« La vie ? Un rien l’amène, un rien l’anime, un rien la mine, un rien l’emmène. » (Raymond Queneau, Zazie dans le métro)
Les jeunes vont exterminer les vieux ! C’est le résumé de la semaine de coronapanique qui a gagné la France en cette mi-mars 2020. Les jeunes vont survivre, les vieux disparaître, voilà, c’est une semi-extinction de masse. Reste à espérer que les jeunes vont prendre le relais, sur E&R. Mais il y a de l’espoir : les jeunes ne votent pas néolibéral à fond la caisse, ils sont nationalistes à 50 % au moins, ils n’aiment pas les banquiers, ils ne sont pas encore très pointus en politique mais ils ont compris que Macron n’était pas leur ami, au fond. Et c’est là l’essentiel. En attendant de disparaître de cette vallée de larmes (le gros barrage de larmes a cédé) qu’est devenue la France, permettez-nous de faire une peut-être dernière chronique dominicale.
Par quoi commencer ? Le confinement ? En Espagne comme en France, les citoyens s’organisent :
#coronavirus Astuce 1 :
Éviter au maximum les contacts prolongés à moins d’un mètre.
Voici l’équipement adéquat. pic.twitter.com/nBmVQbT1Xr— TheFishEye (@PetrovskyBL) March 15, 2020
Il faut respecter un rayon de sécurité d'1 mètre autour de soi #Covid_19 #coronavirus pic.twitter.com/MIQl6Kbd05
— Mbodou Moustapha Adji (@Mbodouliwa) March 13, 2020
Peut-on se marrer quand la population flippe et que des gens sont malades, et d’autres meurent ? Oui, car c’est le lot de la vie en communauté. Sauf qu’aujourd’hui le Système nous met sous les yeux un compteur de morts. C’est bien, ça rend optimiste, on attend son tour, ça participe au moral de la nation. Si on mettait un compteur pour tous les morts de toutes les pathologies possibles, on en aurait 1660 par jour, soit 606 000 (le nombre de décès en 2018) divisés par 365 (le nombre de jours dans une année, pour ceux qui savaient pas).
De l’autre côté, celui de la vie, on a 720 000 naissances par an. On gagne donc 100 000 Français chaque année, et on ne compte pas les 400 000 immigrés selon Zemmour, ou 200 000 selon Weil (merde, Samuel, on met un « l » ou deux ?), qui se chicorent sur les nouveaux entrants – les remplaceurs – en permanence, ce qui ne change rien à notre pays puisque la baston entre socialo-sionistes et nationaux-sionistes ne profite aucunement aux Français. Quel que soit le gagnant, il sera sioniste. Alors...
En parlant de virus, le coronavirus, on l’a vu, a replacé l’hôpital au centre. Les infirmières ont fait grève (on n’oublie pas les infirmiers), les aide-soignants en chient, les médecins ont le couteau néolibéral sous la gorge, et il a fallu attendre un petit microbe chinois pour que notre président bien-aimé prenne la mesure du problème.
En 2016, lorsqu’il était en campagne, c’était plutôt :
« je n’aime pas ce terme de modèle social »
« suppression de 120000 postes de fonctionnaires »
« baisse de 60 Mrds sur la dépense publique dont 15 sur la santé ».Et c’était pour beaucoup « le candidat pragmatique ». Bravo. https://t.co/W5WljcXfDZ
— Thomas Porcher (@PorcherThomas) March 14, 2020
Maintenant, la France est à l’arrêt, et ça devrait faire plaisir aux écolos qui prônent la décroissance, l’arrêt des productions débiles (on ne parle pas des besoins fondamentaux), et aussi aux anarchistes, qui voient le bordel se profiler. On ajoute les racailles, puisque les tribunaux vont fermer. On dit ça, on dit rien... Pendant la quarantaine qui se profile, qui durera probablement un peu plus longtemps, ça va être la java dans les rues. Le milieu de la mode montre le chemin :
La génance... pic.twitter.com/1kzULzL1LW
— Rêv de Presse (@Rev_de_Presse) March 14, 2020
On a beau pester contre les nantis, se foutre de la Mort, ça a quand même une certaine classe. Tout le monde n’a pas envie de vivre en chiant dans son froc du matin au soir, avec un sac à dos plein de couches-culottes. Il y a des choses à prendre chez ces insouciants, qui ont l’habitude de maîtriser les situations spéciales, et ça, ça vient tout droit de leur sang royal, ou seigneurial, celui qui faisait la guerre : « s’en fout la mort », comme dirait Isaac de bankolé.
