Voilà une annonce qui, à peine a-t-elle été faite, fait polémique. L’armée de terre sera en effet prochainement doté de 1 000 véhicules tout terrain de type Ranger, fournis par le constructeur américain Ford [ndlr, qui a une usine en Gironde]. Et comme l’a récemment révélé le quotidien L’Est Républicain, le choix de ce 4×4 fait grincer les dents du côté des industriels français, dont Renault et Citroën, qui lorgnaient ce marché avec respectivement le Duster et le Berlingo.
S’agissant plus précisément de l’offre de Renault, le 4×4 Duster (Dacia) aurait été modifié par l’entreprise Poclain pour répondre aux besoins de l’armée de Terre.
« Ce marché représentait 10 000 heures de travail pour nous, sept à huit personnes à l’année. Sans parler des 100 000 € investis dans le développement pour répondre au cahier des charges de l’armée et les essais de ce Duster modifié », a expliqué Pascal Bernard, le Pdg de Poclain, dans les colonnes de L’Est Républicain.
Le choix de Ford, aux dépends de marques françaises est une pilule trop amère pour certains élus, dont Christophe Grudler, conseiller départemental du Territoire de Belfort. Ce dernier a même lancé une pétition en ligne au motif que « l’armée française doit soutenir l’industrie française » et qu’elle doit donc renoncer « à l’achat de Rangers américains ».
En fait, il s’agit de remplacer une partie des véhicules Peugeot P4 de l’armée de Terre, mis en service à partir des années 1980 (le dernier exemplaire a été livré en 1992… C’est un peu comme si vous rouliez encore BX). Et ce n’est pas la première fois que le ministère de la Défense choisit un fournisseur étranger : en 2009, 334 Land Rover Defender furent commandés pour les besoins du Commandement de la Formation de l’armée de Terre (COFAT).
« Ces matériels d’un modèle plus standard que les véhicules tactiques, spécifiques et coûteux à l’entretien, permettront à ces unités et à celles qui les soutiennent de maintenir plus durablement le parc », avait expliqué, à l’époque, l’armée de Terre. Le fait est : son chef d’état-major, le général Jean-Pierre Bosser, avait confié, en octobre dernier, que la rénovation des Véhicules légers tout terrain (VLTT) P4 allait coûter 27 000 euros pièce… Soit le prix catalogue d’un… Ford Ranger neuf.
Sollicité par l’AFP, le porte-parole du ministère de la Défense, Pierre Bayle, explique :
« L’armée de terre a besoin de mille véhicules tout de suite. Les procédures habituelles avec appel d’offres étant trop longues – 18 mois et plus -, l’armée s’est tournée vers une centrale d’achat interministérielle, l’UGAP (Union des groupements d’achats publics), qui permet de réduire les délais de commande à deux mois et a choisi les véhicules sur catalogue ».
Et M. Bayle d’ajouter : « Seul le Ford Ranger permettait une charge utile satisfaisante, et le tout terrain a été préféré au tout chemin », avant de préciser qu’il s’agit de véhicules civils non militarisés, appelés à être essentiellement utilisés sur le territoire national et non en opérations extérieures, où, pour assurer les liaisons en milieu hostile, l’armée de Terre utilise le PVP (Petit Véhicule Protégé).
Selon Ford, le Ranger peut transporter 5 passages ainsi qu’une charge utile allant jusqu’à 1 310 kg et remorquer 3 350 kg de matériels. Le véhicule est en outre une référence dans son domaine, si l’on en juge par les essais réalisés par les magazines spécialisés.
Cependant, tout n’est pas perdu pour les industriels français : l’armée de Terre aura encore besoin de 3 000 véhicules tout terrain à l’avenir…