Il est un peu plus de 1 heure du matin samedi 20 mars, quand les équipes de la cellule interministérielle de crise, les yeux cernés, respirent enfin. L’attestation de déplacement dérogatoire destinée aux habitants des seize départements confinés depuis une heure déjà, est fin prête. Ne reste qu’à la faire valider par Matignon et à la mettre en ligne sur le site du ministère de l’intérieur. C’est chose faite entre 3 heures et 4 heures. « Beaucoup ne s’en rendent pas compte mais c’était un gros travail, il fallait coller au décret, ce n’était pas toujours simple », assure un proche du Premier ministre, Jean Castex. [...]
D’où vient cette notion de 30 kilomètres au lieu des 10 mentionnés jusqu’ici ? Ce style technocratique alambiqué ? À son réveil, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, découvre, interloqué, le fruit du travail d’une partie de ses équipes. Pour justifier de leurs déplacements, les Français confinés ont à remplir un document de deux pages, intégrant une quinzaine de cases à cocher pour justifier d’une sortie dont les modalités varient selon l’heure, l’endroit où l’on se trouve, l’endroit où l’on va, ou les animaux de compagnie que l’on promène. « Illisible », enrage-t-il. « Complexe », confirme dans la matinée la porte-parole du ministre de l’intérieur.
Les réseaux sociaux se déchaînent, le gouvernement est comparé à « la 7e compagnie ». Depuis l’Élysée, Emmanuel Macron se rend compte de l’effet dévastateur. Samedi matin, il ordonne un retrait en rase campagne de l’attestation moquée. « Je veux un système simple et efficace », réclame-t-il à ses troupes. « C’est kafkaïen ! », grince un proche. À la hâte, Matignon s’attelle à la rédaction d’un nouveau document. Mais le mal est fait. (Le Monde)
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Les courbes du nombre de nouveaux cas de #corona par jour en #Israel et du R sont tout simplement magnifiques. #vaccin pic.twitter.com/mrr1at9Tzx
— Julien Bahloul (@julienbahloul) March 25, 2021
2 classes dans l’école de mes filles fermées 2 jours après leur réouverture et 5 semaines de confinement. La raison : des parents refusent le #vaccin, contaminent leurs enfants et pourrissent la vie des autres.
60 gamins en quarantaine.
Les antivax, vous n’êtes que des parasites pic.twitter.com/cC6FEyGY0V— Julien Bahloul (@julienbahloul) February 15, 2021
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Moderna l’a officiellement annoncé mardi 16 mars : la société de biotechnologie a lancé un essai clinique afin de tester un vaccin pédiatrique contre le Covid-19 chez des enfants âgés de 6 mois à 11 ans. Le recrutement de 6 750 petits « volontaires » a commencé aux États-Unis et au Canada, et les premières doses ont déjà été injectées. Le laboratoire, qui conduit l’opération avec les National Institutes of Health, entend étudier « la sûreté, la tolérance, la réactogénicité et l’efficacité » du vaccin, selon le communiqué de l’entreprise. [...]
L’annonce a fait son petit effet en raison de l’âge des participants. Mais, en réalité, la course au vaccin pédiatrique est lancée depuis décembre 2020. Avec, comme chez les « grands », une longueur d’avance pour les tenants de l’ARN messager. Moderna a déjà achevé le recrutement de 3 000 adolescents de 12 à 18 ans. Pfizer en a fait autant, à une différence près : le géant américain et son associé allemand, BioNTech, avaient déjà inclus les 16-18 ans dans leur essai initial. Ils se concentrent donc sur les 12-15 ans, avant de descendre en âge. [...]
Pourquoi viser les enfants, alors même qu’ils ne courent que de très faibles risques de développer une forme grave du Covid-19 et qu’ils semblent moins touchés par le virus ? Le 16 février, la Société française de pédiatrie a rendu un avis en ce sens : « Le Covid-19 chez l’enfant est le plus souvent asymptomatique, les enfants sont peu contagieux et très peu de formes sévères ont été décrites, même pour ceux atteints de pathologies chroniques. Actuellement, il n’y a que très peu de données d’efficacité et de tolérance de ces vaccins disponibles chez l’enfant. À ce jour, cette vaccination n’apparaît pas comme nécessaire chez l’enfant en population générale. » [...]
