Il est assez triste de devoir être sévère avec un film qui défend un thème qui nous est cher et un sujet qu’on aurait vraiment envie de soutenir, à savoir la bataille de femmes engagées dans une brigade internationale en faveur des kurdes de Syrie.
Hélas, le film, basé (paraît-il) sur des faits réels, mais tourné au Maroc avec notamment des actrices françaises BCBG est à ce point irréaliste que ça en devient presque ridicule. Mais que vient faire Pascal Greggory, l’acteur génial de Patrice Chéreau, dans ce casting ? Et Esther Garrel, aussi crédible que dans un western spaghetti ? Dilan Gwyn, moqué comme « la Liz Taylor du Kurdistan » par la presse étrangère, et Amira Casar sauvent néanmoins du naufrage ce casting. Mais à quel prix ?
Les dialogues grotesques sont impitoyables pour ces comédiennes qui donnent l’impression d’être parties faire un safari en Syrie. Et quand les acteurs ne parlent ni arabes, ni kurdes, ou anglais avec un accent désopilant, une bonne partie de la crédibilité du film s’évanouit.
Sur le fond, le film enchaîne les approximations, les erreurs, les invraisemblances. Dans Libération, une critique pointe bien le problème : Caroline Fourest n’a pas compris que le cinéma ce n’est pas de la « propagande », ce n’est pas l’histoire « binaire », en Noir et Blanc : les gentilles fi-filles toutes mignonnes qui combattent les très très méchants djihadistes. Le film, dit encore Libé, est « embarrassant » et il est « filmé-joué-monté au bazooka ».
Parfois Sœurs d’armes nous laisse croire qu’il a les moyens d’une superproduction américaine – ce qui pourrait être intéressant –, puis soudain il retombe dans une mauvaise vidéo féministe ou un spot de déradicalisation. Quand l’enfant djihadiste, complètement endoctriné, est sauvé à la fin du film, et semble retourner à ses jouets, les spectateurs éclatent de rire dans la salle (le soir où j’y suis allé) tant le film est caricatural. Une journaliste de Politis l’a comparé ironiquement à La Grande Vadrouille – ce n’est pas gentil pour un film qui prétend parler sérieusement du djihadisme.
D’où vient un tel échec : sans doute fallait-il une certaine prétention de la part de Caroline Fourest pour se vouloir à la fois auteur, scénariste et réalisatrice d’un long métrage français à gros budget, quand elle n’a jamais vraiment fait de cinéma. Pourquoi des producteurs ont-il parié sur une polémiste qui voit tout en noir et blanc et qui, en tant que cinéaste, n’a aucun talent ? Mystère.
Le résultat est à la hauteur d’une certaine mégalomanie, sinon d’une réelle imposture artistique. Et pourtant, insistons, on aurait aimé aimer ce film, vu son sujet, vu l’enjeu des débats sur le terrorisme islamiste, vu l’importance de la question kurde cette semaine même.
Mais encore aurait-il fallu avoir une logique, défendre un point de vue autre que la défense de la sororité féministe face au machisme djihadiste. D’ailleurs, on ne comprend rien dans ce film pourtant binaire : qui combat qui ? Pourquoi ces femmes sont-elles venues ? Comment ? Tout est à ce point invraisemblable qu’on se met à douter de l’existence de brigades internationales de femmes, pourtant, nous dit-on, certes exagérées et même anecdotiques, mais malgré tout bien réelles.
Le public a donné à Sœurs d’armes l’une des pires notes de la rentrée sur AlloCiné et les critiques sont également consternés. Au box office, évidemment : c’est un naufrage.