Les eurodéputés ont voté à une large majorité le déclenchement de l’article 7 des traités de l’Union à l’encontre de la Hongrie.
« Je vais parler très lentement, ce vote est délicat », avait prévenu Antonio Tajani, le Président du Parlement européen, qui présidait la séance du vote de l’hémicycle strasbourgeois sur le déclenchement d’une procédure exceptionnelle liée au respect de l’État de droit en Hongrie. Le rapport sans concessions de l’élue verte néerlandaise Judith Sargentini sur la politique du Premier ministre Viktor Orbán, a, finalement, été adopté, mercredi 12 septembre. Et à une large majorité : 448 voix pour, 197 contre et seulement 48 abstentions.
L’article 7 des traités de l’Union, procédure aussi exceptionnelle que stigmatisante, actionnée qu’une fois dans l’histoire de l’UE (par la Commission contre la Pologne à la fin de 2017), va donc pouvoir être activée à l’encontre du gouvernement de Viktor Orbán, toujours membre du Parti conservateur européen (PPE) mais devenu coqueluche des droites extrêmes européennes en raison de sa politique hostile aux migrants.
« La décision d’aujourd’hui n’est rien de moins qu’une petite vengeance des politiciens pro-immigration contre la Hongrie », a déclaré depuis Budapest le ministre hongrois des Affaires étrangères Peter Szijjarto peu après l’annonce du vote.
Il a ajouté estimer que le vote des élus est « l’ultime preuve claire que le Parlement européen compte une très grande majorité de politiciens pro-immigration » et qu’elle a « révélé l’intention de former une coalition après les élections [européennes] de mai prochain entre les libéraux, la gauche et le PPE », qui a voté la résolution, selon M. Szijjarto.
Par ce vote, hautement symbolique, le Parlement de Strasbourg dénonce des « risques de violation grave de l’État de droit en Hongrie ». Mais la procédure de l’article 7 est longue, et son efficacité n’a encore jamais été prouvée : pour l’heure, Varsovie a refusé d’amender substantiellement ses réformes de la justice, jugées problématiques par la Commission.
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Viktor Orbán dénonce le chantage de l’UE – Discours complet
Le Premier ministre conservateur hongrois Viktor Orbán était ce mardi 11 septembre 2018 au parlement européen de Strasbourg pour s’exprimer dans les discussions portant sur le rapport Sargentini – du nom de sa rédactrice principale Judith Sargentini, députée européenne de la Gauche verte – qui dénonce la situation de « l’État de droit » en Hongrie. Il est demandé à l’encontre de la Hongrie l’activation de l’article 7 du Traité sur l’Union européenne, qui vise à suspendre un certain nombre de droits de l’État-membre ciblé, comme par exemple le droit de vote au sein des institutions de l’UE. Nous avons retranscrit et traduit le discours de Viktor Orbán.
Monsieur le Président, Chers députés,
Je sais que vous avez déjà arrêté votre jugement, je sais que le rapport sera voté par une majorité d’entre vous, et je sais que votre opinion ne sera pas changée par mon intervention. Pourtant je suis venu ici devant vous car vous n’êtes pas sur le point de juger un gouvernement mais un pays et un peuple. Vous allez juger une Hongrie qui fait partie depuis 1000 ans de la famille des peuples chrétiens d’Europe. Une Hongrie qui par son labeur et quand il le fallait, par son sang, a pris part à l’écriture de notre formidable histoire européenne. Une Hongrie qui s’est révoltée et qui a pris les armes contre la plus grande armée de son temps, l’armée soviétique, et a subi un grand martyr pour la liberté et la démocratie et qui quand il l’a fallu, a ouvert ses frontières à ses compagnons d’infortune d’Allemagne de l’Est.
La Hongrie a lutté pour sa liberté et pour sa démocratie. Je me tiens ici et je constate que ceux qui accusent la Hongrie sont ceux qui ont hérité de la démocratie, qui n’ont jamais eu à prendre de risque personnel au nom de la liberté, et c’est eux qui aujourd’hui veulent condamner les combattants de la liberté hongrois, démocrates et anti-communistes.
Chers députés,
Je me tiens ici aujourd’hui et je défends ma patrie car pour les Hongrois, la liberté et la démocratie, l’indépendance et l’Europe, sont des questions d’honneur. C’est pourquoi je vous déclare que le rapport devant vous attente à l’honneur de la Hongrie et du peuple hongrois. Les décisions concernant la Hongrie sont faites par les Hongrois lors des élections parlementaires. Vous n’établissez rien de moins que le peuple hongrois n’est pas digne de confiance pour définir ses propres intérêts.
