Israël prétend que son offensive contre Gaza est une guerre contre le terrorisme, en vérité, c’est un acte de terrorisme d’État.
Le cycle de violence qui a englouti la bande de Gaza depuis le désengagement unilatéral d’Israël en 2005 est répétitif, prévisible et profondément déprimant. Au cours des six dernières années, Israël a lancé trois offensives militaires majeures sur cette enclave palestinienne petite, isolée, désespérément pauvre et à forte densité de population.
Israël se présente invariablement comme la victime, prétendant exercer son droit à l’auto-défense alors qu’il refuse le même droit aux Palestiniens. Pourtant toutes ces guerres ont été incitées par Israël. Toutes ont été dirigées contre des civils et toutes ont impliqué des crimes de guerre. Ces guerres sont le produit direct de l’occupation israélienne, la plus longue et la plus brutale occupation militaire des temps modernes.
La brutalité israélienne contre les civils a atteint une nouvelle ampleur dans la guerre en cours qu’Israël appelle frauduleusement « opération bordure protectrice ». Dans cette guerre, l’armée israélienne, que les propagandistes d’Israël, dans leur langage orwellien aiment appeler « l’armée la plus morale au monde », répand la mort et la destruction dans la population captive de la bande de Gaza sans essayer un tant soit peu de faire une distinction entre les cibles civils et les cibles militaires.
En poursuivant son combat contre le Hamas, l’armée israélienne a bombardé des maisons, des mosquées, des hôpitaux, des cliniques, des ambulances, l’Université Islamique de Gaza et des écoles et des abris de l’ONU. Elle a également ciblé et détruit la seule centrale électrique que possède la bande de Gaza ainsi que les systèmes d’eau et des eaux usées, conduisant Gaza au bord d’une catastrophe humanitaire.
Le dommage qui a été causé est estimé à 5 milliards de dollars. 475 000 personnes ont été déplacées. Le nombre de morts côté israélien s’élève à 67, 64 soldats et 3 civils. L’armée israélienne a tué quelque 1 900 personnes [2300], la plupart étaient des civils dont 450 enfants et a blessé 9 500.
Auto-défense contre qui ?
Comme d’habitude, Israël prétend que sa discorde est avec le Hamas et non avec la population de Gaza. La raison apparente pour la guerre est de protéger les civils contre les attaques à la roquette et au mortier par les militants du Hamas. En effet, Israël prétend que ceci est une guerre contre le terrorisme. En vérité, cette guerre est un acte de terrorisme d’État. Le terrorisme étant l’usage de la force contre des civils à des fins politiques.
L’objectif politique dans le cas qui nous occupe est de maintenir l’occupation illégale israélienne des territoires palestiniens, d’empêcher l’unité entre Gaza et la Cisjordanie et de refuser aux Palestiniens le droit naturel à l’indépendance et à l’établissement d’un État sur 22% de la Palestine historique.
Le discours israélien à propos de la guerre tient en quelques mots : est que le Hamas est une organisation terroriste et que c’est une erreur de négocier avec des terroristes et que la seule façon de traiter avec eux est la force militaire. La réalité est beaucoup plus complexe.
Premièrement, le discours officiel omet le fait crucial que bien que Israël se soit retiré unilatéralement de Gaza en 2005, selon la loi internationale, elle reste une force d’occupation car elle contrôle les points de passage terrestres vers Gaza, son espace aérien et ses eaux territoriales. De plus, après son désengagement de Gaza, Israël a continué d’étendre ses colonies illégales en Cisjordanie et ces colonies sont l’obstacle principal à la paix.
Deuxièmement, le Hamas n’est pas une organisation terroriste bien qu’il ait eu recours à des attaques terroristes sur des civils israéliens dans sa résistance autrement légitime à l’occupation israélienne. Ce n’est pas non plus un mouvement djihadiste comme prétendent ses critiques. Loin d’être un mouvement messianique, c’est une organisation locale avec des objectifs politiques locaux et non mondiaux.
Aux yeux des populations arabes et des musulmans dans le monde entier, le Hamas est un groupe patriotique qui se bat avec un courage louable alors que toutes les chances sont contre lui. Le Hamas souscrit sans aucun doute à une idéologie anti-impérialiste violente et dispose d’un bras armé, mais c’est aussi un parti politique qui a un support populaire massif, ce qui en fait un acteur politique légitime.
