Comment se fait-il que les Américains, qui sont autant sinon plus intéressés par le Sahel en particulier et l’Afrique en général (comme la Chine), n’interviennent pas dans cet espace désertique balayé par les vents et les djihadistes plus ou moins islamisés ? Ils sont pourtant en guerre contre Daech et le terrorisme international...
Le fait de laisser les Français s’enliser seuls (même les Européens n’y vont pas) pour tenir un espace grand comme l’Europe étonne quand on connaît la propension de l’Amérique à intervenir partout où il y a du pouvoir, de l’argent et du marché à prendre.
Tout porte à croire, après « l’expulsion » de la France de l’Afrique des grands Lacs par la collusion USA-Rwanda, que les Américains laissent monter le chaos pour intervenir un jour sur le mode « on siffle la fin de la récré ». Traduction : « le Sahel est désormais à nous ».
Un scénario à l’irakienne qui se précisera peut-être dans les mois qui viennent, l’Africom et ses bases n’étant pas là pour faire décor...
Les inquiétudes étaient déjà vives, mais l’attaque d’Inates au Niger le 10 décembre les ont brusquement confirmées : le Sahel plonge inexorablement dans un chaos orchestré par les groupes jihadistes, face auquel ni les États locaux ni l’intervention française ne trouvent de réponse à la hauteur des enjeux.
« Ça va très mal et ça va continuer d’empirer »
71 soldats nigériens ont été tués dans l’attaque du camp militaire nigérien, dûment préparée et revendiquée par le groupe État islamique. Un épisode tragique qui confirme que ce pays africain, tout comme le Mali et le Burkina Faso voisins, est confronté à une insurrection islamiste dont la force de frappe ne cesse de croître.
« Ça va très mal et cela va continuer d’empirer », craint Michael Shurkin, politologue à l’institut de recherche RAND, résumant une pensée largement partagée dans la communauté des experts de la zone rencontrés par l’AFP à Washington.
Convaincu de l’importance de la mission de la force antijihadiste Barkhane et de la qualité du travail des soldats français, cet ancien analyste à la CIA décrit une situation effrayante au Niger.
« Il y a trop peu de soldats locaux, à qui il manque compétences et équipements. Les Français ne sont pas assez nombreux non plus. »
L’attaque d’Inates est la plus meurtrière depuis le début de l’offensive jihadiste en 2015 au Niger. Le Mali a été frappé par une série d’assauts sanglants, plus de 140 soldats ont été tués. Le Burkina Faso avait pour sa part perdu 24 militaires en août, dans un assaut contre la base de Koutougou, également près de la frontière malienne.
« Il n’est pas possible de régler la situation en tuant tout le monde. La situation est hors de contrôle », estime un responsable du département américain de la Défense sous couvert de l’anonymat. « Les États sont désorganisés, je pense qu’ils sont justes dépassés. »
Le G5-Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad et Mauritanie), dont les membres sont censés s’unir face à un ennemi chaque semaine plus menaçant, demeure selon lui une idée plus qu’une force. « Avec plus de soutien international, ils pourraient devenir un acteur mais aucun signal n’indique que ce soit en train de se produire. »
Comme les premières réactions au Niger l’ont montré, les opinions publiques locales s’interrogent ouvertement sur le rôle de la force française, qui maintient 4 500 hommes sur le terrain. Un chiffre faible, compte-tenu de l’espace concerné, soulignent les analystes. « Tout le monde sait que Barkhane n’est pas assez important pour faire plus qu’éteindre un feu plus gros encore. C’est la pire des justifications pour une guerre, mais la France en est là », estime Michael Shurkin.
Lire l’article entier sur francetvinfo.fr