Emmanuel Macron nous a gratifié de sa neuvième intervention ce mardi soir. Les meilleures séries étant souvent les plus courtes, celle-ci commence à nous fatiguer sévèrement. Mais quel que soit notre désintérêt pour son discours, nous sommes bien forcés d’y prêter attention en ce qu’il nous concerne souvent de manière directe : confinement, couvre-feu, vaccination obligatoire, pass sanitaire, etc.
Notre cher président a donc pris la parole pour annoncer les dernières mesures pour « lutter » contre le covid (pour les derniers naïfs), pousser les gens à se vacciner, les forcer à la 3e dose pour les plus âgés. Il a aussi évoqué la fin de son mandat et a préféré oublier la réforme des retraites, sujet probablement peu vendeur pour une prochaine élection qui approche à grands pas. On était pas loin d’un discours de campagne mêlant autosatisfecit et allusion à ses deux meilleurs ennemis possibles de second tour : Marine Le Pen et Éric Zemmour.
Pass sanitaire
Pour valider leur pass sanitaire, les plus de 65 ans devront s’injecter une petite troisième dose. Vu l’entrain qu’ils ont eu pour beaucoup à aller se faire double vacciner comme un seul homme, gageons qu’ils iront encore à l’abattoir sans sourciller. Encore que, ne dit-on pas qu’on peut tromper 1 000 fois un homme ou une fois 1 000 hommes, mais pas 1 000 fois 1 000 hommes. Voire.
Face donc à la reprise épidémique (on ne rit pas), le bond de 40 % du taux d’incidence et une augmentation du nombre d’hospitalisations, les plus de 65 ans sont invités à prendre un rendez-vous pour cette dose de rappel « le plus rapidement possible ». Seules 3,4 millions des 7,7 millions de personnes éligibles à ce rappel ont été revaccinées à ce stade. Une petite réticence ?
« Si vous avez été vaccinés depuis plus de six mois, je vous demande d’aller prendre rendez-vous. À partir du 15 décembre, il faudra justifier d’un rappel pour prolonger la validité de votre pass sanitaire ».
Vaccination
La campagne de rappel (ou la chasse ?) est ouverte pour les plus de 50 ans en décembre. « Une campagne de rappel sera lancée à partir du début du mois de décembre pour nos compatriotes âgés de 50 à 64 ans ».
Notre apprenti dictateur a fait appel à « l’esprit de responsabilité » des six millions (six millions !) de Français qui n’ont encore reçu aucune dose de vaccin pour participer à « l’effort collectif ».
« Vaccinez-vous ! », a-t-il répété. « Avec le vaccin, il y a 11 fois moins de chances de contracter une forme grave de la maladie ». Ah ? Et combien de fois plus de tomber malade du Covid-19, d’un effet secondaire grave ou de mourir, lorsqu’on a moins de 65 ans et que la mortalité de la maladie est proche de zéro ?
Macron nous l’affirme : « 83% des personnes en réanimation ont plus de 50 ans ». C’est pas faux, mais ils peuvent avoir tous plus de 80 ans, donc.
Lancé dans une autocélébration de sa politique, Macron poursuit : « depuis la première vaccination en décembre 2020, nous avons injecté en dix mois plus de 100 millions de doses. 51 millions d’entre vous sont entièrement vaccinés. Grâce au pass sanitaire, nous sommes parvenus à maîtriser l’épidémie ». Bah voyons, comme dirait l’autre. De toute manière, on est prévenu : « il faudra vivre avec les variants jusqu’à ce que la population mondiale soit immunisée ».
Contrôles renforcés et maintien du masque à l’école
« Tous les assouplissements un moment envisagés sont reportés à une date ultérieure pour conserver les règles en vigueur (...) même si je sais combien c’est difficile (...) le port du masque à l’école sera maintenu et les gestes barrières feront l’objet d’une attention accrue ».
« Nous avions tous relâché nos efforts, c’est bien normal, mais il faut les reprendre ». Ne jamais trop relâcher la bride, le peuple se vautre dans la liberté avec trop d’aisance. Il faut toujours rappeler les populations à l’ordre, dans l’« en même temps » du bon flic et du mauvais flic.
D’ailleurs « le contrôle pour l’application du pass sera renforcée partout ». L’asservissement rend libre, la preuve : « c’est grâce a la vaccination, au pass, aux gestes barrières que nous pourrons continuer de vivre et ne pas refermer les activités », poursuit-il.
