Jusqu’à quand les habitants de Guadeloupe et de Martinique seront-ils exposés au chlordécone ? Quelles sont les conséquences sanitaires d’une telle exposition sur le long terme ? 25 ans après l’interdiction de ce pesticide longtemps utilisé dans les bananeraies antillaises, ces questions restent aujourd’hui en suspens. Toutefois, un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) tout juste publié apporte de nouveaux éléments. Selon ces données, une part non négligeable de la population antillaise serait encore surexposée au chlordécone, en particulier les enfants.
« Globalement, il n’y a rien de nouveau sous le soleil, souligne Luc Multigner, chercheur en épidémiologie à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Le chlordécone étant une molécule très peu volatile, on savait déjà que la population est contaminée par la consommation d’aliments ».
Œufs, légumes, volailles, poissons, crustacés... Tous les produits cultivés dans les jardins potagers ou achetés à la marge des circuits réglementés sont susceptibles de contenir des taux de chlordécone supérieurs aux normes établies. Dans les zones contaminées de Guadeloupe, jusqu’à 19% des enfants seraient surexposés, selon l’étude de l’Anses.
Une persistance pendant plusieurs siècles
Le problème, c’est que le chlordécone est un pesticide coriace qui n’est pas près de disparaître. Pulvérisé massivement sur les bananiers à partir des années 1970 pour lutter contre le charançon, il persiste dans le sol longtemps. Très longtemps. En 2005, des chercheurs de l’Institut national de la recherche agronomique ont même estimé qu’« il faudra plusieurs siècles pour que le lent lessivage des terres par les eaux de drainage vienne à bout de la pollution au chlordécone ».
Logiquement, celui-ci se retrouve aujourd’hui dans les aliments d’origine végétale ou animale cultivés dans les zones contaminées. En revanche, les eaux du robinet ou en bouteille, sont suffisamment traitées pour en être dépourvues.
Véritable problème environnemental, le chlordécone pourrait surtout être à l’origine d’un désastre sanitaire. Plusieurs études ont ainsi montré que ce pesticide augmenterait le risque de naissance prématurée, mais aussi de développer un cancer de la prostate. Le chlordécone serait également suspecté d’entraîner des déficits cognitifs chez les nourrissons. « Le problème du chlordécone aux Antilles est tout à fait unique au monde, s’exclame Luc Multigner. C’est un véritable Tchernobyl chimique ! ».
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