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The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

Mode passagère ou message de l’Oligarchie ?

La presse parle d’une œuvre bestiale, glaciale, majeure (western christique pour Jérôme Garcin de L’Obs)… C’est vrai qu’on revient du Revenant dans un autre état que d’une comédie avec Romains Duris et Nicolas Bedos, ces « nouveaux » Alain Delon et Jean-Paul Belmondo. Mais ne comparons pas les petits torchons et les tapis persans, et ne versons pas dans une trop facile autoflagellation nationale. Tout passe, et l’abaissement du cinéma français en particulier et de la culture française en général, passera. La période incroyablement régressive et répressive que nous subissons sous le joug d’élites impopulaires dénigrées comme jamais, ne pèse rien face à la puissance de l’Histoire de France. C’est une maigre consolation, mais c’est la seule.

 

La vie est son prix

Après avoir raflé un Golden Globe du meilleur acteur, Leonardo DiCaprio se dirige théoriquement vers son premier Oscar. Son Revenant est le cheval idéal pour grimper au firmament des acteurs. Déjà primé par deux fois (pour Aviator et Le Loup de Wall Street), le fils préféré de Martin Scorsese incarne un trappeur qui (sur)vit dans une zone indienne. Tableau assez réaliste de l’Amérique pas encore blanche du début du XIXe siècle (1823), où des hommes endurcis violent le territoire indien du Dakota pour se livrer au lucratif mais dangereux trafic des peaux. Un Nouveau Monde rendu volontairement gris, sale et triste, crépusculaire, par le réalisateur Alejandro Iñárritu, qui s’attarde sur le prix de la vie. On y pisse, bouffe, tue, viole, et crève. On y gagne rarement sa vie, on y laisse souvent sa peau… comme une pauvre bête.

The Revenant n’est pas un OVNI dans le ciel hollywoodien. Avant, lui, beaucoup de réalisateurs se sont essayés au tableau de « l’homme seul face à la Nature ». Épure du Destin et de ses périls, de la force de l’Esprit qui doit les vaincre, au prix d’une plongée vertigineuse dans la Douleur… On met des majuscules parce que c’est du gros concept. Illustration du postulat indépassable de l’homme qui paye sa vie en souffrance.

 

 

Une longue et riche lignée d’œuvres survivalistes

Montage habile des morceaux juteux de Jeremiah Johnson de Sydney Pollack (1972), Rambo de Ted Kotcheff (1982), Danse avec les loups de Kevin Kostner (1990), L’Ours du très américain Jean-Jacques Annaud (1988), Seul au monde de Robert Zemeckis avec Tom Hanks (2000), Le dernier trappeur de Nicolas Vanier (2003), Apocalypto de Mel Gibson (2006), et quelques olives piquées ça et là (la scène brûlante des entrailles du cheval dans Star Wars), le réalisateur n’en transcende pas moins tous ces emprunts, qui passent alors pour des hommages, par pour du plagiat. On n’est pas chez Luc Besson. On est transporté, ailleurs, dans un autre monde…

 

 

Sur le film ? Prenez Payback (1999), ce western métallique urbain où Mel Gibson grimpe douloureusement les étages du temple des Forces du Mal, pour abattre le Diable et gagner l’Éternité. Et transposez-le dans les plaines glaciales du Nord Dakota, hantées par les guerriers sioux, en guerre contre les Pawnee. Un Gibson qui ne sort décidément pas de son paradigme christique, et tant mieux. Rien n’a profondément changé, depuis 2 000 ans. Interloquée par la violence de la version initiale, la Warner fera couper les passages les plus durs (la version director’s cut est depuis peu accessible aux « passionnés » de cinéma). Mais la trame reste identique : l’éternelle rédemption, sous un déluge de crachats et de coups, pour atteindre le Royaume des Cieux, incarné par l’amour de la Belle… Chevaleresque !

