Après le refus du chef de la gauche radicale de soutenir un gouvernement de coalition, le chef de l’État grec recevra les dirigeants des partis dimanche pour éviter la sortie du pays de la zone euro.
La Grèce s’enfonce dans son paradoxe. Berceau historique de la démocratie, elle se passionne toujours autant pour la politique, comme en témoigne la bonne participation aux élections générales du 6 mai (65 % des électeurs inscrits se sont déplacés pour voter). Mais cette passion ne produit aucun pouvoir capable de répondre aux enjeux du pays.
Alexis Tsipras, le Mélenchon local, qui a triplé son score électoral par rapport à 2009, a refusé de soutenir un gouvernement d’union nationale avec Evangelos Venizélos, le leader du Pasok (socialiste), respectant les engagements de rigueur budgétaire signés il y a trois mois. Le pays n’a donc toujours pas de premier ministre, alors que jamais l’urgence n’a été aussi grande.
Ce samedi, Evangelos Venizelos a rendu au président Carolos Papoulias le « mandat expiatoire » qu’il lui avait confié. Le chef de l’État a convoqué les dirigeants des trois grands partis dimanche. À charge pour eux de se mettre d’accord avant jeudi prochain pour former un gouvernement de coalition.
Pour l’heure, c’est l’inconnue. Qui représentera la Grèce aux réunions de l’Eurogroupe et de l’Ecofin lundi 14 mai et mardi 15 mai ? Il lui faudrait une forte personnalité pour défendre auprès des partenaires européens l’octroi au mois de juin d’une tranche de 8 milliards d’euros de prêts bonifiés. Qui siégera derrière le drapeau à croix et bandes bleues au sommet de l’Otan à Chicago le 20 mai ? Un éloquent négociateur serait le bienvenu si la Grèce veut éviter que les Occidentaux entérinent l’exigence du gouvernement de Skopje de nommer son pays « Macédoine », à laquelle les Grecs s’opposent pour des raisons historiques.
Système clientéliste
« Je suis très inquiet (…) J’en appelle au sens de la responsabilité nationale de tous les dirigeants politiques afin de trouver un accord respectant les engagements du pays », avait déclaré vendredi le président de l’UE, Herman Van Rompuy.
Si aucun accord n’est trouvé avant jeudi, de nouvelles élections seront convoquées. Ce qui pourrait signifier la sortie du pays de la zone euro. Assez curieusement, la population grecque, qui d’après tous les sondages reste très majoritairement acquise à l’euro, ne comprend ni les exigences de ses créanciers, ni leur impatience face à la lenteur opaque des réformes structurelles. « Je n’ai pas voté pour le Pasok, cette fois, lance Michalis, chauffeur de taxi indépendant, parce qu’il ne fait rien pour ma fille, alors qu’elle a un diplôme d’ingénieur ! »
Dans le système clientéliste régnant depuis l’arrivée des socialistes au pouvoir en 1981, il y avait comme un droit des militants à placer leurs enfants dans l’administration. Le Pasok est tombé de 43 % à 13 % des voix entre les scrutins d’octobre 2009 et du 6 mai dernier.
« Dans un pays où le chômage des jeunes dépasse les 50 %, les petites gens ne raisonnent ni ne votent plus rationnellement !, explique un financier grec. Les Grecs ont perdu toute confiance. Seuls les Chinois ne cessent de nous répéter qu’ils croient au potentiel à long terme du pays ! »