« Les enfants représentent environ un quart de la population mondiale, rappelle le professeur Gerber. Faites le compte : ils constituent une cohorte essentielle si l’on veut atteindre l’immunité collective. » D’autant que l’idée de vacciner 100 % de la population adulte apparaît totalement illusoire. « Évidemment, plus nous parviendrons à vacciner d’adultes, moins nous aurons besoin de vacciner les enfants, précise Beate Kampmann, directrice du centre vaccinal de l’école d’hygiène et de médecine tropicale de Londres. Mais, pour diminuer autant que possible la circulation du virus, réduire sa transmission, mais aussi éviter l’apparition de nouveaux variants, je pense que les enfants vont nous être nécessaires. »
Tous ? « Peut-être pas en dessous de 5 ans », évalue-t-elle. (Le Monde)
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Des accoutrements de carnaval, des sourires aux grands vents, des farandoles chantantes : l’ambiance était à la fête, dimanche 21 mars, aux jardins de l’Europe à Annecy. Plusieurs centaines de manifestants s’étaient réunies pour une « marche des libertés » colorée, au nom du droit de refuser le masque, le confinement et les vaccins, sous l’œil médusé du reste de la population. Clou du spectacle, un concert en plein air, toutes distanciations sociales oubliées, du chanteur Francis Lalanne, déjà sur le front des « gilets jaunes ».
Cette réunion au goût de « monde d’avant » n’était pas isolée. Dans le même temps, à Marseille, 6500 citoyens costumés descendaient sur le Vieux-Port, malgré l’annulation du carnaval. Certains ont fini au tribunal, parfois condamnés, parfois relaxés. Mêmes scènes, en plus petit comité, dans nombre de petites villes, comme aux Vans (Ardèche) ou à Saint-Antonin-Noble-Val (Tarn-et-Garonne), samedi 20 mars. Une semaine plus tôt, à Lyon, 600 « bambocheurs » rebelles, dont la députée (ex-La République en marche, LRM) du Bas-Rhin Martine Wonner et l’avocat Carlo Alberto Brusa, se déhanchaient sur les cuivres de Danser encore du groupe HK et Les Saltimbanks, l’hymne des antirestrictions. (Le Monde)
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On imagine que l’anarchisme irrédentiste, volontiers vulgaire, fait tache sur la moquette. Mais quid de leur réputation d’humoristes de droite ? Cazarre qui, pour la goberge, prétend voter Giscard (« c’est dégueulasse, parce que les votes ne sont plus comptabilisés »), se marre : « C’est comme ça que tu nous vois ? J’avais un poster de Mitterrand dans ma chambre. En 1988 ! Tu imagines ? » Plus sérieusement, il s’agace : « Quand j’étais gamin, les mecs qui balançaient des horreurs, on disait que c’étaient des comiques de gauche. Ceux qui s’insurgeaient, c’étaient les militaires, les catholiques, les bourgeois. Aujourd’hui, les gens outrés, ce sont les gens de gauche et les 15/25 ans. Pourtant réécoute Coluche, je t’assure, il y a des blagues que tu n’oserais pas raconter… »
Le voilà parti dans une imitation : « Alors, c’est un Noir, il vient là pour un discours, le négro, il s’avance, le mec lui demande : dites bonjour au micro, et le type il fait : “buoonjour migro…” C’est sûr, si c’est Louis Aliot qui la raconte, ce n’est pas pareil. Mais c’était une époque où on contextualisait. Aujourd’hui, on prend les choses de manière brute. C’est justement quand Fdesouche [site d’extrême droite] et La France insoumise te “likent” tous les deux que tu sais que tu as perdu tout le monde. C’est quand tu es insituable que tu fais ce que tu veux. Choquer n’est pas un but en soi. En revanche, ne pas avoir peur de choquer en est un. La liberté, c’est d’être nulle part. » (Le Monde)
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Les réunions non mixtes par Laure Adler dans #CCeSoir pic.twitter.com/6Tsj24qmSN
— C ce soir (@Ccesoir) March 25, 2021
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Nouveau tour de passe-passe à Sciences Po Paris. La procédure de désignation du successeur d’Olivier Duhamel à la présidence de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP), qui a la main sur le budget et la stratégie de l’école de la rue Saint-Guillaume, s’est accélérée. Au mépris du bon sens et de la volonté affichée de rompre avec l’ancien monde. C’est au sein du « collège des fondateurs », ces dix personnalités clés de la fondation, venues du monde politique et des affaires, que le président doit être désigné. Un collège qui, d’ici à la mi-mai, va renouveler six de ses membres : Olivier Duhamel et le préfet Marc Guillaume ont démissionné, tandis que les mandats de Louis Schweitzer, Jean-Paul Fitoussi, Michel Pébereau et Pascal Lamy arrivent à échéance. Il aurait été logique d’attendre le renouvellement des « fondateurs », pour choisir ensuite parmi eux le nouveau président.
