Le corps de la police va mal, on le sait tous, et on sait pourquoi. Les raisons sont économiques, politiques, juridiques, et sociales. On l’a vu récemment, un policier qui se battait avec un homme au pied d’une cité (un proche de Yassine Belattar) a été mis à pied. Sa hiérarchie l’a suspendu mais sous la pression de ses confrères, elle a reculé, signe d’une autorité incertaine. Le policier de 2019 a un job difficile, coincé entre une population aux aguets (les Gilets jaunes), des racailles qui pénalisent les habitants des banlieues, et une élite qui s’en sert comme bouclier social.
Dernière tension en date – on y revient parce que ça cristallise le malaise –, la bagarre entre un policier et un médiateur de Sevran (93).
« La demande de suspension d’un policier d’Aulnay-Sevran formulée, jeudi, par le préfet de police, Didier Lallement, a mis le feu aux poudres dans les rangs de la police. Le soir même dès 21h30, une centaine de policiers se sont rassemblés devant le commissariat d’Aulnay à la suite d’un mot d’ordre lancé par le syndicat majoritaire Unité SGP police FO. » (Le Parisien)
Si maintenant les policiers en bande mettent la pression sur les commissariats comme les bandes de racailles, où va-t-on ?! Voici la réaction de Yassine Belattar, le monsieur « Banlieues » de Macron :
« Lamine Ba est mon ami et j’étais avec lui la veille. Jamais il n’aurait provoqué un policier car son travail est connu de tous pour la jeunesse. Merci de diffuser ces images qui prouvent un malaise palpable. L’uniforme ne permet pas tout et surtout n’excuse pas tout. »
Dans l’esprit de la population, au-delà des tensions dans les banlieues (qui de la poule et de l’œuf...), les policiers ont fort à faire depuis la révolte des Gilets jaunes. Pour une partie grandissante de la population, le policier 2019 n’arrête plus les voleurs ou les agresseurs – les racailles bénéficient d’une impunité incompréhensible –, il défend le pouvoir corrompu contre la colère du peuple. Il défend le riche et cogne sur le pauvre. Or le policier appartient au peuple, et au peuple pauvre, ce qui crée un trouble certain.
Cela peut-il faire disjoncter des fonctionnaires déjà bien fragilisés par les médiocres conditions de travail ? Les ministres de l’Intérieur faisant de beaux discours avec de belles paroles tout en réduisant les effectifs et en augmentant la charge de travail en douce, comme dans toute l’administration...
« Un collègue qui n’est pas bien dans sa vie personnelle, quand en plus il travaille dans des conditions déplorables, qu’il est confronté à la misère et la violence d’une partie de la société… vous pouvez passer malheureusement à l’acte. » (Fabien Vanhemelryck du syndicat Alliance, cité par Le Nouvel Obs)
48 policiers se sont donné la mort en 2019 avec leur arme de service, et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Devant la surdité du pouvoir incarné par Castaner, qui a littéralement disparu des radars, les policiers organisent une marche de la colère le 2 octobre. Objectif ? On vise Emmanuel Macron.
Qui est concerné ? Tout le monde, car le mot d’ordre a été repris par les vingt syndicats de police.
« C’est historique. Le dernier appel comme ça remonte à 2001. Et si on appelle toutes les organisations à se réunir dans la rue, c’est qu’il est grand temps de lancer le premier avertissement en haut lieu. » (Fabien Vanhemelryck)
Et quelles sont les revendications de la majorité des policiers ? « Une loi de programmation ambitieuse pour un service public de qualité ».
TOUS LES CORPS DE POLICIERS : ACTIFS, ADS, ADMINISTRATIFS, TECHNIQUES ET SCIENTIFIQUES UNIS DANS LA LUTTE CONTRE LE SUICIDE ET LES AGRESSIONS POUR UNE MARCHE NATIONALE DE LA COLERE, LE MERCREDI 02 OCTOBRE 2019 A 12H30 A PARIS@Place_Beauvau @PoliceNationale @prefpolice pic.twitter.com/rIKvnkm3v6
— ALLIANCE PN (@alliancepolice) September 10, 2019
Au moment où le pouvoir libéral à l’Élysée affaiblit l’État en s’attaquant aux services publics qui sont en quelque sorte la marque sociale de la France, autant dire que ce n’est pas gagné.
En regardant notre agenda, nous découvrons que le 2 est un mercredi. Pour la fusion des cortèges de Gilets jaunes et de Gilets pare-balles, il faudra donc que les GJ avancent un peu leur manifestation du 5 octobre, qui sera la 47e du nom. La fusion des colères, ce que la gauche appelle la convergence des luttes, aurait encore plus de poids. Cela scellerait une réconciliation entre le corps social en lutte et le corps institutionnel de la sécurité.
Le 2 octobre coïncidant avec la date d’anniversaire d’Alain Soral, cette réconciliation nationale pourrait donner lieu à un beau feu d’artifices devant l’Élysée !
Oublions les hypothèses et attendons de voir jusqu’où les policiers vont aller : place Beauvau ? Grilles de l’Élysée ? Dans ce cas, y aura-t-il assez de policiers pour les arrêter ?