Selon RFI, ce samedi 20 janvier, une offensive terrestre de l’armée turque à Efrin est imminente, après une préparation d’artillerie contre les positions de la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG).
L’armée turque a lancé une opération militaire en Syrie pour reprendre la ville d’Afrin, contrôlée par les Kurdes. Cette offensive, qui s’annonce moins aisée que prévue, confronte les États-Unis aux ambiguïtés de leur politique kurde.
L’armée turque se prépare depuis quelques jours à envoyer ses troupes dans la ville d’Afrin, située dans une enclave tenue par les Kurdes, dans le nord de la Syrie, près de la frontière turque. Mais cette bataille, ayant « de facto débuté » selon une déclaration du gouvernement turc du 19 janvier, pourrait bien déclencher un conflit ouvert entre Ankara et les États-Unis.
Alors que les États-Unis ont, de leur côté, opté pour une modification de leur agenda en Syrie et le maintient de leurs soldats sur place afin de contrer l’influence iranienne et celle du gouvernement syrien, l’armée turque poursuit de son côté son opération Bouclier de l’Euphrate avec pour nouvel l’objectif la lutte contre les Kurdes. « Avec la volonté de Dieu, nous continuerons dans les jours à venir nos opérations lancées dans le cadre de l’opération Bouclier de l’Euphrate pour nettoyer nos frontières sud et débarrasser Afrin de la terreur », avait ainsi déclaré le 14 janvier dernier le président turc Recep Tayyip Erdogan dans une allocution télévisée.
Pour l’heure, peu d’informations permettent de deviner la stratégie exacte que souhaite mettre en place Ankara pour s’emparer d’Afrin, même si une offensive terrestre est la plus crédible des options. Le journal turc Habertürk évoque lui des frappes aériennes préalables sur plus d’une centaine de positions des Unités de protection du peuple kurde (YPG), à l’aide notamment de drones. Ces derniers jours, des chars, des véhicules de combat ou encore des obusiers automoteurs ont été déployés du côté turc de la frontière. Côté effectifs, les groupes rebelles pro-turcs devraient constituer le gros des troupes mobilisées pour l’offensive, conformément à la stratégie déjà adoptée par Ankara depuis plusieurs mois. L’occasion également pour la Turquie de légitimer son action : « Cette bataille est livrée pour eux, pas pour nous », assurait encore le 16 janvier dernier Recep Tayyip Erdogan.
Une bataille qui s’annonce aussi rude que délicate
La bataille d’Afrin s’annonce d’ores et déjà comme une étape marquante du conflit syrien. La purge opérée par le président turc dans les hauts rangs de l’armée après la tentative ratée de coup d’État à son encontre en juillet 2016 a eu pour effet d’écarter de nombreux officiers aguerris. « L’opération Bouclier de l’Euphrate a bien montré que les dirigeants militaires turcs avaient peu d’expérience dans la conduite d’opérations lourdes impliquant à la fois des forces aériennes et au sol », explique à RT Grigori Lukyanov, professeur à l’École des hautes études en sciences économiques de Moscou.
De leur côté, les Kurdes ont réussi à fédérer de nombreux combattants déterminés tout au long du conflit en Syrie. En outre, ils disposent d’armes et d’équipements modernes que leur a fournis Washington, en dépit des protestations d’Ankara. Les États-Unis ont par ailleurs formé plusieurs chefs militaires. L’expérience des combats contre l’État islamique n’a fait qu’accroître la préparation et l’efficacité des milices kurdes, qui se placeraient désormais « presque à armes égales » face aux effectifs mobilisés par Ankara, selon Grigori Loukianov.
Autre paramètre à prendre en compte : Damas a d’ores et déjà mis en garde Ankara contre toute opération conduite sur le sol syrien. « Nous avertissons les dirigeants turcs que s’ils lancent des opérations de combat dans la région d’Afrin, cela sera considéré comme un acte d’agression par l’armée turque », avait ainsi déclaré le vice-ministre syrien des Affaires étrangères Faisal Meqdad, le 18 janvier. De son côté, Moscou a rappelé le 15 janvier dernier, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, que « les Kurdes [faisaient] partie de la nation syrienne », sans pour autant aller jusqu’à condamner une éventuelle intervention turque à Afrin.