Vous pensez mieux savoir que les Hongrois ce qui est bon pour eux.
C’est pourquoi je dois dire que le rapport est irrespectueux à l’égard des Hongrois. Ce rapport fait preuve de deux poids deux mesures, est un abus de pouvoir, dépasse les limites des sphères de compétences, et sa méthode d’adoption contrevient aux traités.
Chers députés,
Pour nous en Hongrie la démocratie et la liberté ne sont pas des questions politiques mais morales, et vous êtes sur le point à travers l’expression de votre majorité de porter un jugement moral et coller une étiquette sur un pays et un peuple.
Vous prenez une lourde responsabilité en prenant, pour la première fois dans l’histoire de l’Union européenne, la décision d’exclure un peuple européen de la prise de décisions européennes.
Vous priveriez la Hongrie de représenter ses propres intérêts au sein de la famille européenne à laquelle elle appartient.
Nous avons et nous aurons des débats. Nous avons des conceptions différentes du caractère chrétien de l’Europe, du rôle des nations et des cultures nationales. Nous considérons différemment le principe et la mission de la famille et notre opposition est frontale sur la question migratoire.
Si nous désirons réellement une unité dans notre diversité, alors les différences ne peuvent servir de prétexte à jeter l’opprobre sur un pays, et l’exclure de la prise de décision en commun.
Nous ne nous abaisserions jamais à réduire au silence ceux qui ne sont pas d’accord avec nous.
Monsieur le Président,
Ils veulent exclure un pays qui a également apporté une réponse claire aux élections européennes. En 2009, 56% et en 2014, 52% ont voté pour nous.
Mesdames et messieurs les députés,
Nous sommes le parti le plus couronné de succès en ce parlement européen. Nos opposants socialistes et libéraux ne sont bien sûr pas ravis de nos succès, mais se venger sur les Hongrois car ils n’ont pas voté en majorité pour eux n’est ni respectueux, ni européen. De plus, ce rapport a été écrit par des gens qui ne sont pas au clair avec un certain nombre de faits élémentaires. Le rapport le reconnaît, ils ont annulé l’envoi d’une délégation en Hongrie, c’est-à-dire que vous allez apporter une décision sans enquête factuelle en bonne et due forme.
Le rapport contient 37 erreurs factuelles sérieuses, et chaque député a reçu hier à ce propos un document de 108 pages de notre part.
Chers députés,
Notre union est maintenue unie par le fait que nos débats sont encadrés par des règles, j’ai moi-même au nom de la Hongrie conclu des accords et fait des compromis avec la Commission, sur la loi médiatique, sur le système juridique, et même sur certains points de notre constitution.
Ce rapport foule aux pieds les accords passés des années auparavant. Mais si vous pouvez faire une telle chose, alors pourquoi passer des accords avec une quelconque institution européenne ? Ce que vous faites est pour l’Union et le dialogue constructif, un coup dur.
Chers députés,
Chaque nation et État-membre a le droit de déterminer comment organiser sa vie dans son propre pays. Nous défendons nos frontières, et nous seuls déciderons avec qui nous vivrons. Nous avons bâti une barrière, et avons arrêté les centaines de milliers de migrants. Nous avons défendu la Hongrie, et nous avons défendu l’Europe.
Aujourd’hui est le premier moment où dans l’histoire de l’Union européenne, une communauté condamne ses propres gardiens frontaliers.
Monsieur le Président,
Parlons franchement. Ils veulent condamner la Hongrie car les Hongrois ont décidé que notre patrie ne sera pas un pays d’immigration. Avec le respect dû, mais avec la plus grande fermeté, je rejette les menaces des forces pro-immigration, leur chantage et leur diffamation de la Hongrie et des Hongrois, le tout s’appuyant sur des mensonges.
Je vous informe respectueusement, quelque soit la décision que vous apporterez, que la Hongrie ne cède pas au chantage, la Hongrie défendra ses frontières, arrêtera l’immigration illégale, et défendra ses droits, si besoin est, contre vous également.
Nous Hongrois sommes prêts pour les élections européennes de l’an prochain, où enfin les gens pourront décider du futur de l’Europe, et pourront ramener la démocratie dans la politique européenne.
Merci de votre attention.
(Source : visegradpost.com)
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La réaction de Nigel Farage aux menaces de l’UE (cliquez sur « Sous-titres » pour activer les sous-titres en français) :