Voici une perspective autour de la décision de Trump de se retirer de l’accord JCPOA, c’est-à-dire l’accord sur le nucléaire iranien, qui n’a certainement pas assez de temps d’antenne. Tout n’est qu’une question d’argent.
Après la révolution iranienne de 1978-1979, Jimmy Carter a gelé les actifs de l’Iran aux États-Unis. Depuis lors, les États-Unis conservent entre 100 et 120 milliards de dollars d’actifs iraniens, qui ont généré des loyers et des intérêts. Après la signature de l’accord JCPOA, qui stipulait la levée des sanctions contre l’Iran, Washington a fait de son mieux pour se débarrasser de ces actifs, mais ils auraient dû être rendus aux Iraniens tôt ou tard… à moins que les États-Unis ne se retirent de cet accord, ce qui vient d’être fait.
Il est très important de noter que ces actifs iraniens gelés sont libellés en dollars américains. Et quelle serait la première chose que les Iraniens feraient en reprenant le contrôle du magot ? Mais c’est bien sûr, ils le convertiraient hors de la devise américaine. C’est une exigence inscrite dans la loi iranienne : aucun dollar américain n’est autorisé à être détenu, et personne en Iran n’a le pouvoir de changer cela même s’il le voulait. Selon les Iraniens, les responsables américains ont plaidé auprès des Iraniens pour qu’ils ne liquident pas leurs avoirs libellés en dollars, mais que les Iraniens leur ont dit que personne n’avait l’autorité pour changer cette loi.
Une liquidation soudaine de cette ampleur aurait creusé un trou irréparable dans le système dollar, qui dépend de sa capacité à vendre d’énormes quantités de bons du trésor américain sur le marché international. La liquidation iranienne des actifs en dollars serait arrivée à un moment où les États-Unis ont un besoin urgent d’acheteurs étrangers de leur dette, la demande est faible et la liquidité chez les gros acheteurs de la dette américaine est à son plus bas historique. Cela aurait suffi à déclencher une ruée sur le dollar américain, tout le monde vendant ses bons du trésor. Cela pourrait mener à l’effondrement de tout le système qui permet aux États-Unis de faire les poches du reste du monde en l’obligeant à racheter continuellement sa dette.
Ainsi, la décision de Trump de se retirer de l’accord JCPOA est une tentative de retarder l’inévitable. Les États-Unis s’achètent un peu plus de temps. C’est un mouvement qui sent la peur et le désespoir. En prenant cette mesure, Washington devient le grand perdant : personne ne voudra plus négocier d’accord avec les Américains maintenant qu’ils se sont montrés incapables de les respecter. D’un autre côté, il semblerait que l’Iran ne sera pas beaucoup frappé par ce développement ; ce pays vit déjà sous un régime de sanctions sous une forme ou sous une autre depuis 40 ans et s’en porte plutôt bien malgré lui.