Deux Américano-Canadiennes vont lancer Peeple, une application permettant d’évaluer publiquement son entourage. Une pratique contraire à la réglementation française.
Et si « Jac & Nic », derrière leur façade ripolinée – cheveux parfaitement ondulés, yeux bleus azur, dents d’un blanc surnaturel – avaient conçu la pire application que le Web ait connue ? Les deux entrepreneures américanocanadiennes, Julia Cordray et Nicole McCullough dans le civil, s’apprêtent à lancer Peeple, une appli donnant la possibilité à tout un chacun de noter ses amis, collègues, voisins, coups d’un soir et autres connaissances plus ou moins proches. Comme des millions d’internautes le font déjà au sujet d’un restaurant ou d’un film sur les plateformes spécialisées, il s’agira de passer en revue la personne. Peeple se veut un « Yelp pour humains », pour reprendre le pitch de ses créatrices, et devrait être en ligne dès novembre.
Sur Peeple, n’importe qui pourra être jugé sur un barême allant de une à cinq étoiles, dans trois catégories : vie personnelle, professionnelle et amoureuse. Une fois dans la base de données, votre nom y restera, que vous le vouliez ou non, et il sera impossible de supprimer les commentaires négatifs à votre encontre – à moins que ceux-ci ne violent la charte du site, qui interdit l’usage de gros mots, les appréciations sexistes et la mention des antécédents médicaux. Tout commentaire posté devra l’être sous sa véritable identité (pas de pseudo, donc). Pour ajouter une personne à la base de données, il faudra prouver la connaître en fournissant son numéro de téléphone portable ; la personne concernée sera ainsi avertie par SMS de sa présence sur le site, sans pouvoir y faire grand-chose pour autant. Enfin, une option de géolocalisation permettra de repérer les personnes les mieux notées vivant aux alentours.
Le concept de Peeple fait écho au livre d’anticipation dystopique de Dave Eggers, The Circle (sorti fin 2013 et inédit en France), où une société de la Silicon Valley ressemblant comme deux gouttes d’eau à Google parvenait à connecter tous les résaux sociaux afin de rendre chaque citoyen totalement « transparent » et soumis à la validation de la foule numérique… Pétrie des meilleures intentions et partant du principe (discutable) que les gens sont naturellement bienveillants, Julia Cordray ne voit pas de raisons pouvant dissuader « une personne de mettre en vitrine sa réputation » en ligne, comme elle l’a expliqué au Washington Post.