Résumé du résumé de Wikipédia, le site bien-pensant qui fait sauter un à un les Wiki des écrivains de Kontre Kulture :
« Claire Denis souhaite faire une œuvre sur le rapport de l’homme noir (qu’il soit Antillais ou Africain) au Blanc, l’ancien colonisateur, ainsi que sur le thème de la mort et du parcours de deuil... »
Eh ben ça tombe bien ! On ne parle jamais assez de la mort. On ne l’accepte pas parce qu’elle est injuste, mais vous croyez que la vie est juste quand on naît dans une famille de merde, par exemple, avec un père alcoolique ou violent, incestueux ou crétin, une mère abusive ou débile, des frères voleurs et des sœurs qui se prostituent ?
Quand on est pauvre, la mort est beaucoup plus présente, parce que la souffrance, qui est proche des pauvres sur leur gauche (côté vie), est aussi proche de la mort sur leur droite. On meurt moins facilement chez les riches, même si on meurt aussi. On vit mieux selon les critères de l’OCDE, c’est-à-dire qu’on souffre moins matériellement. Spirituellement, c’est un autre débat. La pandémie est là pour nous mettre tous dans le même sac, avec Dieu qui, tel un Père Noël, nous éparpille les uns dans les cheminées, les autres dans la nature. La mort, la vie, à droite, à gauche, ça a toujours été comme ça et ça changera pas jusqu’à la fin des temps.
« Qui n’est pas capable d’être pauvre, n’est pas capable d’être libre » (Victor Hugo)
Le confinement, la peur généralisée, la peste de Camus, c’est le moment de faire une petite retraite spirituelle, avec des bouquins KK bien sûr. Quand les choses vont mal, on les prend avec philosophie. Pleurnicher n’a jamais servi à rien, enfin, ça dépend des communautés. Pour ceux qui vivent dans l’adversité, le coronavirus est une merde de plus sur un tas de merde. Les SDF s’en foutent, les suicidaires s’en foutent, les dépressifs lourds y trouvent une bonne raison de voir les choses en noir, les anarchistes sont contents, les nihilistes jubilent, et le pouvoir profond se frotte les mains : rien de tel qu’un bordel généralisé pour reprendre la main sur un peuple qui commençait un peu trop à rechigner, à discuter les ordres.
L’analogie élite/peuple avec maître/chien ne tient plus parce que la laisse a été quelque peu rongée. Certes, il en reste, mais le fil est ténu. Les ordres passent de moins en moins de haut en bas : là, pour les coronavirussés, on veut bien faire un effort, mais on fait pas ça pour les destructeurs du service public, la paire Macron-Philippe. Qu’ils ne se méprennent pas : une fois la pandémie vaincue (sinon on crève tous il n’y aura plus de problème) on se retrouvera face à face. Le combat entre la liberté et le libéralisme n’est pas terminé, on fait juste une pause, comme le match de foot entre ennemis sur le front à la Noël 1914 :
Cette pandémie arrive à un moment où la société française est éclatée ; c’est l’occasion historique de resserrer les liens (horizontaux) et de ressouder les communautés, qui retrouvent une menace et donc un destin commun (sauf si le virus ne touche que les antisionistes, auquel cas on revoit notre phrase humaniste). Laborit disait que seule la pression de la nécessité, face à un danger commun, pouvait donner à l’homme le sens de l’humanité, c’est-à-dire qu’il se sente appartenir à quelque chose de plus grand que lui – un niveau d’organisation supérieur – pour que ses congénères arrêtent de se faire la guerre interindividuelle, intergroupes ou internations.
On n’en est pas encore là, mais la menace fantôme du coronavirus, ça peut être la soucoupe volante géante qui obscurcit le ciel, et qui crée le besoin de ciel...
Et comme dirait Céline, il reste la danse !
« Il faudrait rapprendre à danser. La France est demeurée heureuse jusqu’au rigodon. On dansera jamais en usine, on chantera plus jamais non plus. Si on chante plus on trépasse, on cesse de faire des enfants, on s’enferme au cinéma pour oublier qu’on existe, on se met en caveau d’illusions, tout noir, qu’est déjà de la mort, avec ses fantômes plein l’écran, on est déjà bien sages, crounis, ratatinés dans les fauteuils, on achète son petit permis avant de pénétrer, son permis de renoncer à tout, à la porte, décédés sournois, de s’avachir en fosse commune, capitonnée, féérique, moite. »