Mais l’ancien patron de Renault, Louis Schweitzer, qui assure l’intérim, ne l’entend pas ainsi. « Pour lui, il est normal que les sortants choisissent le nouveau président. Une vision un peu monarchique des choses ! », ironise un proche du dossier. « Par cette habile mascarade, Louis Schweitzer ne lâche pas les clés de la maison », résume Nicolas Metzger, qui fut président du conseil de Sciences Po, et dénonce, depuis l’affaire Duhamel, l’opacité du mode de gouvernance. « On reproduit les mêmes erreurs, dans cet entre-soi que les gens ne peuvent plus tolérer. La FNSP, c’est la Corée du Nord », éructe un enseignant historique de l’école.
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Un grand ménage a ainsi été opéré ces dernières semaines. En France, Silvano Trotta, important pourvoyeur de théories du complot, en a fait les frais dans la soirée du 6 mars. D’autres comptes, comme ceux – amiraux comme affiliés – des DéQodeurs, communauté proche du mouvement QAnon, ont été bannis de Facebook et YouTube en deux temps, d’abord en décembre 2020, puis à la fin de février 2021. Et le 9 mars, c’est la chaîne du blog collaboratif covidosceptique FranceSoir qui a été, à son tour, débranchée de YouTube.
Au total, selon les données diffusées par ces plates-formes, environ 30 000 vidéos de désinformation sur le Covid ont été supprimées de YouTube ces six derniers mois, 70 000 comptes QAnon ont été suspendus par Twitter à la mi-janvier, tandis que Facebook mène officiellement la chasse aux comptes QAnon depuis octobre 2020. Au grand dam des concernés. « Une opération montée », selon Silvano Trotta ; un « tacle les deux pieds en avant dans le tibia de la part de nos adversaires », se désole Leonardo Sojli, des DéQodeurs.
L’objectif de ce type d’opérations n’est pas tant de faire taire les comptes visés, que de « réduire la surface de contact entre ces acteurs malfaisants et le public général », et de les « reléguer aux marges, auxquelles ils appartiennent », précise Nicolas Hénin, consultant sur l’extrémisme et la désinformation.
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« Le message que je tiens à faire passer c’est que vous n’êtes pas en sécurité sur Twitter. Si jamais, demain, vous êtes menacé ou harcelé, non seulement Twitter ne fera rien pour vous protéger, en termes de modération, mais si en plus cette affaire va en justice, Twitter fera entrave à l’enquête », dénonce-t-il.
Le silence du réseau social lui est tout simplement insupportable. « Grâce à des amis qui travaillent dans la sécurité, j’avais pu rassembler l’ensemble des tweets qui me visaient et relevaient du cyberharcèlement. Il y en avait plus de 20.000. On a tout mis sur un CD que l’on a transmis à la justice, toutes les preuves étaient là. Et malgré tout ces efforts, il n’y a pas eu de réaction. » (Europe 1)
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« J’étudie alors la finance à Cambridge », se souvient l’Italienne. « De retour à Paris, je tombe sur son livre “Elle n’était pas d’ici”, en lien avec le suicide de sa fille Solenn, dix ans plus tôt. Je lui ai écrit un mot maladroit, partageant mon bouleversement, sans lui demander de rencontre ». Mais quelques jours plus tard, la jeune femme reçoit un billet du présentateur, qui l’invite à assister au journal télévisé de 20 heures. « Je lui réponds que ce n’est pas possible le soir. Il me donne finalement rendez-vous le 6 avril à 15 heures, dans son bureau, à TF1. J’arrive avec “L’aube d’une vie”, un manuscrit que je voulais lui présenter. Je n’avais que la littérature en tête ». Après lui avoir demandé si elle a un homme dans sa vie, Patrick Poivre d’Arvor l’embrasse sur le front. « J’étais tétanisée », se rappelle l’écrivaine.
