Les Échos titrait le vendredi 22 janvier « Le recul du cash va s’accélérer en France » et s’interrogeait sur le sens de cette guerre contre le cash.
Le quotidien cite trois raisons :
Les espèces coûtent cher aux banques
Les espèces facilitent la fraude fiscale et le blanchiment
La manipulation des espèces pose un problème de sécurité.
Voyons ces raisons une à une.
1. La Fédération bancaire française estime que la gestion des espèces coûterait aux banques 3 milliards d’euros. Les comptes de dépôts ne sont toutefois pas rémunérés. Combien rapportent aux banques ces dépôts ? Ces dépôts permettent aux banques de prêter, donc de faire leur métier de transformation (dépôts à court terme transformés en prêts à plus long terme) et une marge sur cette transformation qui est l’intérêt du prêt consenti moins les frais de la banque. La non-rémunération des dépôts augmente les marges des banques. La contrepartie de la non-rémunération des dépôts est la disponibilité immédiate de ces mêmes dépôts. C’est ce que la fédération bancaire essaye de nous faire oublier en ne parlant que des frais liés à la manutention du cash.
2. Les récentes affaires de fraude fiscale et de blanchiment montrent des montages complexes à base de sociétés écrans, de comptes dans des États bien spécifiques, etc. Voir la récente affaire Cahuzac, les plus anciennes affaires de financement des partis politiques, de corruption dans les marchés d’armement, les emplois fictifs… Cela fait belle lurette que les gros trafiquants emploient les canaux de la finance sophistiquée et non le transport de mallettes pleines de cash. Les espèces facilitent peut-être la petite fraude d’artisans ou commerçants à bout du rouleau. Mais la criminalité en col blanc n’en a nul besoin.
3. L’alibi de la sécurité est quasi systématique dans un pays où l’État est vu comme protecteur, bienveillant. Les caméras dans les rues, les fouilles, le flicage Internet, la prolongation de l’état d’urgence… Toutes les mesures liberticides sont mises en place en invoquant l’amélioration de la sécurité.
Cet article est révélateur car il omet la raison fondamentale de la guerre contre le cash : rendre le système financier étanche, supprimer toute possibilité de bank run.
Il a cependant le mérite de nous apprendre qu’en 2014, les retraits atteignaient 128,8 milliards d’euro dans notre pays, soit une des proportions les plus faibles en Europe.
Présenté comme un phénomène naturel, le recul du cash est en réalité une volonté politique délibérée visant à préserver le monopole des banques et instaurer la possibilité d’une taxation arbitraire qui n’aura nul besoin de passer devant un quelconque parlement.