En décidant de ne pas censurer les dispositions qui posent le plus de risques pour la violation massive de la vie privée et qui sont très probablement contraires au droit international, le Conseil constitutionnel n’a pas seulement permis l’entrée en vigueur de loi Renseignement et de ses boîtes noires. Il a montré les failles d’un contrôle démocratique qui n’est plus adapté à l’époque moderne.
Cela ne vous aura pas échappé même à l’ombre des parasols, le Conseil constitutionnel a validé la loi sur le renseignement le 23 juillet dernier, en ne censurant que quelques dispositions relativement anecdotiques du texte. Il avait pourtant réuni contre lui un front inédit de la société civile, allant des avocats aux magistrats en passant par les associations de protection des droits de l’homme, des institutions (CNNum, CNCDH, CNIL, le Défenseur des droits...), ou des organisations professionnelles. Même l’Association des victimes du terrorisme avait jugé que le texte allait trop loin dans l’atteinte à la vie privée. Mais les Sages ont trouvé sage de ne rien en dire.
Nous ne reviendrons pas ici sur le fond de l’affaire, puisque nous avons déjà eu souvent l’occasion d’expliquer selon nous pourquoi le texte enfreint le droit international des droits de l’homme et notamment la jurisprudence de la Cour européenne, si férocement malmenée par Bernard Cazeneuve pendant les débats.
La réflexion à froid qu’il convient d’avoir un peu plus d’un mois après cette décision du 23 juillet 2015 est démocratique. Elle concerne le rôle que s’est donné le Conseil constitutionnel dans la promulgation du texte, et la réalité de la protection des droits fondamentaux en France. Alors qu’il est censé protéger les droits des citoyens contre les abus du pouvoir, le Conseil constitutionnel s’est très clairement fait le bouclier du gouvernement, avec la pleine conscience de rendre une copie juridiquement indéfendable, que d’ailleurs il ne défend pas.