 

« La vengeance est entre les mains du Créateur »

Tout bon film d’action – selon la recette de Sam Peckinpah – est une poursuite. Les Français, ces intellectuels indécrottables, préfèrent la quête. Nous avons ici le croisement entre le rêve américain et un irrésistible désir de justice. Bon, de vengeance, disons-le tout net. Mais une vengeance sublimée. La Nature étant à la fois l’ennemie et l’amie – quand on sait la découvrir, l’apprivoiser, l’utiliser – de ce retour progressif (le héros part de très bas) à la civilisation. L’ombre de Terrence Malick plane sur les plans (sur)naturels d’Alejandro Iñárritu, qui fait, c’est devenu bateau de le dire, du cadre naturel époustouflant un rôle à l’égal du premier. C’est dans ce dialogue d’abord difficile avec la Nature que l’Homme va se construire… Elle enfante dans la douleur, puis elle élève. Biblique, isn’t it ?

 

 

Principe œdipien où la nature incarne à la fois la Mère (protectrice, nourricière, aimante) et le Père (punitif, correcteur, mais qui fait grandir). Paradoxe d’un environnement qui mélange allègrement occasions de mourir et moyens de s’en sortir… L’idée principale des Chemins de la liberté de Peter Weir (2010), sur ces évadés d’un camp de travail sibérien qui trouveront, dans le terrible désert de Gobi, les serpents noirs qui leur permettront de le traverser. Cadeaux du Ciel au milieu d’un enfer terrestre…
Ainsi, la mort magnifie-t-elle la vie, lui donnant une valeur inestimable, mais ça, on le sait tous. C’est le moment de placer la citation de Malraux : « la vie ne vaut rien, mais rien ne vaut la vie ».

 

Par la multiplication des films de ce genre (à part entière), quel message le cinéma hollywoodien, cette voix officielle de l’Amérique, nous délivre-t-il ?

Quel est le sens de la série récente Gravity, Seul sur Mars (The Martian), The Revenant ? Énième exaltation de l’individu comme base du rêve américain au détriment du collectif, ou avertissement adressé aux occidentaux, qu’ils vont entrer dans des temps plus sombres ? Le film traduit-il un changement de paradigme, mettons la fin de notre civilisation (ça arrivera bien un jour, peut-être même sans qu’on s’en rende compte, comme l’extinction du soleil), ou juste la peur de cette fin, qui peut être salvatrice ?
Car c’est la peur, autrement dit la prise de conscience du danger, qui demeure l’aiguillon fondamental de l’homme sur terre. Et toutes les peurs, même les plus minimes (la peur de déplaire, la peur de rater un examen, la peur de manquer), sont directement ou indirectement reliées à la peur de la mort. Dans notre monde hypercivilisé, la peur de mourir a été enterrée profondément sous la consommation, l’activité, le travail, le confort, le divertissement. Mais elle se relève toujours, quand on s’y attend le moins. Iñárritu nous y replonge froidement, la tête la première.

 

Le survivalisme, un fantasme devenu réalité, voir sur E&R :

Pour retrouver le rythme de la nature, lire sur Kontre Kulture :

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81 Commentaires

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  • #1406999
    Le 27 février 2016 à 16:20 par lephil
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    Une magnifique nature sauvage et la profondeur de l’âme humaine nous fait plonger dans un torrent glacé d’incertitude sur le reflet de notre image civilisée que nous nous faisons de nous mêmes.
    Bon pour ce donner excuse d’une si violente ode à la vérité sur l’homme il fallait détourner et donc trouver un fautif aussi le vilain Français menteur et violeur peut nous laisser penser qu’il est le facteur déclenchant au triste sort du héro et de ses pauvres compatriotes.
    Ce sont les vainqueurs qui écrivent l’histoire ne pas l’oublier....

