Et si la crise financière et pédagogique traversée par l’université était due à la façon dont on sélectionne les étudiants ? Démonstration
Les universités crient misère, non sans raison. En dehors de quelques grands établissements consacrés par la tradition, la plupart des facs françaises sont en déficit chronique, tant les dotations publiques, depuis l’application de la loi sur l’autonomie promulguée par Valérie Pécresse et renforcée par Geneviève Fioraso, ont chuté. Plus grave, elles affichent souvent des taux d’échec incompatibles avec le projet - déjà lointain - d’amener 50 % d’une classe d’âge au niveau licence. Selon le bac d’origine - ce premier diplôme qui ouvre automatiquement les portes du supérieur -, le taux d’échec va de 30 % (avec un bac S) à 97 % (avec un bac pro).
Crise financière, crise pédagogique. Ce n’est pas seulement une question de moyens, même si les dotations sont outrageusement inférieures à ce qui se fait dans le reste de l’OCDE - ou aux États-Unis. C’est aussi, et d’abord peut-être, une question de redéfinition des missions, de reformulation du cursus licence et surtout de sélection.
La sélection par l’absurde
Anne Fraïsse, la présidente de Montpellier-III, en est là : elle inscrit les étudiants par tirage au sort - parce que les murs de la fac ne sont pas extensibles et que l’on n’entasse pas 300 étudiants dans un amphi prévu pour la moitié. Mais l’absurdité n’est pas le fait d’un président qui aurait opté pour l’aléatoire : Ubu est au ministère.
Par ailleurs, suivant les modes et les rumeurs, les néo-bacheliers s’inscrivent massivement dans des filières surchargées (psycho/socio) ou ne disposant que d’un nombre restreint d’enseignants (coréen - qui a récemment bénéficié d’une vogue inexplicable - ou japonais). Serait-il possible que nombre de ces inscriptions soient le fait d’étudiants fantômes, désireux de se procurer un système de santé à bas prix ? Le nombre de redoublements le suggère fortement. On peut échouer une fois, mais tous les ans ? Rappelons qu’il n’y a dans les facs qu’un contrôle aléatoire de l’assiduité. Faut-il pour autant refuser d’inscrire des étudiants que l’on suspecte (sur quelle base ?) de venir là en touristes ? Rappelons que l’inscription dans le supérieur est le droit intangible, en l’état, de tout titulaire du bac ou d’un diplôme équivalent. Et que le postulant est "libre de son choix final d’orientation", dit la lettre de la loi.