Des milliers de soldats irakiens assiègent la ville de Tikrit en attendant de mener l’assaut contre le groupe État islamique (EI), qui a accepté jeudi l’allégeance de Boko Haram et promis de nouvelles victoires.
Moins d’une semaine après l’annonce par le groupe islamiste nigérian Boko Haram de son allégeance à l’EI, les djihadistes ont annoncé la « bonne nouvelle » de l’expansion du « califat » en Afrique de l’Ouest.
Dans un enregistrement audio diffusé sur internet, un homme présenté comme le porte-parole du groupe extrémiste sunnite, Abou Mohamed al-Adnani, explique que « le calife », Abou Bakr al-Baghdadi, a accepté « l’allégeance de nos frères du groupe sunnite pour la prédication et le djihad », nom en arabe de Boko Haram.
Appelant les musulmans à rejoindre les rangs des combattants en Afrique de l’Ouest, Adnani a par ailleurs balayé les revers subis ces dernières semaines en Irak.
L’EI s’est emparé de larges pans du territoire irakien depuis juin et de grandes zones en Syrie voisine, et y a déclaré un califat. Mais une coalition internationale mise sur pied par les États-Unis frappe depuis août les djihadistes en Irak, appuyant des offensives terrestres de l’armée et de milices chiites, qui sont parvenues à reprendre du terrain après plusieurs semaines de débandade.
« Notre califat résiste et avance dans la bonne voie et à pas assurés. Nous combattons les croisés et la rafidah (la communauté chiite, NDLR) et jour après jour, l’État islamique devient fort », a affirmé Adnani dans l’enregistrement.
« Les victoires proclamées par la coalition ne sont que des victoires illusoires qui consistent en la reprise de petits pouces de terre en Irak », a-t-il lancé.
Bataille de Tikrit
Cet enregistrement est diffusé alors que les forces irakiennes mènent une vaste offensive contre l’EI, à qui ils tentent de reprendre Tikrit, à 160 km au nord de Bagdad.
La bataille de Tikrit, une ville majoritairement sunnite et ex-fief de l’ancien dictateur Saddam Hussein, représente l’offensive la plus ambitieuse lancée par Bagdad pour reconquérir les territoires occupés depuis l’été 2014 par l’EI.
Après 11 jours d’offensive, les militaires irakiens affirmaient jeudi que la reprise prochaine de Tikrit ne faisait guère de doute.
« Le temps est de notre côté, nous avons l’initiative » et « nous commençons à appliquer la deuxième phase de notre plan », a expliqué le ministre de la Défense, Khaled al-Obeidi en déplacement dans la province de Salaheddine, dont Tikrit est la capitale.
« Tikrit est bouclée de tous les côtés » mais « nous ne voulons pas nous précipiter », a précisé le général de police Bahaa al-Azzawi, interrogé par l’AFP dans le secteur.
En attendant, les forces gouvernementales, fortes de plusieurs milliers d’hommes, tiraient sporadiquement à l’artillerie sur Tikrit, selon les journalistes de l’AFP.
Toutes les localités sur la rive orientale du Tigre étaient sous leur contrôle et les drapeaux noir et blanc de l’EI étaient recouverts de slogans hostiles.
Soldats, policiers et membres des Unités de mobilisation populaire, une force paramilitaire principalement composée de miliciens chiites, ont réussi mercredi à entrer dans Tikrit.
Le commandant des Unités, Hadi al-Ameri, a affirmé qu’il n’y avait plus d’issue pour les quelques centaines de djihadistes terrés dans le centre-ville. Ils « ont deux choix : se rendre ou mourir », a-t-il prévenu.
« Nous n’avons pas besoin d’attaquer, cela pourrait faire des victimes dans les rangs de nos combattants », a-t-il ajouté.
Inquiétude pour les civils
L’avancée des forces gouvernementales est délicate car la technique des djihadistes est de truffer d’engins explosifs les lieux qu’ils s’apprêtent à quitter. « Nous n’avons pas face à nous des combattants au sol mais un terrain piégé et des tireurs d’élite », a résumé un haut gradé.
Aucun bilan de victimes depuis le début de l’offensive contre Tikrit n’était disponible, mais plusieurs dizaines de corps sont acheminés quasi quotidiennement à Bagdad et dans la ville sainte chiite de Najaf.
L’incertitude demeure en outre sur le nombre de civils présents dans la ville.
En Syrie voisine, où le conflit entre dimanche dans sa cinquième année, plus de 50 soldats et rebelles ont été tués dans de violents combats près d’une colline stratégique de la province côtière de Lattaquié (ouest), fief du clan de Bachar al-Assad, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
Vendredi, le chef de la diplomatie américaine John Kerry doit discuter à Charm El-Cheikh en Égypte, où se tient une conférence économique internationale, avec le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi « d’un éventail de sujets bilatéraux et mondiaux, notamment les efforts de la coalition contre l’État islamique, la situation en Libye et la crise en cours en Syrie », selon le département d’État.
Washington a renouvelé jeudi son souhait de voir le président Assad démissionner, saluant, au quatrième anniversaire de la guerre civile, la bravoure des Syriens qui luttent contre la tyrannie.
Sur le terrain, les combattants kurdes ont réussi à stopper une offensive lancée la veille par l’EI contre la ville kurde de Ras al-Ain, dans le nord de la Syrie, selon l’ONG.