C’est une réalité qui dérange. De temps à autre, les tribunaux examinent des affaires qui mettent en cause un(e) professeur ayant eu une liaison avec l’un(e) de ses élèves, de manière consentie aux dires des deux protagonistes. Ce lundi, un professeur de mathématiques de 31 ans sera ainsi jugé à Fontainebleau (Seine-et-Marne) pour avoir entretenu pendant plusieurs mois une relation avec une collégienne de 14 ans.
Une histoire présentée comme une « relation amoureuse » par la jeune fille. Mais pas par la justice, car l’enseignant est poursuivi pour corruption de mineur de moins de 15 ans et atteinte sexuelle par personne abusant de l’autorité conférée par sa fonction. « Même quand il y a consentement, un adulte ne peut pas avoir de relations sexuelles avec un mineur de moins de 15 ans. Et, quand on est en position d’autorité, le consentement n’est possible qu’à partir de 18 ans », a rappelé Guillaume Lescaux, le procureur de Fontainebleau. Cette affaire résonne d’autant plus dans l’opinion publique que la question du consentement sexuel des mineurs fait actuellement débat après deux décisions judiciaires contestées.
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Des histoires qui semblent se produire davantage au lycée qu’au collège. « D’autant que les profs et les élèves n’ont parfois qu’une dizaine d’années de différence », note le syndicaliste enseignant. Selon les témoignages recueillis au tribunal, lorsque ces affaires ont été judiciarisées, ces histoires démarrent toujours par la fascination qu’exerce un prof sur un élève : « Les enseignants que j’ai défendus dans de pareils dossiers étaient tous dotés d’un certain charisme et entretenaient une complicité intellectuelle avec leurs élèves avant que la relation ne dévie avec l’un d’eux », explique maître Danglade.
« L’enseignant représente la figure du savoir, de la culture et de l’autorité. L’élève qui éprouve de l’admiration pour son prof peut mal interpréter ce sentiment et s’engager sur des fausses bases dans une relation amoureuse. Et comme l’adolescent est fragile dans ses dimensions narcissiques, il va se sentir valorisé par cette relation hors normes avec son enseignant », ajoute Sylvie Amici, psychologue de l’Éducation nationale. « La posture de l’enseignant qui détient le pouvoir, peut appeler le transfert, comme c’est le cas entre un patient et son thérapeute », analyse aussi Mireille Cifali, professeure d’université honoraire de sciences de l’éducation à l’université de Genève.
Reste à expliquer comment un enseignant peut enfreindre un interdit absolu pour s’autoriser à vivre une liaison de la sorte. « Dans ces affaires, les ados se pensent adultes et les adultes se pensent encore ados. L’enseignant ne se considère plus comme un professionnel », analyse Sylvie Amici.