Puis, alors que la population un peu avertie et pas moutonnière (comme nos lecteurs) a déjà acheté au marché noir son hydroxychloroquine ou son ivermectine, Emmanuel Macron nous annonce l’arrivée « de premiers traitements efficaces contre les formes graves » dès le début de l’année 2022. Remplacer « efficaces » par « rentables » et « autorisés ».
L’hôpital et les soignants
Pas d’annonce pour les soignants, qui ont déjà beaucoup trop reçu à l’en croire : « nos soignants ont été augmentés de 200 à 400 euros par mois en moyenne », et « 500 établissements hospitaliers vont être restaurés », tandis que « des milliers de maisons de retraite vont être rénovées dans un effort inédit de 19 milliards d’euros » et que « jamais, depuis la création de la Sécurité sociale, nous n’avions autant investi dans la santé (...) après des décennies d’abandon ». Alors là, les bras nous en tombent. Nous n’avons pas les mêmes sources.
Les chômeurs sommés d’arrêter de chômer
Il ne faut pas « viser 7 % de chômage, mais bien le plein-emploi » s’est mis à rêver Emmanuel Macron, s’étonnant que trois millions de personnes se trouvent encore au chômage, et que des secteurs comme la restauration peinent à recruter, alors que le « taux de chômage est au plus bas depuis plus de 15 ans ». Au 1er décembre, les chômeurs vont voir les règles d’indemnisation changer : « Une nouvelle étape va s’engager. Il faudra travailler au moins six mois dans les deux dernières années pour être indemnisé [contre quatre actuellement] (...) Les demandeurs d’emploi qui ne démontreront pas une recherche active d’emploi verront leurs allocations suspendues ».
Réformes des retraites
Les élections 2022 approchent à grands pas, et le dossier empoisonné des retraites ne mérite pas de prendre des risques pour l’actuel locataire du palais de l’Élysée. Face à la dégradation de la situation sanitaire et à l’opposition des partenaires sociaux, Emmanuel Macron a estimé que « le besoin de concorde en ce moment que vit notre nation font que les conditions ne sont pas réunies pour relancer aujourd’hui ce chantier ». Ouf, il a eu chaud. Les retraités aussi – pour le moment.
Même si, cependant, « dès 2022 il faudra, pour préserver les pensions de nos retraités et la solidarité entre nos générations, prendre des décisions claires (...) Travailler plus longtemps en repoussant l’âge légal, aller vers un système plus juste en supprimant les régimes spéciaux, en harmonisant les règles entre public et privé et en faisant en sorte qu’au terme d’une carrière complète, aucune pension ne puisse être inférieure à 1 000 euros ». Nos paysans sont ravis de l’apprendre.
Nucléaire
Évitant l’oxymorique posture du « moins de CO2 mais moins de nucléaire », Emmanuel Macron a annoncé sa volonté de « relancer la construction de réacteurs nucléaires (...) Pour garantir l’indépendance énergétique de la France [...] nous allons pour la première fois depuis des décennies relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays ». Un moyen de « garantir l’indépendance énergétique de la France et d’atteindre en 2050 la neutralité carbone » afin « d’être à la hauteur de nos engagements au moment de la COP26 ».
Conclusion théâtrale
Entre onanisme politique sur les résultats de son gouvernement et pré-campagne électorale, Emmanuel Macron a conclu avec une tirade peu crédible et sonnant aussi faux que son personnage.
« Nous avons affronté une conjonction inédite de crises : la pandémie, le terrorisme, le désordre géopolitique. Durant tous ces mois, nous sommes restés soudés, fidèles à ce que nous sommes, profondément humains. Je sens bien les doutes, l’incertitude, parfois la fatigue, la colère quand je viens à votre rencontre. »
« La période est difficile pour beaucoup d’entre vous, mais regardez ce que nous avons réussi en agissant ensemble, unis. Nous avons réussi l’impensable. Je vous le dis avec beaucoup de conviction, n’ayons pas peur, croyons en nous, croyons en la France. »
« Forte de son esprit de résistance à la dilution dans un monde qui va à la soumission, aux dogmes, aux obscurantismes, au retour du nationalisme, forte de sa volonté d’embrasser l’avenir et de continuer d’assumer sa part d’universel, croyons en nous, nous le méritons. Croyons en nous, nous le méritons, vive la République et vive la France. »