On le redoutait depuis un moment : la fin des confinements anti-Covid et le retour à la vie d’avant, le retour à une vie « normale » où chacun pourrait vaquer à ses occupations en toute responsabilité personnelle, sans obstruction de ses libertés fondamentales (de réunion, de déplacement, économiques) bien mises à mal depuis dix-huit mois s’accompagneraient de la mise en place… d’une nouvelle obstruction sous la forme d’un pass sanitaire.
Autrement dit, après avoir totalement désorganisé nos libertés via la grosse artillerie de confinements et de protocoles, jauges, horaires de couvre-feu, listes de produits non-essentiels et autres décisions hyper-millimétrées dont chacun a pu mesurer à un moment ou à un autre les aspects absurdes (Grande roue de Lille), bureaucratique (attestions de déplacement dérogatoires), idéologiques (tous contre Amazon) ou arbitraires (traque par hélicoptère des randonneurs sans masque), Emmanuel Macron envisageait très sereinement de les « organiser » au nom du retour aux libertés :
Or c’est maintenant chose faite depuis avant-hier : les voyages à l’étranger ainsi que l’accès à certains rassemblements de plus de 1 000 personnes sont conditionnés à la présentation d’un certificat de vaccination ou à un test de dépistage négatif de moins de 48 heures ou à un certificat de rétablissement si on a eu le Covid-19.
Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal était ravi de nous en faire l’annonce puisque pour lui :
« Le pass sanitaire, c’est la liberté. »
Réalise-t-il qu’il parle là comme dans la dystopie 1984 de George Orwell où les citoyens sont travaillés sans relâche par la propagande du Parti avec des slogans inversés du style « la guerre, c’est la paix », « la liberté, c’est l’esclavage », « l’ignorance, c’est la force », jusqu’à se penser libres dans la situation d’oppression qui est la leur ?
Mais, Mme MP, m’objecte-t-on, vous en faites trop : quelle oppression ? Il ne s’agit que des rassemblements de plus de 1 000 personnes, ce qui est loin de constituer une entrave insurmontable à la vie quotidienne ; ensuite, tous les rassemblements ne sont pas concernés ; et en plus, tout cela est prévu pour s’arrêter le 30 septembre. Encore un petit effort et la vie d’avant est à nous !
Mes contradicteurs ont raison sur un point : les seuls rassemblements assujettis au pass sanitaire sont ceux qui relèvent des activités de loisirs, des foires et des salons professionnels. Tout ce qui est politique, syndical ou cultuel y échappe. Et tout ce qui y est théoriquement assujetti sans la possibilité pratique de déployer la mise en œuvre du pass y échappe également. Comme l’écrit le gouvernement lui-même dans ses documentations :
« Il semble difficile par exemple de l’exiger pour les personnes qui seraient stationnées au bord des routes pour regarder le feu d’artifice du 14 juillet. »
Mais contrairement à mes contradicteurs, je prends ces concessions pratico-pratiques pour les unes et apparemment soucieuses de ne pas trop irriter la fibre politique ou religieuse des Français pour les autres, pour un argument de plus en faveur de l’abandon pur et simple de la mesure. Quelle logique y a-t-il à interdire à une personne non vaccinée l’accès à un « festival en plein-air » de plus de 1 000 personnes quand on l’autorise à participer à un rassemblement politique de même dimension ?
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Ajoutons que l’expérience que nous avons des lois antiterroristes successives – des lois élaborées pour nous protéger, elles aussi – tend à indiquer que tout ce qui est instauré à titre temporaire est généralement là pour durer. On l’a bien vu en 2017 avec la décision d’Emmanuel Macron d’intégrer dans le droit commun les principales dispositions de l’état d’urgence décrété par François Hollande en 2015.
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En aucun cas le pass sanitaire ne peut être considéré comme un instrument de liberté. Outre qu’il rétablit une forme de discrimination hygiéniste qu’on pensait révolue, il constitue un instrument délibéré de coercition qui tend à obliger les personnes pas trop tentées par la vaccination (parce qu’elles sont jeunes et pas du tout à risque, par exemple) à se faire vacciner.
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En conséquence, dans l’état actuel des connaissances sur ce coronavirus qui nous immobilise dans une peur excessive depuis plus d’un an, je rejoins tout à fait ce que tweetait récemment le Dr Gérald Kierzek, médecin urgentiste de l’AP-HP et directeur médical de Doctissimo :
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Aussi, plutôt que de prendre les gens pour des enfants à placer sous surveillance perpétuelle et à pousser aux « bons comportements » par des récompenses digne du contrôle social chinois – Tu veux aller au concert ? Vaccine-toi d’abord ! – essayons de bâtir un environnement politique, une vie de la cité où les adultes qui nous dirigent parlent aux adultes qui les ont placés où ils sont. À cette condition seulement aurons-nous effectivement liberté et sécurité.
Première étape, demandons instamment la suppression de ce pass sanitaire conjoncturellement inutile, informatiquement mal sécurisé, politiquement reproductible ad vitam et urbi et orbi et surtout fondamentalement liberticide, contrairement à ce que prétend le porte-parole du gouvernement dans un effroyable accès de novlangue orwellienne.
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« Le pass sanitaire est un sésame vers la liberté »
Cédric O, ministre de la Captation des données des Français, le 30 avril 2021 :
« On estime, que ce que nous mettons en place aujourd’hui, permettra de retourner à la vie normale, ce que tout le monde a envie de faire, de manière progressive et sécurisée »