur l’os qu’incarne le leader politique de la formation concernée.
Pourtant, toutes ces affaires sont connues. Et elles sortent opportunément, quand quelqu’un ou un parti a intérêt à abattre une personnalité ou un mouvement. Mais ne fantasmons pas trop sur l’efficacité de la justice à la française : la plupart du temps, les puissants y échappent...
Dans l’affaire présente, Bayrou a contacté directement ceux qui enquêtaient sur le MoDem. Les journalistes ont crié à la « pression » politique, le politique quant à lui a étudié la possibilité d’une qualification de « harcèlement ». Un partout balle au centre...
Cela ressemble à une forme de pression sur notre rédaction : le ministre de la Justice a personnellement contacté notre cellule investigations, en pleine enquête sur son parti.
Tout s’est passé mercredi [7 juin 2017] après-midi, quelques heures avant la diffusion par France Inter de révélations sur des soupçons d’emplois fictifs d’assistants parlementaires européens au MoDem, le parti mené par François Bayrou, devenu garde des Sceaux depuis.
Jacques Monin, directeur de la cellule investigations de Radio France, reçoit un coup de téléphone du ministre lui-même :
« Il s’est plaint auprès de moi en expliquant que des journalistes de la direction de l’investigation auraient des méthodes inquisitrices, qu’ils jetteraient le soupçon sur des salariés du MoDem en les interrogeant de manière abusive. Il explique qu’il voit passer dans son bureau des salariés qui pleurent, et qu’il se doit de les protéger... »
[...]
Une pression à peine déguisée ? Le ministre de la Justice balaie l’accusation : « Ce n’est pas une menace, ni de l’intimidation », explique-t-il à nos confrères de Mediapart. « J’ai seulement dit que je trouvais cela choquant. Ce n’est pas le ministre de la Justice ni le président du MoDem qui a appelé, c’est le citoyen. »