Il est navrant de constater que les éditeurs des dictionnaires s’abandonnent à l’air du temps, pour satisfaire aux desiderata d’une partie inculte de la jeunesse qui n’en demandait probablement pas tant.
Les dictionnaires se sont mis à jour. La langue évolue avec la culture et la société, et ces nouvelles éditions donnent une photographie tragi-comique de l’état présent de la France. La grande déculturation est en marche, elle n’épargnera pas ces grandes institutions nationales que sont Le Robert et Le Petit Larousse.
Lundi, parmi les 150 nouveaux noms communs que dévoilait la dernière mouture du Petit Larousse, figuraient entre autres « Selfie », « Bolos » ou « Mémériser ». Il est navrant de constater que les éditeurs des dictionnaires s’abandonnent à l’air du temps, pour satisfaire aux desiderata d’une partie inculte de la jeunesse qui n’en demandait probablement pas tant. Quel est l’intérêt d’un coup de pub qui amène à se trahir et à trahir la langue française ? « Selfie » n’est pas un mot français ; sa version québécoise, l’« egoportrait », est beaucoup plus correcte et amusante. Mais que voulez-vous, nos dirigeants n’aiment rien tant que ce qui nous vient d’outre-Atlantique. C’est jeune, frais, festif et multiculturel.
Le terme « mémériser » a, par exemple, été popularisé par l’animatrice « relookeuse » (j’anticipe l’édition 2017) Cristina Córdula. La « mémérisation » est un néologisme qualifiant l’opération, pour une femme, de s’apprêter d’une façon qui la vieillit. On peut aussi le traduire au masculin : « François Hollande était pépérisé par Ségolène Royal, en changeant de compagne il espérait paraître un peu moins bolos. » Voilà une phrase élégante, et riche d’un vocabulaire enjoué.