     

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  • #1407121
    Le 27 février 2016 à 19:54 par la pince mon seigneur
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    Comme d’hab, l’Amérique et son virilisme mais il parait que la légion étrangère est trop dure pour eux... Entre survivalisme et films de cul "grosse bitte- gros cul", l’Amérique... En même temps, ils ont des auteurs de science-fiction qu’on est incapable de produire en France(qui peut se vanter d’avoir un philips K.dick ?), ils savent au contraire de beaucoup d’écrivains français, anticiper et intellectualiser leurs problèmes de société, alors que nous en France, la seule production est l’analyse critique et les romans de ménagères de - 50ans et quand un français cartonne des idées et du concepts, il est adulé à l’étranger, jamais en france(B.Weber), l’exception culturelle à la française est très simple : ce qui est bon, on en veut pas !

     

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    • #1407215
      Le Février 2016 à 22:40 par Elric De Melnibonée
      The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

      Je vous conseille de jeter un oeil à ce qu’à écrit un certain Jean-Philippe Jaworski ("Gagner la guerre" est formidable ainsi que "Janua Vera"), ça mérite le détour et j’espère que cela vous fera changer d’avis sur les auteurs français.

       
    • #1420107
      Le Mars 2016 à 00:55 par Laly
      The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

      Bernard Weber ?
      Oh la la ... je trouve qu’il cartonne assez pour ce qu’il écrit merci bien.

       
  • #1407199
    Le 27 février 2016 à 22:12 par david
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    Film époustouflant pour le cadre, les paysages du grand nord américain sont saisissants. La scène de l’attaque de l’ours est une grande scène de cinéma. Mais voilà c’est du cinéma et hollywoodien qui plus est. Les français représentés sont donc dépeints comme de sinistres violeurs alcoolisés. Encore un beau retournement de l’Histoire. Pour info, l’acteur canadien Roy Dupuis a refusé de jouer le rôle de "Toussaint" car n’ayant pas pu lire le script d’avance il avait pressenti l’arnaque. Heureusement le réalisateur a trouvé un bon français pour trahir l’histoire de son pays, une fois de plus...
    http://www.lefigaro.fr/cinema/2016/...

     

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  • #1407274
    Le 28 février 2016 à 01:47 par bloblo
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    Ca me fait toujours marrer ici, les gars ont l’antiaméricanisme chevillé au corps mais ça file derechef au cinéma dès qu’un film caresse dans le sens du poil. C’est ça la grande force de la société de consommation et de la publicité, il y en a pour tous les goûts, tout le monde se fait avoir, mais évidemment chacun a une trop haute estime de son intelligence pour s’avouer qu’il participe au système comme les autres.

    Pas grave, si, comme dans Le Dernier des Mohicans et Danse avec les Loups, on vend une vision totalement mensongère de l’histoire américaine et en particulier de la mémoire franco-américaine.

    Les Acadiens et les indiens partageaient les mêmes terres et vivaient plus qu’en paix, ils avaient fraternisé et développé une société particulièrement originale basée sur la liberté (notamment des échanges) et le respect de chacun.

    Les uns ont été déportés et acculturés (premier nettoyage ethnique reconnu), les autres ont été massacrés.

     

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  • #1407334
    Le 28 février 2016 à 09:45 par anonyme
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    Proche du publicitaire Jacques Seguela, le producteur israelo-monegasque Arnon Milchan – qui dispose d’une demeure cossue en region parisienne (Montfort-l’Amaury) – est un ancien agent secret implique dans le trafic d’armes et le vol de secrets nucleaires.
    http://www.egaliteetreconciliation....

     

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  • #1407398
    Le 28 février 2016 à 11:25 par SpiritusRector
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    @ Elric De Melnibonée

    On passe tous par la phase de demi éveil.

    C’est confortable, mais faut pas y rester car la marche arrière peut survenir si on s’amourache du confort.

    Moi aussi j’ai bien aimé ce film, et j’aime bien un petit Simpsons/South park de temps à autre. Cela ne m’empêche pas d’être capable de comprendre et de décrire le but du message contenu dans les scènes importantes et dans les œuvres complètes.

    D’ailleurs si la manipulation est omniprésente, elle est souvent entourée d’authentiques bon constats.

    En fait ce sont souvent les pistes de réflexions proposées par ces œuvres qui sont viciées, non les constats.

