À quelques semaines des élections municipales dans la capitale autrichienne, une hypothèse se fait jour : l’arrivée en tête de l’extrême droite dans « Vienne la Rouge ». Dimanche 27 septembre, en Haute-Autriche, le FPÖ a encore réalisé une spectaculaire percée et devient peu à peu la force centrale de la vie politique autrichienne.
À Linz, capitale du Land de Haute-Autriche, le FPÖ a confirmé sa montée en puissance, en obtenant plus de 30% aux élections provinciales de Haute-Autriche, dépassant largement le SPÖ (sociaux-démocrates) mais restant à six points en retrait des conservateurs de l’ÖVP. À deux semaines de très symboliques élections municipales à Vienne, tout semble concourir à faire de l’ancien parti de Jörg Haider, qui martèle ses thématiques hostiles aux demandeurs d’asile, le pivot de la vie politique autrichienne. Une alliance « noire-bleue », des conservateurs et de l’extrême droite, pourrait se substituer à l’alliance « noire-verte » des conservateurs locaux et des écologistes.
« L’assaut » contre Michael Haupl (maire SPÖ de Vienne) sera « frontal » clamait en août le secrétaire général du FPÖ, Herbert Kikl. « Assaut frontal » : le vocabulaire est choisi, volontaire et guerrier. La « Révolution d’Octobre » – slogan de la campagne d’extrême droite dans la capitale autrichienne – aura bien lieu, à en croire le président du FPÖ Heinz-Christian Strache et elle verra Vienne, ville historiquement détenue par les socialistes (ou « sociaux-démocrates » depuis 1991), basculer dans l’escarcelle d’un parti qui, venu d’un pangermanisme mêlé de « libéralisme autrichien », est désormais en pointe de la recomposition des nouvelles droites radicales en Europe. L’hypothèse d’une défaite de Haupl à Vienne peut avoir l’effet d’un choc pour toute la famille social-démocrate européenne, déjà passablement mal en point. C’est une hypothèse peu probable dans la mesure où Haupl bénéficiera du renfort de ses concurrents Verts et NEOS. Symboliquement néanmoins, il pourrait être le grand perdant du scrutin. Désormais à seulement deux points de ses concurrents sortants sociaux-démocrates (le FPÖ obtient 32% contre 34% pour le SPÖ), le parti d’extrême droite autrichien est donc aux portes du pouvoir municipal à Vienne.
Piller les symboles
La première affiche de Strache est sortie voici trois semaines : elle promet la « Révolution d’Octobre » aux Viennois, pas celle, on s’en doute, des conseils ouvriers mais celle portée le « SozialHeimatPartei ». D’aucuns seraient tentés d’y voir un symptôme du tropisme pro-Poutine de Strache. Plus sûrement faut-il y voir une nouvelle tentative de l’extrême droite de désarticuler les éléments qui ont fait la force et la solidité, des décennies durant, de la culture commune de la gauche européenne, qu’elle se soit inscrite dans le prolongement ou non de l’événement en question. Les mots de « révolution », de « révolte » sont utilisés avec la même insistance que la figure de Jaurès par le FN et Louis Aliot dans sa propre campagne. Strache applique la stratégie des droites radicales européennes avec constance, une stratégie qui consiste également à piller les symboles de l’adversaire pour les réinvestir d’une nouvelle charge idéologique.