Suite au sixième essai nucléaire auquel a procédé la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) le 3 septembre 2017, les États-Unis font circuler une proposition de résolution auprès des autres membres du Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU) en vue de renforcer les sanctions, déjà draconiennes, contre Pyongyang. Si les Américains souhaitent un vote du CSNU dès le lundi 11 septembre 2017, un accord avec la Chine et la Russie est, à ce stade, plus qu’improbable. Décryptage d’un programme qui traduit à la fois une instrumentalisation impériale du droit des relations internationales ainsi qu’une volonté délibérée d’affamer et de tuer des millions d’hommes, de femmes et d’enfants nord-coréens.
Bien que la RPD de Corée soit déjà, à ce jour, le pays le plus sanctionné de la planète, les États-Unis veulent aller encore plus loin : en faire le pays le plus lourdement sanctionné de l’histoire. Cette perspective d’un régime de sanctions sans équivalent à aucun endroit du monde ni aucune période historique apparaît alors que l’hypothèse d’une attaque militaire américaine s’éloigne au regard de la dissuasion nucléaire nord-coréenne du faible au fort.
Embargo total sur les importations nord-coréennes de pétrole, interdiction des exportations nord-coréennes de produits textiles, gels des comptes et avoirs de cinq des principaux dirigeants nord-coréens (dont le Maréchal Kim Jong-un) et interdiction de leurs déplacements à l’étranger, interdiction d’envoi de travailleurs détachés nord-coréens à l’étranger, inspection en haute mer des navires nord-coréens... La liste des propositions américaines est impressionnante de par son ampleur.
À part peut-être, semble-t-il, les exportations de produits textiles, la Chine et la Russie, qui disposent d’un droit de veto au CSNU, ont fait part de leur désaccord. Ces deux pays estiment que l’étranglement économique de la Corée du Nord ne favorisera en rien un retour à une issue négociée à la crise en cours. Pékin a appelé d’autres États membres du CSNU, dont la France, pour les exhorter à favoriser la reprise du dialogue – mais rien n’indique à ce stade que Paris ait donné suite à ces propositions.
Si Pyongyang pratique une diplomatie au bord du gouffre, Washington a une conception impériale des relations internationales, fondée sur l’unilatéralisme (fini le temps de la concertation préalable avec Pékin), le chantage (avec la menace, en cas de non-satisfaction, d’établir son propre régime de sanctions ou encore d’étendre celles-ci aux pays tiers qui commercent avec la RPDC), la mise devant le fait accompli (les États-Unis exigent un vote sur les sanctions dès le lundi 11 septembre) et l’outrance délibérée (pour atteindre l’objectif visé en réalité il faut feindre de placer beaucoup plus haut la position initiale de négociation).
L’AAFC souligne en outre que les mesures proposées feront de nouveau comme principales – sinon seules – victimes les populations nord-coréennes. Un embargo total sur les produits pétroliers signifie par exemple le retour à la charrue avec l’impossibilité de disposer de carburant pour les tracteurs, ou encore la fin de la navigation en dehors de la pêche côtière pour les navires nord-coréens, faute de fioul... Lorsque l’on connaît le besoin des produits de la mer pour l’apport en protéines des Coréens, au regard des possibilités limitées d’élevage, les responsables américains brandissent bel et bien l’arme de la famine. L’AAFC appelle à rejeter avec force ce programme criminel, qui aurait pour effet de provoquer des millions de victimes.