Inutile de tourner autour du pot, pour autant que le Pentagone peut avoir finalement conclu que la Russie détenait une supériorité conventionnelle incontestée sur le théâtre européen, la seule justification possible pour l’existence de l’OTAN est inchangée. Les États-Unis doivent maintenir l’occupation militaire de l’Europe occidentale et centrale jusqu’à la fin des temps. Et la justification du projet doit être l’hystérie anti-russe.
D’où la sempiternelle menace bidon. Le mythe de l’imminente agression russecontre les pauvres pays baltes ; les récurrentes agapes de l’OTAN copiées sur le style soviétique – ou maoïste – des conférences du parti ; l’impression illusoire, vendue par le canard boiteux de l’administration Obama, qu’ils sont bénévolement concernés par la sécurité européenne. Et, bien sûr, le contrepoint russe : le soupçon que l’OTAN est fermement engagée dans la fabrication de déclarations de guerre en série.
Tout ce spectacle pourrait être tourné en dérision comme un jeu mental infantile. Pourtant, il est pris au sérieux. « L’OTAN a commencé les préparatifs pour l’escalade d’une guerre froide en guerre chaude » a condamné Mikhaïl Gorbatchev. Il existe en effet des éléments signalant la gravité de la conjoncture géopolitique actuelle. L’administration Obama ne fera rien, alors même que Ben Rhodes, le conseiller adjoint – désespérément nul – à la Sécurité nationale, déclare que « l’agression permanente par la Russie provoquerait une réponse de l’OTAN et une présence plus grande de l’Alliance en Europe orientale ». Les grands médias occidentaux, quant à eux, surfent évidemment sur les vagues monstrueusement hystériques de la diabolisation de la Russie.
En fait, la véritable action est celle des acteurs du complexe militaro-industriel de surveillance et de sécurité militaire à Washington, qui jouent frénétiquement des coudes pour se placer auprès du prochain locataire du 1600 Pennsylvania Avenue, ce qui pourrait aussi bien se traduire par un clintonesque « Crépuscule des Dieux ». Comme je l’ai souligné auparavant, un général américain à Londres a carrément admis que le Grand Schéma [Big Picture] peut nous entraîner dans une Guerre chaude contre laquelle, par ailleurs, aussi bien Poutine que le professeur Stephen Cohen et même Gorbatchev ont déjà mis en garde.
Ainsi, la perspective stratégique du Pentagone est claire : nous sommes déjà entrés dans le territoire de Dr Folamour 2.0. Oubliée la force inébranlable des talibans ; oubliées les opérations sophistiquées de contre-insurrection ; oubliés les djihadistes cinglés du genre Daech. Le vrai jeu devant nous se focalise entièrement sur la possibilité d’une guerre contre des « ennemis haut de gamme » – la Russie et/ou la Chine.
Gardez à l’esprit l’enclave de Suwalki.
Dans ce cadre, les mouvements récents de l’OTAN − contrairement à son énorme enfumage nombriliste − sont clairement offensifs, croyant mordicus que le Kremlin baissera les yeux et n’osera jamais utiliser, par exemple, les armes nucléaires tactiques – rien que ça ! – en rétorsion à une frappe des États-Unis, probablement suite à une provocation sous faux drapeau qui serait vendue par Washington au monde entier comme strictement défensive. Après tout, au XXIe siècle, celui qui gagne la guerre du baratin gagne la guerre tout court.
Ainsi, chaque pays membre de l’OTAN sera toujours forcé par Washington de dépenser 2 % de son PIB dans cette guerre future putative. Étant donné que ces armes doivent être OTAN-compatibles, il s’ensuit qu’elles doivent être achetées à Washington. Pourtant, alors que ce délicieux racket mafieux continue au profit du complexe militaro-industriel de surveillance de la contre-insurrection militaire – la Russie a totalement remanié et mis à jour son propre complexe militaire, laissant l’OTAN à la traîne, et la Chine pas loin derrière, ce qui se produira avant 2020. La Russie a seulement dévoilé une partie de l’ensemble du lot – en Syrie occidentale, en mer Noire et à Kaliningrad. Pas étonnant que les commandants de l’OTAN du style Breedhate aient commencé à flipper.