Le think tank Centre for Economic Policy Research (CEPR), un réseau de plus de 800 économistes qui mène des recherches en Europe, vient de publier un rapport dans lequel il affirme que la récession de la zone euro qui a débuté au quatrième trimestre 2011 n’est pas encore finie.
Depuis des semaines, les médias européens et les politiques se gargarisent avec la pseudo-sortie de crise de l’Europe, alors que dans plusieurs pays de l’UE, le chômage continue de dépasser les 20%, et le problème de la dette excessive n’est toujours pas résolu. Les marchés financiers exultent et ils sont de plus en plus friands des obligations des pays les plus endettés, et les taux d’intérêt de celles-ci s’écroulent littéralement.
L’Espagne a ainsi emprunté un peu plus de trois milliards d’euros à des taux d’intérêt historiquement bas pour des échéances à 3 ans et à 5 ans ce mercredi. A la fin du mois de mai, le taux d’intérêt sur les obligations à 10 ans est tombé en deçà de 3%, alors qu’il dépassait encore les 6% - le double - en 2012, et que le taux de chômage du pays est encore supérieur à 25%.
« L’économie de l’Europe a eu le vent en poupe depuis 2012, si l’on en croit la flambée des indices. Les politiciens et les Eurocrates s’en sont attribués le mérite, et un cyclone de félicitations et d’autocongratulations s’est ensuivi », écrit Wolf Richter sur son blog Testosterone Pit.
Pourtant, certains indicateurs pointent vers une histoire bien moins réjouissante, dit-il. Ainsi, les bénéfices des entreprises en Europe, qui avaient atteint leur point le plus élevé en juillet 2011 n’ont fait que chuter depuis, et ce déclin se poursuit encore aujourd’hui.
Le nouveau rapport de CEPR affirme que la croissance a été trop faible au cours de l’année 2013 pour que l’on puisse parler de relance. Il estime que nous avons probablement plutôt assisté à une pause dans la récession qui a débuté au 4ème trimestre 2011.
Le CEPR ne définit pas la récession de la façon traditionnelle, c’est à dire se manifestant par le déclin du PIB sur deux trimestres consécutifs, et il prend en compte une série d’autres facteurs, tels que le taux de chômage ou la force de la relance.
« Plusieurs trimestres de développements économiques certes positifs, mais extrêmement faibles depuis début 2013 ne constituent pas une preuve suffisante que la récession de la zone euro qui a commencé après le 3ème trimestre 2011 est terminée » a affirmé le Comité du CEPR dans un communiqué. Pour Philippe Weil, qui dirige ce comité, et qui est aussi économiste à l’Université Libre de Bruxelles, il faudra plusieurs trimestres supplémentaires de croissance à ces faibles taux pour pouvoir conclure qu’il s’agit d’une véritable reprise économique, et pas d’une simple pause de la récession. « Et alors, ce ne sera pas une bonne nouvelle. Si c’est une expansion, alors, nous avons un problème », a-t-il commenté.
« Cela n’a pas été une information bienvenue pour les Eurocrates et les solutionneurs de la crise de la zone euro. Mais il n’y avait rien de nouveau pour les chômeurs de France, d’Espagne, de la Grèce, du Portugal, et de plusieurs autres pays. Ils ont déjà vu que le battage médiatique autour de la reprise économique n’était que du battage médiatique », écrit Richter.
Il conclut :
« Ce n’est qu’une preuve de plus si nous en avions besoin, que faire tout ce qu’il faut pour porter secours aux porteurs d’obligations et aux actionnaires des banques et des grandes entreprises, puis d’étouffer les travailleurs, en réduisant leurs salaires et leurs avantages et en augmentant leurs impôts, n’est pas bénéfique pour l’économie réelle. »