À 81 ans, Abdelaziz Bouteflika a annoncé le 10 février qu’il se présenterait de nouveau à la présidentielle algérienne, qui se déroulera mi avril.
« Pouvoir assassin », « Système dégage », « Seul le mandat du peuple ». Des centaines de manifestants se sont rassemblés ce dimanche après-midi place de la République à Paris pour protester contre le cinquième mandat que brigue le président algérien Abdelaziz Bouteflika.
« On a besoin d’un président valide », a déclaré Ahmed Ouaguemouni, 60 ans, ancien membre de l’opposition algérienne qui vit dorénavant en France. « Bouteflika, il est toujours à l’hôpital », a-t-il ajouté, tandis qu’un manifestant brandissait un cadre doré vide, symbole de l’absence du président octogénaire à la santé précaire, paralysé et quasiment muet.
Une photo géante du président Bouteflika, barrée d’un « non au 5e mandat », avait par ailleurs été accrochée au pied de la statue célébrant la République.
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En Algérie, des dizaines de milliers de personnes ont défilé à travers le pays pour dire « non » à un 5ème mandat présidentiel d’Abdelaziz Bouteflika. Les manifestations ont été tolérées par la police et couvertes par l’organe de presse gouvernemental. De quoi relancer le débat sur un mandat qui divise jusqu’aux « décideurs » algériens.
En fin connaisseur de la politique étrangère africaine, Abdelaziz Bouteflika ne devait pas ignorer que les déplacements présidentiels en période de crise portent malheur. Nombre de présidents subsahariens en ont fait les frais, jusqu’à ces dernières années. Certes, l’Algérie n’est plus un pays à se laisser conquérir par quelque maréchal-président-fondateur. Pas depuis un bon moment. D’autant plus que la tendance semble révolue même outre-Sahara, où les transitions politiques sont de moins en moins violentes, de plus en plus transactionnelles, à défaut d’être franchement démocratiques. Dans le plus grand pays d’Afrique, les institutions sont bien rodées. L’armée, surtout, et quoique l’on pense de ses manœuvres ou marchandages politiques, est là pour jouer les garde-fous. Tout de même, le président algérien qui se rend dimanche à Genève, laissera derrière lui une Algérie bouillonnante. De quoi, troubler quelque peu son « court séjour médical ».
Après quelques manifestations sporadiques ces derniers jours, c’était le déferlement, vendredi, de plusieurs milliers d’Algériens pour dire « non » au cinquième mandat que brigue le président sortant en avril prochain. La capitale n’y a pas échappé. La précision n’est pas anodine. Depuis la marche des tribus kabyles, les Aarouch, en juin 2001, aucune manifestation n’est autorisée à Alger. À peine une demie douzaine de rassemblements, tout au plus, ont bravé l’interdiction. Souvent à leur frais. Jamais avec autant de succès.
Fait remarquable, en dépit de l’interdiction, les forces de sécurité ont fait preuve de retenue. Elles se sont contentées de surveiller de près, ou d’endiguer les marches en bloquant, selon les cas, des accès, des axes ou rues. Quelques rares heurts ont été signalés à Alger, auxquels la police a répondu par des interpellations. En fin de journée, les Algériens exposaient fièrement des photos et vidéos sur les réseaux sociaux. Une frustration, toutefois, de voir les médias passer sous silence leurs faits d’armes.
« Les rédactions pensaient que ça allait être un flop. Genre, quelques manifestants et des casseurs. Du coup, il y a eu une mobilisation minimale, ce vendredi [jour férié en Algérie], dans les rédactions. Puis, lorsqu’on a compris que c’était du sérieux, les journalistes ont commencé à protester mais les responsables ont eu peur et ont imposé la censure », a témoigné, sous couvert d’anonymat, un journaliste d’un média public algérien à Sputnik.
Étrangement, parmi les très rares médias à avoir relayé ces événements, figure…l’Agence de presse officielle, APS. Avec quelques précautions, certes. La raison d’être de la manifestation était balayée au moyen d’une phrase lapidaire : « Les manifestants ont également (sic) demandé au président sortant de renoncer à sa candidature à un nouveau mandat ». Tout de même, la couverture par l’organe de presse gouvernemental pourrait être « un signe sur le fait, qu’au sein du pouvoir algérien, la question du cinquième mandat ne soit toujours pas tranchée », estime Yahia Zoubir, professeur de relations internationales à la Kedge business school Marseille, dans une déclaration à Sputnik.