La Suède est devenue ce jeudi 30 octobre le premier pays membre de l’Union européenne à reconnaître l’État de Palestine, une initiative saluée par le président palestinien comme « courageuse et historique » mais considérée « malheureuse » par Israël.
Ambassadeur israélien rappelé
Israël a rappelé son ambassadeur à Stockholm pour consultations, après la reconnaissance par la Suède de l’État de Palestine.
« Cela reflète vraiment notre irritation et notre agacement devant une décision inutile qui ne contribue pas à la possibilité d’un retour aux négociations », a déclaré à l’AFP le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Emmanuel Nahshon.
Selon l’Autorité palestinienne, quelque 135 pays dans le monde ont reconnu la Palestine, dont, outre le royaume scandinave, sept membres de l’Union européenne : la République tchèque, la Hongrie, la Pologne, la Bulgarie, la Roumanie, Malte et Chypre, l’ont reconnue avant leur rentrée dans l’UE.
Mahmoud Abbas
« Le président Abbas salue la décision de la Suède » qu’il juge « courageuse et historique », a dit son porte-parole Nabil Abou Roudeina. Dans un communiqué, le ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, évoque « une décision malheureuse, qui renforce les éléments extrémistes et la politique de refus des Palestiniens. » Lieberman soulignant aussi que le Moyen-Orient était « plus compliqué que le montage de meubles Ikea »
L’annonce de cette reconnaissance début octobre avait été accueillie avec scepticisme par les États-Unis qui la jugeait « prématurée ». « Le gouvernement considère que les critères de droit international pour une reconnaissance de l’État de Palestine sont remplis : il y a un territoire, une population et un gouvernement, a dit la chef de la diplomatie suédoise Margot Wallström lors d’une conférence de presse. « J’ai peur que (cette décision) vienne plutôt trop tard que trop tôt », dit-elle.
Impasse
La Suède, qui compte une importante communauté palestinienne, a pris cette initiative à un moment où les efforts déployés depuis des décennies pour tenter de résoudre le conflit israélo-palestinien semblent dans une impasse complète, alors que les capitales occidentales se demandent comment en sortir et que la frustration des dirigeants palestiniens est proche de son comble.
Le président palestinien a mis cette reconnaissance en relation avec les tensions auxquelles Jérusalem est en proie actuellement. « Cette décision est une réponse aux mesures prises par Israël à Jérusalem », a-t-il dit.
« Mahmoud Abbas demande à tous les États dans le monde qui hésitent encore à reconnaître notre droit à un État palestinien indépendant sur les frontières de 1967 et ayant Jérusalem-Est comme capitale à suivre l’exemple de la Suède », selon son porte-parole.
« Montrer la voie »
Dans le courant du mois d’octobre, le projet de reconnaissance de l’État palestinien a été symboliquement débattu par la Grande-Bretagne et envisagé le moment venu « par la France. ».« Nous voulons montrer la voie », explique la chef de la diplomatie suédoise.
« C’est vraiment difficile de dire combien de pays vont effectivement sauter le pas et suivre la Suède », estime Michaël Schulz, chercheur à l’université de Göteborg et spécialiste des conflits. « Quant à l’Union européenne, pour qu’elle reconnaisse la Palestine, il faudrait que tous les États-membres soient d’accord, ça devient donc peu probable », poursuit-il, estimant qu’à court-terme la décision de Stockholm « ne devrait pas changer grand chose ». « Après, il faut voir comment Israël va réagir, s’ils vont continuer leur politique de colonisation ou s’ils vont au contraire être plus prudents ».
Effet boule de neige ?
Selon un décompte de l’AFP, au moins 113 pays ont reconnu l’État de Palestine. « L’initiative suédoise a un effet diplomatique qui peut éventuellement faire boule de neige », considère pour sa part le professeur de droit international Ove Bring, interrogé par l’agence suédoise TT. « Politiquement, c’est un succès psychologique pour la Palestine et ceux qui soutiennent une solution à deux États », conclut-il.
Pour Israël, reconnaître la Palestine réduit les chances de parvenir à un accord car elles « renforcent les exigences irréalistes des Palestiniens », a dit M. Lieberman. « Nous ne prenons pas partie. Nous nous mettons du côté du processus de paix », soutient Mme Wallström. « J’espère que cela va être reçu par Israël de manière équilibrée et constructive ».
La Suède a par ailleurs décidé d’augmenter le montant de son aide bilatérale à la Palestine de 500 millions de couronnes (53,9 millions d’euros). Ce programme d’aide sur cinq ans s’élève désormais à 1,5 milliard de couronnes. La Suède a un consulat-général à Jérusalem.