Distribution de tracts, réunions militantes, réflexions thématiques, coups de main dans les meetings... Jusqu’au 29 novembre, date de la défaite d’Alain Juppé à la primaire de la droite, ils faisaient campagne pour le « bonze de Bordeaux ». « Ils », ce sont Christophe, Stéphanie ou Xavier, devenus depuis des « helpers », comme on dit rue de l’Abbé Groult, l’adresse du QG parisien d’Emmanuel Macron.
Comme d’autres juppéistes, ils ont préféré se mettre en « En Marche » plutôt que de suivre François Fillon. Car si les candidats à la primaire de la droite se sont personnellement engagés à soutenir le vainqueur, les plus fervents supporters de chaque candidat sont restés libres de leur choix. Tous n’ont pas franchi le Rubicon. Mais ils sont nombreux à scruter avec attention ce qui se trame du côté de l’ancien ministre de l’Économie. Et les rebondissements de l’affaire du « Penelope Gate » pourraient encore accélérer le mouvement chez ces jeunes militants, déjà rétifs aux orientations très droitières promises par le député de Paris.
Déçu par la primaire de la droite
Il n’est pas difficile de comprendre la bascule de certains sympathisants PS d’orientation sociale libérale. Après tout, Emmanuel Macron était un « bébé Hollande ». Il affirme avoir le cœur à gauche et compte dans son état-major plusieurs parlementaires socialistes. Mais pour des militants venant de la droite (ou du centre droit), c’est une succession de désillusions qui ont incité certains à rejoindre En Marche. Pour beaucoup, le sacre de François Fillon à la primaire de la droite a servi de catalyseur.
« Je ne me voyais pas faire campagne pour Fillon. J’ai passé des semaines à critiquer son programme sur les réseaux sociaux », raconte Christophe, la petite quarantaine, professeur d’anglais en région parisienne. S’il a suivi le cursus honorum du parfait militant LR, le voilà désormais aux côtés d’Emmanuel Macron.
« J’ai adhéré à l’UMP en 2004, j’y suis resté jusqu’en 2015. J’ai fait campagne pour Nicolas Sarkozy en 2007, et j’y croyais vraiment. Après j’ai fait la campagne pour Thierry Mariani, même si c’est vrai que j’aurais préféré un candidat un peu plus centriste », se remémore cet enseignant, aujourd’hui responsable du comité local « Goncourt-Parmentier » pour En Marche.
Originaire du Vaucluse, il a longtemps milité dans la roue de Marie-Josée Roig, ex-maire d’Avignon. Quand « le bonze de Bordeaux » lance sa campagne, il va proposer ses services et sera nommé au comité du 11e arrondissement de Paris. Un choix « naturel », compte tenu de ses « valeurs et son profil » qui rassurent celui qui a été « vraiment déçu du quinquennat de Sarkozy et les “casse toi pov’ con” ».
Entre les deux tours, sentant la défaite poindre pour Alain Juppé, il achète – et lit – Révolution, le livre d’Emmanuel Macron. Il est séduit et adhère à En Marche ! dès le lendemain du second tour de la primaire de la droite. Pourquoi ce choix ? Sur le plan politique, « Alain Juppé a plus de points communs avec Emmanuel Macron qu’avec François Fillon », poursuit-il, citant la « modernité » comme qualité partagée.
Enfin, il trouve un candidat qui incarne une forme de libéralisme soft, dépourvu des crispations identitaires et des conservatismes sociétaux qui persistent chez Les Républicains. Une fois « En Marche », Christophe apporte ses idées en matière d’éducation, thème sur lequel il travaille et qu’il avait déjà creusé du temps de son passage chez Juppé. Dans ses valises surtout, une solide expérience militante plutôt bienvenue dans ce tout jeune mouvement.
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« Valeurs communes »
À l’inverse des deux profils précédents, Stéphanie, 28 ans, n’a jamais été encartée. Mais elle s’est quand même mobilisée lors de la primaire de la droite. Sympathisante de droite, elle avait misé sur Alain Juppé « qui incarnait la confiance » alors que François Fillon représente selon elle « l’incertitude ». « Et puis je trouve qu’’il lui manque un petit côté humain », s’amuse-t-elle.