Retourner quelqu’un fait partie du vocabulaire politique, et infrapolitique, celui du renseignement. Tu as un ennemi, disons de la république ou du président, d’un parti ou d’une organisation, et tu arrives à le retourner contre son propre camp, c’est ça, retourner quelqu’un.
C’est tout bénef si l’organisation qui l’héberge n’est pas au courant. On appelle ça aussi un agent double, qui travaille pour A officiellement, mais qui bosse pour B en réalité. Un agent triple c’est un agent double qui a été re-retourné par A, c’est-à-dire découvert et à qui on demande de toujours bosser pour A, mais en intoxiquant B qui pense que l’agent bosse toujours pour lui. C’est compris ? On ne va pas se répéter, surtout que vous pouvez relire.
Dans le monde qui est le nôtre, celui de la politique et des médias, donc pas celui des agents à part ceux qui sont infiltrés, comme le montre Prissette dans son livre de flic infiltré (Connivences au service de l’État), il y a plusieurs espèces de retournés. Certains n’ont pas besoin d’être soumis au chantage ou de subir une des pressions de l’éventail MICE pour changer de camp : ils évoluent, et c’est un droit.
Par exemple, Finky, jeune, était de gauche, immigrationniste et antifrançais. Aujourd’hui il est de droite, anti-immigrationniste et antifrançais, au sens de la souveraineté nationale, puisqu’il préfère toujours Israël à la France, « ce pays [qui] mérite notre haine ». Ah, elle lui aura fait du mal cette phrase, et c’est assez salaud de la lui remettre sous le nez, surtout qu’il ne peut plus se défendre : l’épée de l’Académie est devenue trop lourde pour lui.
Qui est le plus dangereux @JLMelenchon ou @MLP_officiel ? « Je voudrais m’appuyer sur ce qu’a écrit Jacques Julliard dans ses carnets. Si je suis acculé à ce choix que je ne voudrais à aucun prix, je choisirais Marine Le Pen. Il faut aujourd’hui un Front républicain contre… pic.twitter.com/bitVWUmEOw
— Haziza Frédéric (@frhaz) September 28, 2025
Il y a des exemples de changements assez soudains de retournés, qui interrogent. On connaît bien le cas de Philippe Val, qui est passé de militant-chanteur d’extrême-gauche à ultrasioniste anti-Mélenchon, un défenseur ardent de l’Israël génocidaire et islamophobe. Dans son cas, la chose s’est faite parce qu’il était le numéro 2 de la revue Charlie Hebdo, et qu’il avait de l’influence sur Cabu, qui, lui, n’a rien vu venir, jusqu’au 7 janvier 2015, mais il était alors trop tard pour comprendre le piège, la manipulation.
Val, on peut supposer que c’est à cause d’un dossier de mœurs, puisque son acolyte Patrick Font a fait quatre ans de taule pour pédophilie. Val le reniera, et ressortira blanchi de l’affaire, alors que les deux rigolos étaient copains comme cochons, c’est le cas de le dire. Ensuite, effectivement, après l’affaire Font (1996), Val modifiera la trajectoire et le contenu de l’hebdo satirique. La chose s’est passée en douceur, avec deux purges, : la première dès 1992 avec la mainmise sur le titre et le départ de rédacteurs et dessinateurs historiques (Nicoulaud, Peroni, Vergne et Cie), la seconde lors de l’éjection de la bande à Éric Martin (Faujour et Cie), qui ne supportaient pas la tyrannie de Val. Enfin purgé, le journal pouvait se lancer dans une entreprise islamophobe et sioniste qui allait servir la destinée de Nicolas Sarkozy...
De Val à Valls il n’y a qu’un pas ou deux consonnes, que l’ancien Premier ministre des années de sang (2015-2016) franchira allègrement, alors qu’il était au départ propalestinien, et qu’il est devenu un fervent défenseur d’Israël. Là aussi, grosse anguille, voire murène sous roche : soit Valls s’est fait proposer en 2014, juste avant l’attentat contre Charlie et le Bataclan, le poste de calife à la place du calife, et il a ouvert quelques portes, devenant des « failles » dans la sécurité intérieure, soit il a changé par ambition personnelle, jetant ses oripeaux humanistes et socialistes pour devenir le plus grand importateur de l’israélisme en France. Ne sondant pas les cœurs et les âmes, nous en resterons à ces deux hypothèses, sans oublier son intervention dans la nuit du 13 novembre 2015, vers 21h30, quand une colonne de soldats en armes voulut intervenir, ou quand la BI voulut elle aussi intervenir, et que...
Que fait un Ministre français dans un meeting organisé par le lobbie sioniste israélien ELNET en plein génocide ???
Et après on nous parle d'entrisme et de séparatisme...— Duval Marion (@DuvalMarion6) September 19, 2025
Plus près de nous, Vincent Lapierre, très populaire parmi les Gilets jaunes, a quitté E&R pour développer son propre business, ce qui est dans l’ordre des choses. Peu à peu, ses reportages sont passés de la sphère idéologique soralienne à quelque chose de plus identitaire, de plus grand remplacement, avec une tendance à l’islamophobie (sous couvert de racaillophobie, que tout le monde peut comprendre) qui ne déplaît pas aux Identitaires, qui en ont fait un de leurs fers de lance. Frontières le relaie sur X et ailleurs, Pierre Cassen prend sa défense sur Riposte laïque :
Dans sa dernière vidéo @VincLapierre se fait agresser par une dame mécontente car il l'aurait filmé sans la flouter dans une précédente vidéo.
"wallah sur le coran de la Mecque, supprime la vidéo, j'ai un couteau, j'ai une gazeuse sur moi"
Vincent est obligé de la gazer pour la… pic.twitter.com/eDdIjsLtW7— fred le gaulois Uniondesdroites (@FredGaulois) October 10, 2025
Gros buzz et max d’abonnés en prime, mais à quel prix ? Tous les choix sont cohérents, mais c’est l’Histoire qui désigne les vainqueurs. En espérant sincèrement que Vincent ne se fasse pas agresser plus gravement !
La soralosphère n’est pas ennemie de la sphère identitaire, puisqu’il y a des ponts communs, notamment sur l’invasion migratoire. La différence se fait sur la désignation des responsables (et donc de la solution), puisque les Identitaires ne les pointent jamais du doigt. Et cela fait une grosse différence. Pour eux, c’est de la faute de la gauche. Certes, mais de quelle gauche ? Sous quelle influence ? La notion de pouvoir profond change la perspective sur la question de l’immigration.
Vu le nombre de retournés, volontaires ou involontaires, on pourrait en faire une rubrique bien chargée.