Du 13 au 15 mars courant s’est tenue à Charm el-Cheikh « la Conférence sur l’avenir de l’Égypte ». Quatre pays du Golfe ont promis des investissements et une aide de 12,5 milliards de dollars, et le Caire aurait signé des contrats d’investissements directs d’un montant de 36,2 milliards. Plusieurs ministres occidentaux ont fait le déplacement, dont le chef de la diplomatie américaine John Kerry [1]. Certains analystes se sont demandé quel était le but de ce soutien financier, éminemment politique, des pays du Golfe et de l’Occident, notamment des États-Unis. Éviter le rapprochement entre l’Égypte et la Syrie dans leur lutte commune contre le terrorisme et les Frères musulmans ? Éloigner l’Égypte de la Russie ? Empêcher l’Égypte de jouer son rôle historique dans la région du Moyen-Orient et le monde arabe ? Pour M. Nasser Kandil, sans nier toutes ces hypothèses qui pourraient paraître contradictoires, ce qui s’est passé en Égypte est en relation directe avec ce qui se passe actuellement au Yémen [NdT].
NDLR : article écrit le 16 mars 2015.
Comprendre les raisons de l’avalanche de ces milliards de dollars sur l’Égypte exige que nous envisagions les deux dimensions de cet événement :
la relation de cette manne consentie à l’Égypte par les Pays du Golfe avec les problèmes auxquels ils font face au Yémen [depuis la prise de Sanaa par la rébellion houthiste le 21 septembre 2014, NdT] ;
le pourquoi du soutien occidental, sans lequel les pays du Golfe n’auraient pas pu placer leur argent pour redresser la situation politique et financière de l’Égypte.
En réalité, nous sommes devant une équation bi-factorielle égypto-yéménite, à la fois, géographique, démographique et économique. Car, si le Yémen est au cœur des pays arabes du Golfe, l’Égypte est au cœur des pays arabes d’Afrique, avec entre les deux la mer Rouge.
Par conséquent, lorsque nous parlons des pays du Golfe, nous ne pouvons que tenir compte du Yémen. La preuve en est que l’Arabie saoudite, qui ne semblait se préoccuper que de la Syrie et du Liban, n’a plus d’yeux que pour ce qui se passe au Yémen [2]. Les Saoudiens se sont battus avec tous leurs moyens financiers et relationnels pour que leur capitale, Riyad, soit le siège du dialogue entre les yéménites. Ils ont échoué.
Dès lors, comment faire alors qu’ils ne disposent pas de la force militaire nécessaire pour imposer leurs exigences comme, par exemple, la reconnaissance de Mansour al-Hadi [Le président yéménite démissionnaire qui a subordonné la poursuite des négociations nationales inter-yéménites au transfert du siège des pourparlers de Sanaa vers le Conseil de Coopération du golfe Persique à Riyad, NdT] ou la qualification d’Aden en tant que capitale yéménite ? Comment faire face aux forces des Houtis [3] rendues à leur frontière avec des incursions au-delà ?
D’où le pari sur l’Égypte. Le président égyptien, Mohammad al-Sissi, n’a-t-il pas déclaré, au quotidien Al-chark que la sécurité du Golfe faisait partie de la sécurité de l’Égypte [4] ? Alors, payons ce qu’il faudra pour que les Égyptiens dépêchent leurs forces au Yémen et nous aident à imposer notre domination.