Le Hamas a gagné des élections libres et régulières en 2006 et a formé un gouvernement qui a offert de négocier un long cessez-le-feu avec Israël. Ce dernier a refusé de reconnaitre le gouvernement palestinien élu démocratiquement et a rejeté toute négociation avec lui.
L’année suivante, le Hamas et le Fatah ont formé un gouvernement d’unité nationale et ont renouvelé leur offre de négociation.
Les « documents palestiniens » - 1600 documents confidentiels divulguées à Al Jazeera - révèlent qu’Israël a comploté avec le Fatah, l’Égypte et les États-Unis pour renverser ce gouvernement, forçant ainsi le Hamas à abandonner la Cisjordanie et de saisir le pouvoir à Gaza. Le pas suivant d’Israël a été d’imposer un blocus sur Gaza en violation de nombreuses provisions humanitaires de la quatrième convention de Genève.
Ce siège brutal sur 1,8 millions d’habitants, dont la plupart sont des réfugiés d’autres guerres israélo-arabes, est imposé par Israël avec l’aide du régime militaire qui a récemment supprimé la démocratie en Égypte.
Enfin, il y a le refus d’Israël de parler au Hamas au motif qu’il est une organisation terroriste. Or, l’expérience dans le temps montre que malgré sa charte radicale, le Hamas est dirigé par des hommes politiques pragmatiques qui ont accepté la solution de deux États dans les frontières de 1967 et qui ont fait tous les efforts pour mettre fin au conflit par des moyens diplomatiques.
Une mesure majeure dans ce sens était l’accord de réconciliation entre le Hamas et le Fatah et la formation le 2 juin d’un gouvernement d’unité national. Ce gouvernement basé à Ramallah est constitué de dirigeants du Fatah, de figures politiques indépendantes et de technocrates ; il ne comprend aucun ministre affilié au Hamas et il satisfait aux trois conditions principales du Quartet pour être considéré comme un partenaire légitime aux négociations : Reconnaître Israël, respecter les accords passés et renoncer à la violence.
Pourtant le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou dénonce ce gouvernement qui est la quintessence de la modération comme un vote pour le terrorisme et non pour la paix.
Un discours mensonger
Les termes dans lesquels Netanyahou et ses collègues de la droite considèrent le conflit avec le Hamas est un mélange de demi-vérités, de purs mensonges, de tromperie délibérée et d’un « deux poids deux mesures » ahurissant. Leur narrative n’offre pas une sortie honorable du problème. C’est le problème, non la solution. C’est impossible de s’attaquer aux vraies racines du conflit israélo-palestinien. C’est un conflit politique pour lequel, comme le montre de façon définitive l’Histoire, il n’y a pas de solution militaire.
Il s’ensuit que si Israël continue sa politique actuelle, le résultat serait la même chose : plus de violence, plus de carnage, plus de terreur, plus de destruction aveugle, plus de souffrance humaine, plus de guerres et plus de crimes de guerre.
Bref, le discours israélien tourne autour de la diabolisation du Hamas et la diabolisation mène directement à une impasse diplomatique.
La communauté internationale a un devoir à la fois moral et juridique de protéger les civils palestiniens qui vivent sous occupation militaire israélienne et de tenir Israël pour responsable de ses constantes violations des lois de la guerre et du droit humanitaire international.
La politique occidentale qui consiste à refuser de dialoguer avec le Hamas, de soutenir l’interprétation perverse d’Israël du droit à la légitime défense et de lui fournir les armes qui sont utilisées à chaque guerre pour bombarder des gens sans défense, est moralement indéfendable et donc en fin de compte non viable.
Le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon a qualifié l’attaque israélienne de Rafah, où un grand nombre de civils s’étaient réfugiés dans les écoles des Nations Unies, « d’outrage moral et un acte criminel ». Cette description résume fort à propos la politique entière d’Israël dans le conflit avec Gaza.
Par ses propres actions, Israël a sapé toute prétention qu’il aurait pu avoir à dicter les termes dans lesquels le monde devrait considérer sa confrontation avec le Hamas. Une nouvelle narration est nécessaire de toute urgence, basée sur les faits réels de ce conflit tragique, sur la loi internationale et sur la décence humaine.