Ça paraît fou. Mais ça doit le paraître encore plus aux Britanniques, auteurs, en leur volonté et liberté, du choix de quitter l’Union européenne en juin 2016. Le milliardaire américain, grand PDG de Goldman Sachs, à savoir Lloyd Blankfein, s’est permis sur Twitter d’évoquer l’idée d’« un vote de confirmation » – la jolie litote. On se plaît à penser au référendum à la Sarkozy sur l’Union européenne, en 2005 : le traité de Lisbonne a réparé la bévue populaire. Lloyd Blankfein semble, lui aussi, vouloir réparer la folie d’un peuple.
Un peuple qui n’est pas le sien. Et pour des intérêts qui sonnent et qui trébuchent.
Un « vote de confirmation » : un nouveau referendum
« Ici au Royaume-Uni, de nombreux patrons se lamentent sur le Brexit. (…) On hésite à le dire mais beaucoup souhaitent un vote de confirmation sur une décision si importante et irréversible. Avec de tels enjeux, pourquoi ne pas être sûr que le consensus est encore présent ? », écrit avec un culot fou, Lloyd Blankfein, le PDG de Goldman Sachs, sur son compte Twitter. Êtes-vous si sûrs d’être certains ?!
Des commentaires qui ont déclenché une réaction instantanée. « Je ne suis pas au courant que M. Blankfein soit un électeur britannique. Il est déconseillé de donner des leçons à d’autres pays sur leurs systèmes démocratiques, surtout lorsque vos motifs sont suspects » a déclaré le député très conservateur Jacob Rees-Mogg. Les intérêts de Blankfein passeront évidemment avant tout autre.
L’ancien vendeur d’or, né dans le Bronx, avait reconnu récemment l’emprise « géniale » de Trump sur Twitter, cet outil de communication qui court-circuite les media et atteint son public. Il a déclaré qu’il voyait, aussi, ça comme « un moyen de pression » sans avoir à subir l’indignité de la transmission médiatique...
Sus au Brexit façon Lloyd Blankfein
Ce n’est pas la première fois que Lloyd Blankfein tance la décision des électeurs du pays de la City. Figure-clé dans l’opération de lobbying féroce pour le « Remain » menée par les banquiers internationaux voulant préserver leurs acquis, actuels et futurs, il a déjà émis des avertissements volontairement sombres sur la pérennité de sa présence sur le sol anglais.
Jusqu’à maintenant, les sociétés financières internationales bénéficiaient des règles de l’Union européenne qui leur permettaient de baser leur siège social à Londres, en vendant des services à travers le continent. Cet arrangement financier et administratif leur faisait gagner des milliards de livres : il doit certainement être douloureux de les laisser s’échapper...
De la fausseté des délocalisations promises...
Alors Lloyd Blankfein continue sa petite campagne sur Twitter... Fin octobre, il y envoyait une photo du siège européen de Goldman Sachs en construction dans le centre de Londres (un bâtiment immense qui sera inauguré en 2009), avec cette remarque : « En espérant le remplir, mais ce n’est pas sous notre contrôle ». Quelques jours plus tôt, il tweetait : « Je viens juste de quitter Francfort, de belles réunions, un beau temps, ça m’a vraiment plu, parce que je vais passer beaucoup plus de temps là-bas »...
Mais toutes ces menaces ne sont encore guère crédibles. Comme le souligne le Daily Mail, beaucoup de banques avaient annoncé nombre de déplacements de postes, peu les mettent à exécution.
HSBC avait parlé de déplacer 1 000 emplois à Paris, mais les responsables freinent aujourd’hui des quatre fers. Le prêteur de Wall Street, JP Morgan, a renoncé à ses menaces de licencier 4 000 de ses 16 000 employés britanniques. Le prêteur allemand Deutsche Bank avait dit qu’il supprimerait 4 000 emplois à Londres, mais ses proches ont fortement minimisé cette menace : preuve en est qu’il vient de signer pour un nouveau siège social à Londres de 43 500 m². Et le financier suisse UBS assure que les délocalisations à cette échelle semblent « de plus en plus improbables » selon son patron.
Goldman Sachs, quant à elle, envisage de multiplier par quatre le nombre de ses 200 employés à Francfort. Seulement quelques centaines de personnes au maximum sur ses 6 000 employés londoniens seront transférés à Francfort et Paris.
Le Dieu de Goldman Sachs
Faire peur... on essaie toujours de faire peur à ceux qui choisissent ce qu’il ne faut pas. Surtout quand on est à la tête d’une des plus puissances forces financières mondiales – Goldman Sachs a fait 7 milliards de dollars de profits l’année dernière. Qu’elle ait généré la crise des subprimes en 2008 par une spéculation frauduleuse n’a plus guère d’importance, elle sait ce qui est le mieux pour ses propres outils financiers...
...et pour le monde sûrement, le culot de Blankfein en atteste ! Souvenez-vous des mots qu’il avait prononcés pour le Sunday Times, il y a un an : « Je ne suis qu’un banquier faisant un travail de Dieu ! » – on peut se demander duquel Dieu s’il s’agit.
Il profite aussi d’une situation qui se complique pour la Grande-Bretagne, engluée dans un Brexit dont elle ne voit pas le bout, montrée du doigt par une UE avide de lui faire payer ce qu’elle veut, et dans laquelle des politiques tels que Lord Kerr, commencent à dire que « les intentions peuvent changer »...