Le système politico-médiatique peut tout récupérer, même son propre effondrement. Mercredi 25 janvier, la presse française s’est ainsi fait l’écho de l’augmentation spectaculaire des ventes de 1984, le roman d’anticipation de George Orwell. Mais sans y comprendre grand-chose.
« Quel rapport y a-t-il entre George Orwell et Donald Trump ? L’avènement d’une nouvelle expression : les “faits alternatifs”. Au cours de l’émission “Meet the Press”, dimanche 22 janvier, sur NBC, la conseillère de Donald Trump Kellyanne Conway a évoqué ce concept pour qualifier les propos du porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, défendant la veille une contre-vérité grossière. Il prétendait que la cérémonie d’investiture de Donald Trump, le 20 janvier, avait été “la plus grande en termes d’audience”. »
Deux déclarations de l’administration Trump : c’est ainsi que les fulgurants journalistes du Monde expliquent la montée des ventes de 1984, le roman d’anticipation de George Orwell.
Le Figaro ne fait pas beaucoup mieux :
« Où se trouve l’intertextualité entre l’élection de Trump et le roman dystopique de George Orwell ? Le “ministère de la vérité” décrit par Orwell dans 1984 : une ville de Londres fictive – en 1984, donc – où le régime en place représenté par Big Brother surveille les moindres faits et gestes de chacun de ses concitoyens. Dans cette société, la liberté d’expression liberté d’expression n’existe plus. Afin de s’assurer que tout soit sous contrôle, le “ministère de la vérité”, que l’on peut considérer comme un ministère de la propagande réécrit l’histoire aussi souvent qu’il le souhaite pour conserver le pouvoir. “L’invention de l’imprimerie, cependant, permit de diriger plus facilement l’opinion publique. Le film et la radio y aidèrent encore plus. Avec le développement de la télévision et le perfectionnement technique qui rendirent possibles, sur le même instrument, la réception et la transmission simultanée, ce fut la fin de la vie privée”, peut-on lire dans le roman. »
En filigrane, la presse se réjouit donc de ce regain d’intérêt pour 1984 : ces ventes prouveraient que les Américains ont pris conscience du « danger Donald Trump ».
Vraiment ?
Nous avons une autre explication à la montée en flèche des ventes de 1984 : l’incroyable violence des médias contre Donald Trump, sa candidature et toute son équipe depuis des mois, doublée d’une propagande intensive pour promouvoir à peu près tout ce qui va à l’encontre de la paix civile et internationale, le tout présenté comme une défense de la « liberté », de l’« égalité », de la « démocratie ».
L’unanimité pathétique et effrayante des médias américains dans leur soutien à Hillary Clinton, pourtant identifiée par la moitié du peuple américain comme une psychopathe dangereuse pour le pays et pour le monde entier, mais aussi la différence incommensurable entre le bilan réel d’Obama sur le plan économico-social et la façon dont il est présenté dans ces mêmes médias ont évidemment joué un rôle majeur dans la défiance historique des Américains à l’encontre des médias. Car le « ministère de la Vérité » évoqué par Orwell, s’il est un ministère et donc une émanation du politique, illustre évidemment aussi la collusion totale entre l’appareil politique et l’appareil médiatique.
Collusion qui sous-tend d’ailleurs le petit accroc dans le raisonnement médiatique : si les ventes de 1984 augmentent parce que Trump est un dictateur, comment expliquer que l’audience de la presse anti-Trump n’augmente pas de manière concomitante ?
En réalité, la candidature et l’élection de Trump, en faisant exploser le mur du politiquement correct, ont permis à des millions d’Américains – et probablement à des millions d’autres personnes de par le monde – de réaliser que la classe médiatique n’a plus pour mission d’informer mais de répandre les trois « vérités » professées par la société totalitaire imaginée par Orwell :
La guerre, c’est la paix
La liberté, c’est l’esclavage
L’ignorance, c’est la force
Quand une personnalité politique qui souhaite poursuivre l’oeuvre guerrière entamée par ses prédécesseurs est présentée comme la candidate de la paix ; quand le capitalisme mondialiste, qui ruine la population et l’enchaîne à une prostitution symbolique ou littérale, est présenté comme le ressort essentiel de la liberté ; quand l’instruction est laminée et les enfants idéologiquement lobotomisés par un système scolaire présenté comme le ciment de la citoyenneté ; et quand, enfin, toute la classe médiatique organise cette immonde propagande, est-on si loin de 1984 ?
Englués dans leurs catégories périmées (mais ont-elles été un jour d’actualité ?), Le Monde, Le Figaro, l’AFP et toute la presse mainstream préfèrent traquer le « fascisme » et la « dictature » plutôt que de se mettre à la page de l’histoire et de se regarder enfin dans une glace : 1984, c’est eux.