La Chine est la première puissance étrangère à manifester son intérêt pour investir en Crimée, depuis que la région a fait sécession d’avec l’Ukraine pour rejoindre la Russie. Dans le contexte des tensions croissantes entre la Russie et l’Occident, il ne s’agit bien entendu pas seulement d’une question d’argent, affirment Egro Polov et Denis Skorobogatko dans Worldcrunch.
Le quotidien russe Kommersant a indiqué qu’un fonds d’investissement privé et une compagnie étatique chinois seraient prêts à investir 1,3 milliard de dollars dans un nouveau corridor de transport à travers le détroit entre la Crimée et le reste de la Russie. D’après certains observateurs, cependant, il s’agirait avant tout d’un geste politique, une démonstration que les relations entre le Kremlin et la Chine se sont renforcées après que l’Occident a décidé d’imposer des sanctions à la Russie.
Le projet permettrait d’établir une connexion entre la Crimée et la région russe de Krasnodarsk. Les détails restent inconnus, mais il pourrait s’agir d’un pont pour les voitures et les trains, ou de la combinaison d’un pont et d’un tunnel sous-marin. « Les Chinois ont beaucoup d’expérience dans les projets d’infrastructure, mais de façon plus importante, c’est le premier projet d’envergure que nous allons entreprendre avec eux depuis l’envenimement des relations avec l’Ouest », a déclaré une source.
Ce premier investissement de la Chine lui donnerait accès à d’autres projets majeurs dans la région. Certains investisseurs russes craignent même d’être évincés de ces projets au profit d’entreprises chinoises.
La Chine avait déjà des projets d’investissements en Crimée avant le déclenchement de la crise ukrainienne. À la fin de l’année dernière, l’Ukraine avait signé un accord avec la Chine portant sur la construction d’un port en eau profonde en Crimée. Des sociétés chinoises avaient également été associées à la reconstruction du port de pêche de Sébastopol, à la construction d’un nouvel aéroport et à un certain nombre d’autres projets.
D’un autre côté, la société de construction navale de la ville de Théodosie, en Crimée, a livré l’année dernière un navire militaire amphibie à la Chine, et elle est en train d’en produire un second.
Mikhail Blinkin, directeur de l’Institut russe de l’Économie et de la Politique des Transports, a déclaré que la rentabilité de ces projets n’était pas garantie, mais que les Chinois cherchaient peut-etre avant tout à assurer leur influence dans la région. « À long terme, le gouvernement russe leur retournera ce qu’ils auront investi », affirme-t-il.
Il commente que l’avantage des Chinois dans le domaine de l’infrastructure repose sur leur main d’œuvre bon marché, mais qu’ils n’apportent pas de nouvelle technologie. Il confirme également qu’il est probable que les sociétés russes ne pourront pas travailler sur ces marchés s’ils sont confiés à des entreprises chinoises.
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