L’humour bête, c’est l’humour à la fois le plus basique mais le plus difficile à trouver. Avantage : il parle à tout le monde. Inconvénient : il fait pousser de hauts cris aux intellectuels autoproclamés. Car l’humour bête n’a aucune ambition, il est comme une vanne du matin au bistrot, le truc qu’on lâche entre deux bières ou deux cafés et qu’on oublie dans la foulée. L’humour bête n’est pas humaniste, il ne résout rien, ne propose rien, sauf de rire de l’absurdité du monde. Mais le monde n’est pas absurde : il est juste incompris. Si nous connaissions toutes les lois qui nous entourent ou nous traversent, la connerie serait éradiquée et tout le monde serait heureux. Mais plus personne ne rigolerait. À vous de choisir : le bonheur... ou l’humour.
En France, les rois de l’humour bête sont Éric & Ramzy, deux personnalités de couleur issues de la banlieue (là où règnent pauvreté, drogue, rap et voitures flammes) qui un jour ont fondé une association consacrée au développement de la débilité. Depuis, on ne les arrête plus (sauf les stups pour de sombres histoires de poudre blanche non sucrée).
Le modèle générique, c’est Laurel & Hardy, les Bouvard & Pécuchet des années 20 et 30 aux États-Unis. Des décennies de succès fondé sur l’association du gros con qui croit tout savoir et de l’innocent qui s’en sort mieux.
Techniquement, l’humour bête fonctionne sur une association idiote mais possible, celle qu’un imbécile ferait. Ce glissement de sens du haut vers le bas (toujours ce principe éternel de la chute, au sens propre et au sens figuré) est à l’origine de l’effet de surprise qu’on appelle le rire.
Dernier avantage de l’humour bête et non des moindres, une fois qu’on en a saisit le fonctionnement, on n’a plus à l’expliquer.
Attention, il y a toujours une réalité derrière un humour bête, même si elle est bien cachée. Sinon on ne rigolerait pas.
Par exemple, ici, il ne s’agit pas d’un chat angora mais d’un mouton (irlandais, d’après nos connaissances). Et c’est le décalage entre la réalité visuelle du mouton et le pseudo chat angora vendu sur Le Bon Coin, pour ne pas le citer, qui crée la perturbation à l’origine du rire. L’ensemble illustrant à sa façon le petit monde de l’arnaque ou de la survente qui grenouille sur les sites de petites annonces.
Profitons-en pour diffuser une illustration de ce genre d’arnaque, avec cette fois-ci l’arnaqueur arnaqué :
Alors évidemment, tout ne déclenche pas à chaque coup un rire franc et massif, à l’instar d’un sketch de Dieudonné, mais il en est de l’humour comme de la bouffe : il en faut pour tous les goûts, c’est une loi sociologique. Les petites secrétaires aiment bien Gad Elmaleh, elles le trouvent mignon et gentil, et son humour simplet piqué aux Nord-Américains fait mouche dans les CE. Les gens du Nord aiment bien Dany Boon, même s’il est expatrié à Los Angeles depuis qu’il est devenu multimillionnaire. Les Français informés aiment bien Dieudonné, parce qu’il se moque du pouvoir profond, ce que personne n’ose faire. Mais ne nous écartons pas du sujet, le rire bête.
On va terminer cette étude sémiologique très poussée sur une vanne bête et méchante, la marque d’Hara-Kiri, un humour qui mêle le populaire et le raffiné. Le raffiné, c’est justement la prochaine famille...
Allez, une dernière pour la Ruth, même si ça va pas faire plaisir à la LDNA, la Ligue de défonce noire africaine. Aujourd’hui, certains humoristes disent qu’on ne doit pas rire aux dépens des autres, que le « bon » humour c’est celui qui ne discrimine personne, bla, bla, bla. Eh bien non. L’humour est une forme de discrimination, mais une discrimination marrante, cong !