Un mercenaire britannique impliqué dans une tentative de coup d’État en 2004 contre le président Teodoro Obiang a accusé le financier américain George Soros et l’avocat de Transparency international William Bourdon d’avoir voulu renverser le régime.
Simon Mann, 65 ans, est venu témoigner en faveur de Teodorin Obiang, fils du président équato-guinéen, jugé à Paris dans l’affaire dite « des biens mal acquis », devant le tribunal correctionnel de Paris. Condamné à 34 ans de prison en Guinée équatoriale pour tentative de coup d’État, Simon Mann avait été gracié par le président Obiang puis libéré en 2009.
« Je n’ai pas de preuve écrite », a-t-il averti avant de livrer son récit. À la barre, le sexagénaire en costume sombre a affirmé avoir en 2011 averti le président Obiang que le financier américain George Soros et l’avocat de Transparency international William Bourdon, ainsi que deux autres protagonistes du coup d’État raté de 2004, l’opposant en exil Severo Moto et l’homme d’affaires Ely Khalil, avaient l’intention de renverser le gouvernement. Transparency international est partie civile au procès Obiang.
« J’ai expliqué au président qu’il pourrait être usé à ces fins de n’importe quel moyen », a-t-il poursuivi. Selon lui, le président Obiang lui a alors montré un email de 2007 « du bureau d’Ely Khalil à William Bourdon, qui mettait en cause le comportement du vice-président », Teodorin Obiang.
Selon Simon Mann, les individus qu’il a mis en cause auraient donc envisagé toutes les options, y compris légales. Questionné par la présidente, il a affirmé qu’il n’avait pas été payé pour sa déposition devant le tribunal, mais défrayé.
Parlant avec calme mais semblant bouillir de l’intérieur, William Bourdon a dénoncé un « procédé qui atteint le paroxysme de la salissure », un procédé d’une « extrême gravité ». Il a demandé que ces mises en cause soient actées, annonçant qu’il se réservait la possibilité d’engager des poursuites.
L’avocat de Teodorin Obiang, Maître Emmanuel Marsigny, a expliqué avoir obtenu le fameux email de 2007 car il se trouvait dans les pièces de la défense de l’organisation humanitaire CCFD-Terre Solidaire, qui avait été poursuivie en diffamation par le président équato-guinéen.
William Bourdon a de son côté affirmé que son contradicteur procédait ainsi en sachant qu’il n’avait pas la liberté de se défendre, sauf à violer le secret qui s’impose à lui dans le cadre d’un incident disciplinaire entre avocats survenu il y a plusieurs années.
Avant cet incident, le tribunal a vu défiler à la barre plusieurs témoins des parties civiles. Entrepreneurs, journalistes, ils ont décrit la Guinée équatoriale comme un pays où règnent la « cleptocratie » et la « corruption ». Un journaliste équato-guinéen, exilé en Espagne, a affirmé qu’il était dans son pays interdit de faire voir au peuple ce qui se déroulait devant la justice française.
Daniel Lebègue, président d’honneur de Transparency international, a quant à lui estimé que l’argent des « biens mal acquis » appartenait aux citoyens de Guinée équatoriale. « Ce dossier emblématique aura et a déjà un écho immense non-seulement en Afrique mais partout dans le monde où les gens luttent pour l’État de droit et pour faire reculer la corruption », a-t-il déclaré.
Le procès de Teodorin Obiang, accusé de s’être frauduleusement bâti en France un patrimoine considérable, doit durer jusqu’au 6 juillet.