Le parti au pouvoir au Portugal a abandonné sa tentative de restreindre de manière forte les demandes de citoyenneté émanant des descendants des juifs séfarades, une initiative que les responsables et organisations juives avaient qualifié d’antisémite.
À la mi-mai, des membres du parti socialiste avaient soumis un projet d’amendement visant à changer la loi de 2015 qui accorde la citoyenneté aux femmes et aux hommes en mesure de prouver qu’ils sont descendants des Juifs dont les familles avaient fui la péninsule ibérique dans le sillage de l’Inquisition – une période marquée par des persécutions antisémites dans le Portugal et dans l’Espagne du XVe siècle.
Avec les changements proposés, qui seraient entrés en vigueur en 2022, seules les personnes ayant vécu au Portugal pendant deux ans auraient été éligibles à la citoyenneté. Cette condition aurait largement restreint le nombre de candidats potentiels.
Il n’existe actuellement aucune restriction exigeant de vivre dans le pays ou d’en apprendre la langue pour les juifs désireux de déposer un dossier de candidature à la nationalité portugaise.
Les critiques avaient âprement dénoncé l’amendement, estimant qu’il était d’une dureté extrême, ajoutant que le ton utilisé pour le défendre était antisémite et antisioniste.
Des experts présentés par le parti socialiste avaient déclaré qu’en l’espace d’une centaine d’années, le Portugal pourrait passer de quelques milliers de Juifs à 250 000 personnes, ce qui ferait peser une menace démographique sur l’identité du pays. Le docteur Jose Ruah, membre du conseil d’administration de la communauté juive de Lisbonne, avait déclaré à l’occasion d’une audience parlementaire, au mois de juin, que les déclarations faites au sujet d’une supposée « prise de contrôle » du pays par les juifs séfarades ou les comparaisons faites entre les juifs et le coronavirus étaient à la fois « blessantes et offensantes ».
« C’était comme si je me trouvais moi-même dans une pièce pendant l’Inquisition à Lisbonne et qu’on me demandait de prouver mon judaïsme », raconte Leon Amiras, avocat israélien qui travaille étroitement aux côtés de la communauté juive de Porto sur les candidatures à la citoyenneté.
Même s’il n’était pas présent lors de l’audience, l’histoire personnelle de sa famille avait été évoquée. « Soudainement, ces deux membres du parlement ont examiné qui j’étais et ils ont tenté, de toute évidence, de déterminer si j’étais ‘suffisamment juif’ pour mériter la citoyenneté », ajoute-t-il.
Catarina Rocha Ferreira, déléguée au sein du Parti social-démocrate, qui est également représenté au gouvernement portugais, a souligné lors d’une audience avec la communauté juive de Lisbonne, le 25 juin, qu’aucun autre groupe ethnique ne bénéficiait de la même capacité à obtenir la citoyenneté portugaise, déplorant le fait que certains candidats n’avaient souvent aucun « lien authentique » avec le pays et qu’ils n’étaient en quête que d’un passeport européen.
Mercredi, le parti socialiste a décidé de ne pas changer la loi mais d’adapter de nouvelles régulations qui préciseront dans les faits l’existence d’un « lien objectif » avec le Portugal.
« Il faut féliciter le gouvernement et le parti socialiste qui ont enfin retrouvé leur bon sens, ce qui entraînera par conséquent le renforcement – et non la destruction – de ce texte », commente dans un courriel adressé au Times of Israel Michael Rothwell, membre du conseil d’administration de la communauté juive de Porto. Il ajoute que les communautés juives sont « très satisfaites » de ce résultat.
Le parti socialiste avait mis au point, en 2015, la version originale de la loi sur la nationalité dans le but de « rectifier des erreurs historiques ». Pour cette raison, un grand nombre de nouveaux citoyens séfarades qui avaient pu voter par procuration lors du scrutin portugais organisé au mois d’octobre, l’année dernière, avaient versé un bulletin socialiste dans l’urne.
La communauté juive et le gouvernement portugais sont néanmoins tous deux d’accord sur le fait qu’il y a un aspect de la loi sur la nationalité qui est devenu incontrôlable : les publicités.
Après l’adoption, en 2015, de la loi, et quasiment du jour au lendemain, des publicités colorées avaient fait leur apparition sur les réseaux sociaux promettant un accès facile à un passeport portugais.
Ces publicités, qui faisaient la promotion d’une « citoyenneté portugaise instantanée », mettant en avant des photos de jeunes Israéliens souriants, avaient entraîné des critiques ainsi que l’inquiétude sur d’éventuels fraudeurs. Des groupes sur Facebook tels que « Obtenez la citoyenneté portugaise » ou « Nationalité facile » rassemblent des milliers de membres qui partagent des astuces et des ruses permettant d’accélérer le processus.
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