Une relation naît alors entre le présentateur et l’écrivaine. Une relation qu’elle imagine totalement platonique. « Je visais un amour sans sexe, une relation intellectuelle. On continue à échanger des petits mots. Il sent bien que je suis réceptive. À la rentrée, le 15 septembre, il m’invite à nouveau au JT. J’accepte... » Ce jour-là, Alessandra Fra est conduite par le présentateur dans la cage d’escaliers des studios de TF1. C’est alors que tout dérape. « En haut des marches, il se jette sur moi, dégrafe mon soutien-gorge, glisse sa main dans ma culotte et m’embrasse sur la bouche. C’est mon premier baiser... Je n’ai pas du tout envie qu’il me touche. Je le repousse, il s’arrête. Furax, il me lance : “Ça ne vous fait pas plaisir que je vous touche ?” »
Trois mois plus tard, encore sous le choc, Alessandra Fra accepte un nouveau rendez-vous avec PPDA. Son but, obtenir des explications. [...] Quelques années plus tard, l’écrivaine aura une ultime rencontre avec le journaliste. Une rencontre qui se soldera à nouveau en traumatisme, puisque le présentateur du JT « se déshabille immédiatement, brandit son sexe et devient très vulgaire ». Pour autant, Alessandra Fra s’enferme dans le silence, ne souhaitant « pas faire de tort à PPDA ». « Je n’ai pas envie d’être pointée du doigt. C’est violent, mais il ne m’a pas violée. J’ai dit “non” et, malgré tout, il a respecté mon “non” », (Closer)
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S’offrir une petite aventure, comme Gabin et Bourvil dans Paris occupée, Julien se l’est permis à deux reprises. Il est entré dans le restaurant avec un ami qui connaît bien le patron. Leur alibi : ils viennent chercher des plats à emporter. En réalité, ils s’engouffrent dans la salle de restauration cachée par d’épais rideaux. Ici, on tombe le masque et on s’assoit, pas forcément à bonne distance de la table voisine. Puis le déjeuner terminé, on ressort par la porte de derrière. « Ce qui m’a surpris, c’est que j’ai pu payer en carte. Je pensais que tout se passait sous la table, en cash », remarque Julien.
Combien de Français se plaisent ainsi à défier les règles sanitaires pour passer un moment dans un bar ou un restaurant ? Quantifier une activité clandestine est par essence difficile. Mais il suffit parfois d’envoyer quelques SMS pour qu’une connaissance livre le nom d’un établissement qui déroge aux restrictions sanitaires. Car beaucoup échappent aux radars des autorités. Parfois même, les forces de l’ordre ferment les yeux. [...]
Échapper aux restrictions sanitaires est un sport. Quand il rentre d’une soirée entre amis, il enfile un sac à dos et une casquette - « ça fait jeune qui rentre du travail un peu tard ». Puis il ouvre l’application d’aide à la conduite Waze sur laquelle les contrôles de police sont signalés. Il ne lui reste plus qu’à rentrer chez lui en les esquivant, à des heures où la majorité des Français sont emmurés chez eux en raison du couvre-feu. Le week-end dernier, il a rejoint une soirée en appartement, dans un quartier huppé de la capitale. 80 personnes y participaient. Les policiers sont finalement intervenus à 3 heures du matin. Ils auraient pu, à 135 euros par tête, récolter quelque 10.800 euros d’amende... Il n’en a rien été. « Ils nous ont juste demandé de partir et nous ont accompagnés en bas. Je suis parti avec une haie d’honneur de policiers », s’amuse Olivier.
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Une salariée de cette agence #PôleEmploi avoue n’avoir plus aucune tâche précise à remplir depuis plusieurs mois :
"Je serais dans le privé, j’aurais été virée depuis longtemps. Ils me laissent pourrir." #EnvoyeSpecial pic.twitter.com/6M7xtbd0Q8
— Envoyé spécial (@EnvoyeSpecial) March 25, 2021