Les États-Unis n’entendent pas s’effacer en Syrie. Au contraire, comme semble le prouver l’annonce de la création d’une « force frontalière » par la coalition internationale sous commandement américain. Cette « Force de sécurité frontalière » devrait être constituée de 30 000 hommes, dont la moitié seraient des membres des Forces démocratiques syriennes (FDS). L’autre moitié serait composée de nouvelles recrues, dont quelques centaines sont déjà en formation.
D’après la coalition, cette force devrait être stationnée le long des frontières à l’est et au nord de la Syrie, soit à l’orée de l’Irak et de la Turquie, mais aussi sur les lignes de démarcation qui séparent les territoires dominés par les Kurdes du reste du pays. Son objectif affiché ? Empêcher une renaissance de l’État islamique, aujourd’hui en pleine déroute en Syrie et en Irak.
Alors qu’une politique américaine en Syrie était difficile à décrypter depuis l’arrivée de Donald Trump à la présidence il y a un an, l’annonce de la création de cette « force frontalière » fait l’effet d’une bombe. Il y a quelques jours déjà, le secrétaire d’État adjoint par intérim pour les Affaires du Proche-Orient David Satterfield avait révélé, lors d’une audience du Comité sénatorial des Affaires étrangères, un maintien « à durée indéterminée » d’une présence militaire américaine – quelque 2 000 soldats américains sont déjà déployés en Syrie et appuient les FDS, selon des chiffres avancés en décembre par le Pentagone – dans le Nord et l’Est syriens, une nouvelle politique qui a pris même les sénateurs par surprise.
Il avait donné plusieurs raisons à cette décision : stabiliser cette zone, protéger les FDS, « alliés vaillants » des États-Unis, créer un modèle politique alternatif en Syrie à celui de Bachar el-Assad et, surtout, contrer « l’Iran et sa capacité à renforcer sa présence en Syrie ». Washington n’a jamais caché son intention d’endiguer, par tous les moyens, l’influence de l’Iran dans la région. Le fameux croissant chiite, tant craint par les États-Unis, l’Arabie saoudite et Israël, et qui va de Téhéran à la Méditerranée en passant par Bagdad, Damas et Beyrouth, ne passerait justement pas par le Nord syrien. L’intérêt de cette nouvelle stratégie américaine reste donc opaque, puisque la présence militaire iranienne est plus au sud.
Objectifs US
« Quel peut donc être l’objectif de cette armée de terroristes, si ce n’est la Turquie ? » a par conséquent demandé hier le président turc Recep Tayyip Erdogan. « L’Amérique a avoué qu’elle était en train de constituer une armée terroriste à notre frontière. Ce qui nous revient, à nous autres, c’est de tuer dans l’œuf cette armée terroriste », a-t-il ajouté.