L’ex-ambassadeur du Royaume-Uni en Syrie Peter Ford est interrogé par par Sky News le 5 avril 2017.
Peter Ford : Il faut se demander à qui profite (le crime). Clairement, ce n’est pas le régime syrien ou les Russes qui en bénéficient, et je considère comme hautement improbable l’hypothèse que l’un ou l’autre soient derrière tout ça.
Il y a plusieurs possibilités.
La première, c’est que tout ça soit des fake news, les images, les vidéos, les informations viennent toutes de sources de l’opposition, et non de journalistes indépendants crédibles.
Il est également possible que les images montrent les suites d’un bombardement qui aurait frappé un dépôt djihadiste de munitions chimiques. Nous savons de source sûre que les djihadistes stockaient des armes chimiques dans des écoles à Alep-Est car elles ont été vues ensuite par des journalistes occidentaux. C’est une autre possibilité.
Sky News : Quoi qu’il en soit, ceux qui prennent ces informations pour argent comptant soulèvent la question d’une intervention contre le régime d’Assad.
En réalité, nous n’apprenons jamais. Les (prétendues) armes chimiques de l’Irak, vous vous en souvenez ? On en a été matraqués (pour nous forcer à intervenir). À Alep, on nous a dit qu’un holocauste était en train de se produire, des massacres... Mais rien de tel ne s’est produit. Des reporters indépendants y sont allés après et n’ont trouvé aucune preuve de massacre. Ce que nous avons vu, ce sont des combattants se faire évacuer en bus calmement. Et nous avons découvert par la suite que beaucoup d’images étaient fausses.
Il y a aussi ce qui ont dit « OK, on en est là maintenant, mais une intervention en 2013 aurait pu changer les choses ».
Il n’est pas constructif de débattre de ce qui aurait pu se passer si ou si... Personnellement, je pense qu’en 2013, il était judicieux de ne pas intervenir aux côtés des djihadistes. Peut-être que je me trompe, mais je pense que la plupart des gens, lorsqu’ils y ont réfléchi une seconde, se sont demandés ce qui allait remplacer Assad et le régime séculier qui protège les minorités, les chrétiens, les droits des femmes... Je ne pense pas que les islamistes auraient constitué un meilleur pari, et c’est encore plus le cas aujourd’hui.
Ayez bien à l’esprit le fait qu’Idlib, où cela s’est produit, est un nid de vipères des djihadistes les plus extrémistes.
(Les interventionnistes) sont (comme) des chiens qui reviennent à leur propre vomi. Ils ont commis toutes ces erreurs – l’Irak, la Libye –, ils n’apprennent jamais, ils veulent reproduire le même scénario en Syrie. Heureusement, l’administration Trump a finalement évolué la semaine dernière, et cela peut être significatif, elle a finalement évolué la semaine dernière pour désavouer la politique d’Obama consistant à essayer de renverser le régime syrien, l’entourage de Trump a dit qu’ils sont plus intéressés par l’éradication de Daech, que telle est leur priorité.
Et il est significatif que cette attaque se produise à peine quelques jours après. Si les djihadistes voulaient compliquer la tâche de Trump visant à rationaliser la politique américaine, ils auraient justement, sans aucun doute, essayé de monter des fausses informations comme cela.
Suite au bombardement surprise de la nuit du 6 au 7 avril, les réseaux sociaux ont immédiatement réagi en supposant que Trump avait perdu une partie de son pouvoir. Un exemple avec l’article suivant :
Bombardement américain contre la Syrie : comment Donald Trump
a été repris en main par l’« État profond »
Le bombardement soudain et massif, le 6 avril, de la base militaire syrienne de Shayrat par les forces américaines pourrait bien marquer un nouveau tournant dans la géopolitique mondiale. Au-delà de la Syrie, c’est naturellement un geste agressif brutal qui est ainsi perpétré contre la Russie. Pour l’heure, celle-ci a réagi avec sang-froid.
À ce stade, trois points méritent d’être notés. D’abord, sans guère de surprise, les pays occidentaux et les médias dominants reprennent sans la moindre réserve la thèse selon laquelle l’attaque chimique contre la ville syrienne de Khan Cheikhoun – attaque qui a servi de prétexte à l’agression américaine – aurait été ordonnée par Damas.
Or, outre le fait qu’on voit mal quel intérêt le pouvoir syrien aurait eu à alimenter contre lui une nouvelle fois toute la propagande occidentale, les experts militaires, notamment français, mettent en doute cette thèse, comme le révélait hier l’hebdomadaire Challenges, peu suspect de sympathie excessive vis-à-vis de Bachar al-Assad. Dès lors, on peut s’interroger sur une hypothèse : le drame de Khan Cheikhoun n’était-il pas une provocation imaginée par des forces, à Washington ou ailleurs, qui voyaient avec angoisse la guerre en Syrie pouvoir s’orienter – enfin ! – vers une issue négociée respectant la souveraineté de ce pays ?
Deuxièmement et surtout, au regard de la campagne électorale atypique que mena le milliardaire qui siège désormais à la Maison-Blanche, la décision de ce dernier de recourir à l’agression militaire met en lumière l’extraordinaire capacité de ce qu’on pourrait appeler « l’État profond » américain à reprendre en main celui qui avait dû son succès à sa rhétorique anti-establishment. Plus significatif encore est le langage employé par Donald Trump, qui n’a pas hésité à renouer avec des accents moralisateurs que n’auraient pas renié les pires néo-conservateurs, et mis à l’honneur par George W. Bush.
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Quant à Pascal Boniface, son analyse se rapproche de plus en plus de la ligne atlanto-sioniste officielle :
"La Syrie est dirigée de l'extérieur par la Russie et l'Iran. Bachar Al-Assad n'est plus réellement à la tête de son État" @PascalBoniface pic.twitter.com/Lz73wsFXwo
— franceinfo (@franceinfo) 7 avril 2017