     

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  • #1407440
    Le 28 février 2016 à 12:18 par Diomède
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    Dans le genre paysages enneigés, à voir, Dans la brume de Sergueï Lonitza.

    Je n’ai pas vu Revenant, cependant, semble encore une histoire de vengeance et de violence anglo-saxonne auquel ce film russe, réalisé par un ukrainien, pourrait faire contre-pied.

     

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  • #1407482
    Le 28 février 2016 à 13:24 par brahim
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    C’est étrange de devoir aller au cinéma pour pouvoir aprecier la grandeur de la nature...
    L’homme moderne serait il aussi déconnecté de la réalité,que seul une fiction ai le pouvoir de l’amener a s’interroger sur cette vérité qui l’entour ?
    2h de méditation sur les miracles de la nature serait tellement plus nourricières que 2h face un écran, aussi grand soit il.
    Mais que voulez vous les hommes d’aujourd’hui préfère peut être qu’on réfléchissent à leurs places.

     

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  • #1407562
    Le 28 février 2016 à 15:55 par Salah
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    J’ai énormément apprécié le film The Revenant.

    DiCaprio y est époustouflant, la réalisation est simplement magistrale.

    Surtout, que, ce film nous laisse plusieurs interprétations possibles, que de messages humains et positifs.

    Je suis membre d’ER, et j’ai été lynché sur la page FB d’ER pour avoir dit, que, dans le passé, l’histoire des colons était complexe et que l’on ne pouvait pas en tirer des conclusions hâtives.

    J’ai effectivement écrit que tout n’est pas blanc, tout n’est pas noir, il y a des nuances de gris : Culpabiliser les français est malhonnête et sans utilité mais innocenter certains crimes perpétrés l’est aussi.

    Pour cela, j’ai eu affaire dans les commentaires à des excités qui m’ont tout de suite accusé d’être "antifrançais" or c’est tout le contraire, je n’ai pas à me justifier sur mon amour pour la France et prouver cela.

    Mais j’ai été choqué que des excités, sur la page FB d’ER m’interdisent de dire ce que je pense alors que je n’ai rien dit de haineux.

    Bref, "The Revenant" est un excellent film, DiCaprio confirme son statut de grand acteur.

    Vive ER, vive la Réconciliation Nationale et vive la France.

     

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    • #1407798
      Le Février 2016 à 20:51 par zuleya
      The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

      salah bien sur, mais qui te parle d "innocenter" les francais ?
      les francais ont commis de tels crimes ? si oui lesquels sont hors normes face a ceux d autres nations qu il faut s excuser de se faire rouler dans la farine par les crimes imaginaires de ce film ?

      on te parle ici d une propagande antifrancaise par une nation (les usa) qui a justement exterminé litteralement les nations indiennes, propagande produite par un israelien marchand d armes...
      sachant qu en plus la france est le plus ancien allié des usa... on est l un des rares pays a ne pas avoir ete en guerre contre eux...la liste est de plus en plus courte...

      si tu ne ressens pas cette offense sur la fierté d etre francais, peut etre n es tu pas reellement francais dans l ame apres tout (il suffit pas de le dire), en tout cas ne viens pas traiter ceux qui la ressente intimement d "éxcités", en venant ensuite parler de reconciliation...

      ca va pas le faire. j ai pas a me reconcilier je t ai rien fait.

       
  • #1412785
    Le 6 mars 2016 à 16:16 par Yazo
    The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

    "la scène brûlante des entrailles du cheval dans Star Wars"

    Qqn peut m’expliquer a quel episode de la serie Star Wars ce passage fait-il reference ?

    Merci

     

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    • #1416821
      Le Mars 2016 à 14:49 par Vincenzo
      The Revenant : quand Hollywood exalte le survivalisme

      A mon avis c’est la scène du début du deuxième épisode des "anciens Star Wars", où Yann Solo découpe un espèce de lama des neiges pour réchauffer Luke Skywalker. Cette scène m’avait marquée aussi quand j’étais petit.

       
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